La carte Moneo Resto (Photo : Eric Piermont) |
[23/10/2012 17:50:50] PARIS (AFP) Le groupe Moneo veut mettre dans la poche des salariés français des titres restaurant sous forme de carte à puce, s’attaquant au monopole des Ticket Restaurant et autres Chèque déjeuner “papier”, qui attendent toujours le feu vert de l’Etat pour se lancer.
Moneo Resto, format carte bancaire, sera distribué à partir du 1er janvier 2013 par les employeurs en une seule fois pour une durée de validité de trois ans. Le compte du salarié sera rechargé chaque mois automatiquement.
Bien que les concurrents le contestent, il s’agit d’une “carte répondant aux exigences réglementaires en vigueur” et “émise sous surveillance de la Banque de France”, a assuré mardi Serge Ragozin, le président de Moneo.
Le groupe mettra ainsi les pieds sur un marché de 700 millions de titres en circulation chaque année, ce qui représente 5,5 à 6 milliards d’euros de volume d’émission.
“Notre ambition c’est 10% de part de marché en 2017”, soit un “volume d’affaires autour de 600 millions d’euros”, selon M. Ragozin, lui-même un ancien d’Accor, dont est issu le numéro un mondial des titres restaurants Edenred.
Il promet moins de tracasseries administratives et logistiques aux employeurs et restaurateurs, et des commissions “environ 20% inférieures” à celles pratiquées sur le marché. La carte à puce sera avantageuse pour le salarié en cas de perte ou de vol, le crédit n’étant pas perdu.
En revanche, fini le titre donné aux enfants ou au conjoint pour changer de la cantine. L’interdiction de rendre la monnaie et la limite des deux titres par repas demeurent.
Les quatre acteurs qui contrôlent ce marché, né il y a cinquante ans en France pour permettre aux salariés de s’offrir un repas chaud à midi, moyennant des avantages fiscaux, ont été cueillis à froid.
Une addition dans un restaurant parisien (Photo : Jack Guez) |
Emettre une carte “vient en totale contradiction avec ce que nous disent les pouvoirs publics depuis 18 mois”, a déclaré à l’AFP Catherine Coupet, présidente de l’association des émetteurs (APETDS).
“Nous avons immédiatement interpellé nos ministères”, qui, selon elle, ont toujours assuré qu’un titre dématérialisé ne pouvait être mis en oeuvre sans modifier la loi. Des réunions sont régulièrement organisées à Bercy sur ce thème, l’une devant même se tenir la semaine prochaine, ajoute-t-elle.
Ces émetteurs, dont Edenred (Ticket Restaurant) et la coopérative Chèque Déjeuner, disent n’attendre que le feu vert des pouvoirs publics pour lancer leurs propres cartes, déjà courantes dans d’autres pays.
Contacté par l’AFP, un ancien dirigeant d’Accor Services (aujourd’hui Edenred) a toutefois accusé son ancien employeur d’empêcher sciemment l’arrivée de concurrents.
“Cela correspond aux stratégies qu’on écrivait à l’époque pour empêcher (l’arrivée d’un) nouvel entrant”, a déclaré Emmanuel Rodriguez-Maroto, qui a lancé son propre service sur mobile, Restoflash. Une accusation corroborée par un autre ancien dirigeant, sous couvert d’anonymat.
Les grands noms du secteur estiment que “tant qu’il n’y a que des émetteurs papier il n’y aura pas de concurrence nouvelle”, a ajouté un troisième ancien d’Accor, Philippe Bertinchamps.
“Je ne vois pas pourquoi on ralentirait les choses en France alors qu’on les a mises en oeuvre ailleurs”, a réagi Mme Coupet.
Pour Moneo, qui n’a jamais réussi à imposer son porte-monnaie électronique lancé en 2009 pour les paiements de la vie quotidienne, Moneo Resto est un gros enjeu, qui pourrait représenter dans cinq ans un tiers de son activité.