à Chalon-sur-Saone (Photo : Philippe Desmazes) |
[28/09/2012 18:10:30] MACON (Saône-et-Loire) (AFP) Un GPS dans la tête, deux bras, quatre roues, six caméras et une capacité de taille de 600 pieds de vigne par jour: un robot vigneron fait son entrée sur le marché du travail, mais, rassure son concepteur, c’est pour compenser un déficit de main-d’oeuvre.
Les démonstrations débutent cet automne pour ce robot de 20 kilos et de 50 centimètres de haut développé en Bourgogne.
VIN (pour Viticulture intelligente naturelle) se déplace grâce à une cartographie GPS. Il collecte aussi des données sur la santé des vignes et du sol.
A la tête d’une entreprise d’informatique de Mâcon, Wall-Ye, son inventeur Christophe Millot dit avoir eu l’idée de VIN en visitant le domaine Louis Latour, en Ardèche.
Le gérant “avait besoin d’élaguer parce que les grappes étaient trop grosses et il ne voulait pas utiliser de machine pour le faire, mais il ne trouvait pas d’employés. On était en août et tout le monde était en vacances. Je lui ai dit que j’allais lui faire un robot”, explique-t-il.
Il a mis trois ans pour y parvenir, épaulé par Guy Julien, ingénieur qui y a travaillé “nuits et week-ends”. “La plus grande difficulté a été de faire en sorte que les caméras comprennent ce qu’elles voient et comment l’interpréter”, explique celui-ci.
Le robot vigneron est vendu 25.000 euros. “Ce qui n’est pas excessif dans la mesure où il travaille jour et nuit, dimanche compris, ne prend pas de vacances ni casse-croûte”, argumente Guy Julien.
à Chalon-sur-Saone (Photo : Philippe Desmazes) |
“Si j’ai le choix entre le robot et l’employé, je prendrai le robot”, tranche Patricia Chabrol, propriétaire du Château Gerbaud à Saint-Emilion. “C’est moins cher et cause moins de soucis”, ajoute-t-elle.
Guy Julien balaie les objections selon lesquelles le robot pourrait détruire des emplois: “Bien sûr, nous enlevons du travail aux tailleurs de vignes, mais nous créons de l’emploi pour ceux qui fabriqueront, entretiendront et amélioreront les robots. Et nous maintiendrons la production en France”, assure-t-il.
Des projets similaires sont développés en Nouvelle-Zélande et en Californie. En Nouvelle-Zélande, Richard Green, de l’université de Canterbury, développe un projet de robot tailleur, soutenu par le géant Pernod Ricard.
Le chercheur estime que son robot pourra faire économiser 17,6 millions d’euros par an aux viticulteurs néozélandais en améliorant la productivité.
“Ce n’est pas seulement une question de coût du travail, mais aussi de qualité de la taille. Chaque année, nous devons former des tailleurs débutants”, dit-il à l’AFP.
En Californie, le fondateur de Vision Robotics, Bret Wallach, assure quant à lui que son robot de trois mètres de haut, encore en phase de test, répondra “aux même consignes qu’une équipe manuelle”, alors que les vendangeurs se raréfient en Californie, selon lui.
Mais des vignerons français sont récalcitrants à l’idée de voir des robots faire irruption dans un travail qu’ils estiment intimement lié à la main de l’homme.
“C’est intéressant sur le plan technique, mais inconcevable intellectuellement. Ça ne cadre pas avec la philosophie de l’élaboration d’un grand cru Saint-Emilion”, avance Philippe Bardet, propriétaire du Château du Val d’or. Il ajoute: “Je suis pour l’automatisation de certaines tâches, mais pas la taille”.
“Chaque plant est unique en termes de vigueur par exemple, donc la taille doit être unique”, approuve Denis Fetzmann, du domaine Louis Latour.
Toutefois, il considère que la robotisation est inévitable à terme: “On avait dit qu’on n’utiliserait jamais de tracteurs pour les vendanges, mais maintenant on le fait”.