à Paris (Photo : Dylan Calves) |
[28/09/2012 12:35:53] PARIS (AFP) La France, qui prévoit de lever quelque 170 milliards d’euros sur les marchés en 2013, devrait encore bénéficier de bonnes conditions pour emprunter tant qu’elle maintient l’objectif de réduction des déficits et que ses voisins d’Europe du Sud restent sous pression.
2012 a été idyllique pour la France. Malgré la perte du “triple A” chez l’agence de notation financière Standard and Poor’s en janvier, ses taux d’emprunt sur les échéances à moyen et long terme ont été inférieurs à 2% depuis le début de l’année, “un record”, selon l’Agence France Trésor (AFT), chargée de placer la dette française sur les marchés.
Paris emprunte même depuis début juillet à des taux négatifs sur certaines échéances à court terme.
Cette nette amélioration des conditions de financement du pays devrait lui permettre d’économiser cette année 2,1 milliards d’euros sur la charge de la dette par rapport à ce que prévoyait Bercy il y a un an.
Selon plusieurs économistes interrogés par l’AFP, cette lune de miel devrait se poursuivre dans les prochains mois.
“Tant que des vents défavorables souffleront sur les pays du sud de la zone euro, et notamment l’Espagne, l’intérêt de l’investisseur sera de continuer à jouer la sécurité et de privilégier la dette hexagonale”, estime Bruno Cavalier, chef économiste chez Oddo Securities.
D’autant que celle-ci est encore créditée du fameux “AAA”, la meilleure note possible, par deux des trois grandes agences de notation (Fitch et Moody’s, cette dernière devant toutefois dire dans les prochains jours si elle confirme cette note).
“La France est donc considérée comme telle par les investisseurs professionnels (fonds de pension, investisseurs institutionnels…) qui sont obligés de détenir dans leur portefeuille des actifs de cette qualité”, explique Jean-François Robin chez Natixis.
Le fait que Paris flirte avec la récession ne devrait pas décourager les investisseurs.
“Orientation crédible”
Pour Frédérik Ducrozet, économiste au Crédit Agricole, “la question qui taraude le marché n’est pas la récession. Un scénario récessionniste pénaliserait les actifs risqués comme les actions, mais beaucoup moins les obligations d’Etat”.
“Le point central est de savoir si le gouvernement pourra tenir ses objectifs en matière de réduction des déficits”, estime-t-il.
La France s’est engagée à ramener le déficit public à 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2013, après 4,5% en 2012.
“Cette orientation est pour l’instant crédible et le marché en donne acte au gouvernement”, relève Gilles Moëc, chef économiste à la Deutsche Bank.
“Le risque n’est donc pas d’une envolée des taux à court terme, mais plutôt d’une lente dérive l’année prochaine si l’on s’aperçoit que les 3% ne peuvent pas être tenus car les 0,8% de croissance prévus pour 2013 ne seront pas au rendez-vous”, estime-t-il.
Pour M. Ducrozet, “même si la croissance est moindre qu’anticipée, il y a peu de risques que le gouvernement renonce à ses objectifs budgétaires. Le cas Rajoy va servir d’exemple”, estime-t-il.
En décembre 2011, le tout nouveau chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, avait revu nettement à la hausse ses objectifs de déficit, ce qui avait déstabilisé les investisseurs. Seule la première opération de refinancement à long terme (LTRO) de la Banque centrale européenne avait empêché une nouvelle envolée des taux d’emprunt de la quatrième économie de la zone euro.
Pour conserver des conditions de financement très attractives, Paris devra aussi poser sur la table le dossier des réformes structurelles.
“On a un message gouvernemental qui parle de +choc de compétitivité+ et de libéralisation du marché du travail. Il faut commencer à mettre du concret là-dedans”, souligne M. Moëc.
A ce sujet, “un désaccord au sein de la majorité socialiste ou un divorce prononcé entre le gouvernement et les syndicats” serait un très mauvais signal, estime-t-il.