é en février 2012 (Photo : Jean-Francois Monier) |
[04/10/2012 17:10:46] PARIS (AFP) Qui va payer la hausse du prix des matières premières? La filière agroalimentaire en fait une question de survie pour ses PME et renvoie la balle à la grande distribution qui refuse de présenter la facture aux consommateurs dans un climat morose.
C’est dans ce contexte tendu que se sont ouvertes cette semaine pour la cinquième fois les négociations entre distributeurs et fournisseurs, introduites par la Loi de modernisation de l’économie (LME) et qui dureront jusqu’en février.
Les entreprises de l’agroalimentaire réclament une modification de cette loi qui, estiment-elles, donne trop de pouvoir à la grande distribution et ne leur permet pas de faire face à la volatilité des prix.
“La loi a été conçue à une époque où les fluctuations de matières premières étaient de 10%, aujourd’hui elles sont de 100%, les industriels ont besoin d’ajustements en cours d’année”, a fait valoir Xavier Riescher, directeur général du groupe Panzani qui s’exprimait lors d’une conférence organisée par l’hebdomadaire professionnel LSA mercredi.
“On fragilise l’industrie agroalimentaire qui était très puissante”, dit-il, et “la variable d’ajustement c’est l’emploi”.
En début de semaine, le ministre délégué à l’Agroalimentaire a dit vouloir revoir la LME pour “mieux répartir la valeur ajoutée tout au long de la chaîne alimentaire”.
Mais la fédération des distributeurs FCD, qui met en avant la défense du pouvoir d’achat, ne veut pas en entendre parler: “La volatilité c’est un prétexte, ce n’est pas au consommateur de payer la note”, a estimé son délégué général Jacques Creyssel, lors de la même conférence.
“En tant que fabricant de MDD (produit à la marque du distributeur), on connaît la décomposition de la valeur par produit, ça nous permet de voir la compétitivité des industriels les uns par rapport aux autres”, a indiqué un responsable d’Auchan.
“Les cocos de Paimpol financent le cola d’Atlanta”
“Nous ne sommes pas ignorants des tarifs car nous avons nos usines. Mais notre responsabilité, c’est de présenter la facture au client quand il passe à la caisse”, a abondé Thierry Cotillard, directeur de l’offre alimentaire chez Intermarché.
A contre-tendance, le patron de Système U Serge Papin s’est prononcé en faveur d’aménagements de la LME pour soutenir les PME et “recréer de la valeur”, estimant que la guerre des prix que se livrent les distributeurs sur les grandes marques nuisait aux petits acteurs: “Les cocos de Paimpol financent le cola d’Atlanta”, selon lui.
“On a été les seuls à augmenter les prix des volailles en juillet. On peut porter les choses mais on ne peut pas le faire tout seul”, a-t-il dit à la conférence.
Pour Michel-Edouard Leclerc, président des centres du même nom, “le concurrent du porc breton, ce n’est pas Leclerc, c’est le porc allemand ou le porc hollandais”.
M. Leclerc, qui a fait du pouvoir d’achat son cheval de bataille, estime que “le seul moteur de la croissance aujourd’hui, c’est la consommation” et qu’elle a commencé à fléchir. “Si on ne compense pas par des efforts sur les prix, ça va être difficile” pour tous, a-t-il souligné.
“C’est évident que c’est plus difficile d’être petit que grand, d’être industriel que distributeur mais chacun a choisi son métier”, selon lui.
“L’évolution du prix des matières premières va forcément avoir un impact”, prévoient les experts de Nielsen. Mais “l’inflation alimentaire est une préoccupation majeure et les prix et promotions sont un critère-clé” pour les clients.
“Le consommateur se dit soucieux de l’environnement et du social mais n’est pas prêt à en payer le prix”, confirment les analystes de Deloitte estimant que le contexte difficile pourrait faire émerger “un nouveau mode de collaboration entre distributeurs et industriels en faveur des clients”.