Tunisie-Transition démocratique : Doit-on craindre un retour de manivelle?

 

ennahdha-troika-041012.jpgLes Américains et les Européens semblent conditionner leurs aides à la Tunisie à des avancées au niveau de la transition démocratique. Le gouvernement de la Troïka ne peut pas ne pas le saisir. Eu égard à des déclarations récentes. A lui de jouer au plus vite. Car, c’est maintenant sur les faits que les Américains et les Européens vont le juger. Place donc aux actes.

Est-ce un changement de ton? Comment interpréter, peut-être, autrement, de récentes déclarations de nos partenaires américain et européens qui ont jusqu’ici toujours réservé de belles paroles à l’endroit de notre pays?

Examinons, d’abord, cette déclaration de Mme Beth Jones, secrétaire d’Etat adjointe chargée du Moyen-Orient, faite lundi 1er octobre 2012, lors d’une visite à Tunis: «Les Etats-Unis qui œuvrent à la défense des Droits de l’Homme universels, ne soutiendront jamais une liberté d’expression fondée sur la violence».

Mme Jones a, également, fait état des discussions qui ont cours au Congrès américain ainsi que dans d’autres institutions américaines sur la possibilité de «geler» ou de «suspendre» les aides destinées aux pays où les ambassades américaines ont connu des attaques.

Mardi 2 octobre, recevant le chef du gouvernement provisoire, Hamadi Jebali, Herman Van Rompuy, le président du Conseil européen (organe exécutif de l’Union européenne) lance cette phrase dans un communiqué relatant le contenu de l’audience: «Les assurances de la volonté des autorités tunisiennes de rendre irréversible la transformation démocratique du pays sont des clés pour pouvoir continuer à approfondir notre coopération».

Des «préalables»

S’ils ont l’une et l’autre souligné leur volonté de pouvoir apporter un soutien financier à la Tunisie, ils n’ont pas manqué, semble-t-il, d’ajouter quelques «préalables». Pour la secrétaire d’Etat adjointe américaine: le respect des Droits de l’Homme et l’arrestation et le jugement des personnes qui ont attaqué, le 14 septembre 2012, les locaux de l’ambassade américaine aux Berges du Lac.

Et pour le président du Conseil européen: le respect du processus démocratique en Tunisie (avancées de la nouvelle Constitution et des réformes législatives, la préparation des futures élections, qui suivront l’approbation du texte constitutionnel).

Inutile de préciser que ce qui a été dit en dehors des rendez-vous médiatiques est beaucoup plus clair et précis. Mme Jones n’a pas manqué d’ailleurs de souligner qu’elle est mandatée en haut lieu (par la secrétaire d’Etat, Mme Hilary Clinton) et qu’elle est venue s’entretenir avec «un gouvernement provisoire» dans un pays «en transition démocratique».

Une manière sans doute de rappeler que le gouvernement Jebali avait des priorités qui sont ceux de poursuivre les efforts accomplis pour assurer la réussite de la transition démocratique et non pas de s’adonner à un exercice normal du pouvoir comme le fait le plus normalement un gouvernement élu pour une législature normale (de 4 ou 5 ans). On peut imaginer ce qui pouvait être dit dans les différentes rencontres de Mme Jones avec ses interlocuteurs tunisiens.

Une accélération du processus démocratique souhaitée

Et c’est là où réside peut-être la clé des attentes des responsables américains et européens concernant de la nature des actions que se doit de mener le gouvernement Jebali.

Les récentes déclarations semblent avoir levé assez de voiles pour que l’on puisse le deviner. Une accélération du processus démocratique est largement souhaitée.

Le gouvernement de la Troïka ne peut pas ne pas l’avoir saisi. A lui de jouer au plus vite. Car, c’est maintenant sur les faits que les Américains et les Européens vont le juger. Place donc aux actes. Pour éviter un retour de la manivelle qui sera lourd en «conséquences» pour le pays. Et si les promesses des premiers jours s’envolaient, elles aussi!

Participant à une réunion des gouverneurs des Banques centrales arabes, à Koweït, Chedly Ayari, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), a déclaré à l’agence Reuters que les pays occidentaux n’ont pas mis à exécution les promesses qu’ils ont faites après l’avènement du Printemps arabe. Ce qui met les économies de ces derniers pays en danger, a-t-il ajouté.