Imaginez que vous possédez une petite entreprise en Tunisie ou en Moldavie et que vous êtes sur le point de prendre une décision stratégique: vous allez exporter vos fruits secs ou vos pommes vers l’Union européenne. Les échanges seront-ils profitables? Quelles sont les chances de réussite? L’Export Helpdesk de l’UE est votre premier point de contact pour trouver les réponses à ce genre de questions, explique Holger Standertskjold-Nordenstam, chef de l’unité Information, communication et société civile à la direction générale du commerce de la Commission européenne.
Entretien avec Holger Standertskjold-Nordenstam
Comment décririez-vous l’Export Helpdesk de l’UE?
L’Export Helpdesk est un point d’accès unique à des informations en ligne à propos des exportations vers l’Europe. L’idée était de créer une plateforme pour les entreprises de pays extérieurs à l’UE qui désirent vendre leurs produits sur le marché de l’UE. Le système a été conçu pour refléter, en temps réel, les conditions à l’exportation de tous types de marchandise, des sacs à mains aux t-shirts en passant par le miel et le vin. Il prend en compte toutes les normes, les accords commerciaux, les règles d’origine, etc. Il est important de comprendre que ce n’est pas une simple base de données, mais bien un système qui permet d’effectuer des calculs précis, sur la base du pays d’origine et des biens à exporter.
L’Export Helpdesk a été créé en 2004 et, jusqu’à présent, l’UE est le seul partenaire commercial du monde à proposer un tel service.
Son efficacité repose sur son large champ de diffusion. Les entrepreneurs doivent en effet pouvoir avoir accès à l’information dans une langue qu’ils comprennent. Le Helpdesk est disponible en anglais, en français, en russe et en arabe, ainsi qu’en espagnol et en portugais, puisque la plate-forme a originellement été créée pour les pays en voie de développement tels que définis par l’ONU et que de nombreux utilisateurs sont originaires d’Amérique latine.
En ce qui concerne le voisinage européen, nous entretenons des relations de longue date avec les voisins du Sud, où des accords d’association sont en vigueur depuis longtemps. Nous observons maintenant un intérêt croissant de la part des voisins de l’Est. La traduction de l’Export Helpdesk en arabe et en russe, en 2010, a clairement représenté un pas de l’UE vers ses voisins.
L’Export Helpdesk assiste principalement les petites entreprises et les nouveaux exportateurs. Ceux-ci sont l’épine dorsale de l’économie. Ils génèrent une véritable croissance économique et améliorent les performances d’un pays.
Comment fonctionne l’Export Helpdesk?
Tout d’abord, même les personnes qui ne sont pas expertes dans le commerce devraient pouvoir l’utiliser. Une fois que vous avez décidé de ce que vous souhaitez exporter, vous trouvez le code du produit dans la base de données et lancez la recherche. La plate-forme vous indique alors les règles qui s’appliquent à votre produit et votre pays. L’objectif est de fournir des informations concrètes sur la base de votre cas spécifique. Les calculs sont réalisés à partir de données très précises. Si un entrepreneur exporte du vin de Géorgie, il ne veut pas avoir la mauvaise surprise de découvrir que son précieux tsinandali est coincé à la frontière. Toute erreur peut en effet coûter très cher. L’Export Helpdesk vous indique ce que vous avez à faire et quels documents vous devez remplir pour que tout se passe bien.
Disposez-vous d’un centre d’appels?
Non car, dans notre cas, il est impossible d’avoir des collaborateurs avec ce type d’expertise qui travaillent à plein temps. Nous disposons toutefois d’un service qui collecte les questions et fournit des réponses. Vous pouvez envoyer une demande en utilisant le formulaire en ligne. Normalement, la réponse est envoyée dans les deux à trois jours.
Par quoi doit commencer une petite entreprise égyptienne qui souhaite exporter des noix de cajou sur le marché européen?
Elle doit commencer par utiliser le site web de l’Export Helpdesk pour découvrir les conditions qui s’appliquent dans son cas, par exemple les exigences sanitaires. Elle doit donc vérifier les règles phytosanitaires en vigueur. Tous les produits alimentaires, qu’il s’agisse de vin, de poisson ou de crème glacée, doivent respecter les normes sanitaires européennes et prouver leur conformité. Il y a d’autres règles à connaître, par exemple ce qu’il faut mentionner sur l’étiquette.
