à Amsterdam (Photo : Bas Czerwinski) |
[11/10/2012 14:56:32] PARIS (AFP) Tom Enders, le patron d’EADS, veut rebondir après l’échec de son projet de fusion avec le fabricant d’armes britannique BAE Systems, mais il doit surmonter le désintérêt de l’Allemagne pour son industrie, estiment les analystes.
“Notre grande entreprise va continuer vers de nouveaux horizons et de nouveaux succès, faisons des plans pour l’avenir”, a écrit le patron allemand à ses 133.000 employés après avoir dû abandonner mercredi son ambitieux projet.
Le conseil d’administration du groupe l’a assuré jeudi de son “soutien complet” et a approuvé sa tentative de rééquilibrer vers les activités de défense un groupe qui repose à plus des deux tiers sur les avions commerciaux d’Airbus.
“Ce n’est pas parce qu’un PDG rate une affaire qu’il est affaibli, commente un grand patron de l’industrie spatiale, Michel de Rosen, directeur général de l’opérateur de satelllites Eutelsat. “S’il avait réussi, ç’aurait été un exploit. Ne pas y être arrivé, personne ne va le lui reprocher”.
Quant au groupe d’aéronautique, de défense et de l’espace, “il ne sort pas affaibli de l’opération”, a affirmé un conseil d’EADS: il a une trésorerie de 9,7 milliards d’euros, un bilan solide, dans un secteur qui marche bien et s’est placé en position d’acquéreur.
Ce ne sont ni ses actionnaires ni ses administrateurs qui ont fait échouer l’opération, mais une tierce partie, l’Allemagne, qui n’a jamais motivé son refus, ajoute-t-il.
Tom Enders s’est dit surpris de l’opposition que son projet a rencontré en Allemagne.
Revoir les options
Christian Mölling, analyste du secteur au think-tank Stiftung für Wissenschaft und Politik à Berlin, explique ce refus par le manque d’intérêt en Allemagne pour l’industrie de la défense, qu’à l’inverse Londres et Paris considèrent comme stratégique.
“Nous avons une industrie automobile, pas d’industrie de la défense, le gouvernement ne s’en soucie pas”, dit-il.
ésultats financiers des entreprises du secteur |
Pour un observateur de la politique allemande, “la chancelière Angela Merkel et son équipe ne pensaient pas du tout à ce dossier et quelqu’un a surgi, Peter Hintze, coordinateur du gouvernement pour l’aéronautique, qui seul avait des idées arrêtées et a réussi à les imposer, personne d’autre ne s’étant fait une opinion”.
M. Hintze, un vieil adversaire de Tom Enders, a fait campagne contre la fusion en affirmant que l’Allemagne y perdrait des emplois, et s’est publiquement félicité qu’elle ait échoué.
EADS doit maintenant revoir ses options, a déclaré son directeur de la stratégie, Marwan Lahoud, au quotidien Les Echos.
Christophe Menard, analyste chez Kepler Capital Markets, s’attend à ce que le groupe reprenne sa stratégie d’acquisitions au coup par coup sur le marché américain, que lui aurait ouvert en une fois BAE, gros fournisseur du Pentagone.
Mais il pourrait aussi retenter la fusion après les six mois prévus par la réglementation boursière britannique, écrit-il dans une note.
Tom Enders lui-même souligne dans sa lettre au personnel que ses liens avec la direction de BAE Systems “sont sortis renforcés de cette tentative. C’est une excellente base pour le développement futur de nos relations commerciales dans le secteur de la défense”, fait-il valoir.
Dans le cas d’une nouvelle tentative, M. Moelling n’écarte pas que le résultat soit différent à Berlin après les élections législatives de l’automne 2013.
“Ca ne veut pas dire qu’un nouveau gouvernement serait plus disposé à avoir une stratégie pour l’industrie de la défense, dit-il. Ce qu’un nouveau cabinet pourrait apporter, c’est encore mieux: s’y intéresser encore moins”.