Le pouvoir use. Cette vérité politique se confirme de nouveau dans le contexte tunisien. A en croire la neuvième vague du baromètre politique 3C Etudes, présentée lundi 24 septembre par Hichem Guerfali, directeur général de cette société d’études marketing, la Troïka au pouvoir depuis décembre 2011 serait en perte de vitesse. Par rapport à leur score lors des élections du 23 octobre 2011, les trois partis de la coalition au pouvoir perdent 39% (Congrès Pour la République), 31% (Ennahdha) et 30% (Front Démocratique pour les Libertés et le Travail –FDLT, ou Ettakatol).
Respectivement, et si on devait refaire les élections du 23 octobre 2011, les trois formations verraient leur capital en voix tomber de 1.498.905 à 1.034.000, pour la principale formation de la coalition (Ennahdha), de 352.825 à 216.000 pour la seconde (CPR) et de 285.530 à 284.989 pour la troisième (Ettakatol). Dans ce cas de figure, au total la Troïka récolterait moins que … Ennahdha, c’est-à -dire 1.448.000 voix contre 2.137.260 en octobre 2011.
Pour la coalition au pouvoir, les choses ne se passeraient pas mieux en cas de tenu d’élections en 2013, puisque Ennahdha ne récolterait que 30,4% des suffrages (contre 36,97), le CPR passerait de 8,70% à 6,5%, et Ettakatol de 7,04 à 4,1%. Cette «dépression» de la Troïka s’accompagnerait d’une redistribution des cartes puisque plusieurs partis politiques de l’opposition –un concept qui n’est pas clairement délimité, puisque les lignes de démarcation bougent constamment- amélioreraient leurs scores, tant en cas d’une réédition des élections du 23 octobre 2011 que de la tenue d’un nouveau scrutin en 2013.
Dans le premier cas de figure, les partis ayant pris part à l’élection du 23 octobre qui amélioreraient leurs positions sont, dans l’ordre, Al Moubadara (+13%, de 198.000 à 284.989 voix), Al Aridha (+25%, de 273.362 à 342.000 voix), le Parti Démocratique Progressiste –qui s’est depuis fondu dans le parti républicain- (+62%, de 159.826 à 258.000 voix), le Parti Ouvrier Communiste Tunisien -POCT, rebaptisé depuis Parti des Travailleurs Tunisiens- (+300%, de 63.652 à 191.000 voix), et l’Union Patriotique Libre (+300%, de 51.665 à 155.000 voix).
Mais le fait le plus important que fait ressortir la neuvième vague du baromètre politique de 3C Etudes c’est l’irruption fracassante que fait Nidaa Tounes dans le paysage. En effet, le parti en cours de création, à l’initiative de l’ancien Premier ministre Béji Caïd Essebsi, est crédité de 20,8% des voix lors d’un scrutin qui se tiendrait au cours des prochains mois, devenant du coup la deuxième formation politique du pays derrière Ennahdha (30,4%). Un fait majeur qui, en cas de confirmation sur le terrain, pourrait changer radicalement la configuration de la scène politique avec la création d’un acteur capable –théoriquement- d’introduire un certain équilibre avec la Troïka et, plus particulièrement, Ennahdha. Qui n’avait jusqu’ici, en face d’elle, qu’une «poussière» de partis politiques épars.
Mais pour que Nidaa Tounes puisse concrétiser ce nouveau rapport de force, il lui faudra confirmer sa consistance et bien mener sa barque d’ici aux prochaines élections et ne pas fondre, chemin faisant, comme neige au soleil. Ce qui, du reste, s’est déjà vu.
Avant le scrutin du 23 octobre 2011, le PDP avait été présenté par les sondages comme la deuxième force politique derrière Ennahdha (avec 20% des voix). Quelques mois et certaines erreurs stratégiques plus tard, il s’est retrouvé à l’arrivée avec seulement 7,37% des voix et une bien modeste cinquième place.