L’Export Helpdesk peut aider les utilisateurs à trouver toutes ces informations. Pour plus de facilité, nous formons les exportateurs à utiliser ce système avec les délégations de l’UE ainsi que par le biais d’associations professionnelles et de chambres de commerce. L’objectif est de créer un effet multiplicateur: nous formons les grands industriels, qui diffusent l’information auprès de leurs réseaux.
Est-ce que vous mémorisez le nombre d’utilisateurs et le type d’informations recherchées?
Oui, nous avons des statistiques très détaillées par produit et par pays. En fait, les demandes n’émanent pas forcément du pays d’où vient le produit. Un marchand de vins de Londres ou d’Amsterdam, par exemple, peut se renseigner sur une marque particulière de vin géorgien. Grâce à ces données, nous avons une vision d’ensemble de la distribution des produits par pays et par région.
Les exportations des pays du voisinage de l’UE vers l’Europe sont-elles affectées par l’actuelle crise financière?
Non, l’UE reste le plus grand marché pour ces pays. En fait, plus de 40% de leurs exportations sont destinées à l’Europe. Nous ne fermons pas nos portes à cause de la crise financière. L’Europe reste le premier importateur et exportateur du monde et la demande de biens y est très importante.
En réalité, nous avons même constaté une augmentation prononcée de l’utilisation de l’Export Helpdesk au fil des années. Son utilisation a doublé ces cinq dernières années, avec une hausse de 20% par an, et ce malgré les turbulences dans le voisinage du Sud de l’UE. En comparaison, le voisinage de l’Est est relativement calme.
Quelles sont les principales réussites du Helpdesk?
La première est qu’il fonctionne et qu’il est gratuit. Aucun autre pays ou région du monde n’a jamais proposé ce genre de services aux sociétés qui souhaitent exporter. Normalement, on veille aux intérêts de ses propres entreprises. Dans notre cas, nous avons mis cette action en place parce que nous avons réalisé que les échanges allaient dans les deux sens. C’est pourquoi l’UE désire aider les exportateurs des pays tiers.
L’UE est en train de négocier de nouveaux accords d’association, y compris des zones de libre-échange approfondi et complet, avec des partenaires orientaux. Lorsqu’ils entreront en vigueur, à quelle vitesse la plateforme sera-t-elle mise à jour pour refléter cette nouvelle situation?
Les nouveaux accords ne vont pas être mis en œuvre du jour au lendemain. Du côté de l’UE, nous devons laisser aux services douaniers des États membres le temps d’appliquer les nouvelles règles. La durée dépend de la taille du pays et du volume des échanges. Pour l’entrée en vigueur de l’accord avec l’Ukraine, par exemple, une date spécifique sera choisie. Nous la connaîtrons environ un an à l’avance. Nous utiliserons ce délai pour actualiser le système.
Quel est votre plus grand défi?
La raison pour laquelle il est difficile de mettre en œuvre un système comme le nôtre est qu’il contient énormément d’informations à propos de nombreux pays. Ainsi, nous fournissons des renseignements détaillés sur les conditions, les droits de douane, les régimes préférentiels, les règles d’origine qui s’appliquent aux différents produits exportés depuis 176 pays. Ces données doivent être entrées dans le système, mises à jour et traduites en continu, parce que les conditions changent constamment. Une seule erreur pourrait résulter en des calculs erronés pour une entreprise qui s’apprête à prendre une décision stratégique quant à ses exportations vers l’UE. Par exemple, si un système des préférences généralisées (SPG) entre en vigueur, l’exportateur découvre soudainement qu’il ne doit plus payer de taxes pour entrer sur le marché de l’UE. Cela représente de belles économies.
Un autre défi important, aussi étrange que cela puisse paraître, consiste à faire savoir aux utilisateurs que l’Export Helpdesk existe. Sinon, il serait inutile de le maintenir. Nous devons veiller à ce que les exportateurs et les importateurs de l’UE soient au courant de son existence car, après tout, les échanges se font dans les deux directions.
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