Qu’ils soient dans l’opposition ou dans la Troïka, leurs faits et gestes ont plus d’une fois attiré l’attention. Il s’agit d’Iskander Bouallègue, Aymen Zouaghi, Maya Jeribi, Ahmed Néjib Chebbi, Issam Chebbi, Iyed Dahmani, Mehdi Ben Gharbia, Ahmed Brahim, Samir Bettaieb… Sans oublier Khemaïes Kessila, Sahbi Atig, et autres Sadok Chourrou et Habib Kheder.
Portraits croisés de quelques députés dont certains ont eu des «échauffourées» avec le président Mustapha Ben Jaafar.
Il ne s’agit pas de faire de la discrimination, serait-elle positive. Encore moins de faire des jaloux. Toujours est-il que, et c’est un fait: certains députés ont brillé au cours des travaux de l’Assemblée nationale constituante (ANC). Evidemment, le propos ne concerne que la face cachée de l’iceberg. Combien de députés qui ont dépensé des kilos d’énergie et des tonnes de patience au sein des différentes commissions n’apparaissent pas dans ce modeste éclairage.
Les médias, qui rendent compte des travaux de la Constituante, ne retiennent, malheureusement, pour l’essentiel, que ceux dont les faits et gestes sont retenus par l’œil des caméras de télévision ou par le stylo ou le clavier ou encore le micro des journalistes. Aussi bien au cours des séances plénières et des plateaux de télévision et radio.
Et la prime revient à ceux qui bougent beaucoup. Ceux qui crient, gesticulent, se lèvent, menacent… Ainsi la vie est faite: c’est à celui qui crée bruyamment l’événement.
Et de ce côté, certains auront brillé en créant pratiquement le spectacle. Comme les deux députés d’Al Aryda Al Chaabya (la Pétition populaire), Iskander Bouallègue et Aymen Zouaghi, qui se font exclure d’une séance de la Constituante, le 16 avril 2012, après avoir mis à bout de nerf le président de cette assemblée, Mustapha Ben Jaafar.
«Une dictature hégémonique»
Iskander Bouallègue, qui avait qualifié le gouvernement Jebali de «gouvernement Ghannouchi» et évoqué, à son endroit, «une dictature hégémonique», s’est indigné que le président de l’ANC ne lui ait pas rendu la parole, interrompue par les députés d’Ennahdha qui ont chanté l’hymne national. Pour couper court à son intervention.
Un autre député d’Al Aryda avait souvent défrayé la chronique. Il s’agit de Brahim Guessas. Un personnage haut en couleur qui fera couler beaucoup d’encre sur les pages des réseaux sociaux. Avec son chèche et son sens de la répartie. Samedi 10 décembre 2011, il exige des excuses, s’estimant avoir été insulté par un député qui a écorché son nom.
Brahim Guessas restera, sans doute, dans les mémoires de tout un chacun en faisant sortir un couteau dans une émission de caméra cachée, le 23 juillet 2012. Notre homme n’ira pas par quatre chemins pour mettre à exécution sa menace d’égorger un «crocodile» (c’est le titre de l’émission) qui l’empêchait de sortir d’un ascenseur qu’il avait emprunté.
Le député d’Al Aryda ne s’était pas empêché plus d’une fois d’avoir des discussions tumultueuses avec le président de l’ANC, Mustapha Ben Jaafar, militant politique de centre gauche, qui a trop souffert sous le règne de Ben Ali, mais qui a déçu certains.
Maya Jeribi s’insurge
On reproche à Ben Jaafar d’être partial en prenant fait et cause pour les députés d’Ennahdha. Comme on lui reproche de vouloir ridiculiser les députés des partis de l’opposition. La fameuse remarque sur «la liseuse de marc de café» qu’il a faite, le 28 juin 2012, à l’endroit d’une intervention critique d’un député d’Al Aryda (Voir notre article : Constituante: Mustapha Ben Jaafar… peut mieux faire!) reste dans les annales.
Ben Jaafar fera même sortir de ses gants Maya Jeribi, secrétaire général du parti Al Joumhouri. Une femme courtoise et polie, mais qui se démène pour défendre ses choix. Le 1er mars 2012, Maya Jeribi s’insurge contre le temps de parole accordé aux représentants du peuple (1 minute). Elle accuse le président de l’ANC d’exercer une «tyrannie».
Pourtant, tout a bien commencé entre Maya Jeribi et Mustapha Ben Jaafar, lorsque, le 22 novembre 2011, la première se présente contre le second pour briguer le poste de président de l’ANC. Victorieux, Ben Jaafar salue Jeribi et l’invite à prendre la parole à la tribune. Un moment inoubliable de grande fierté de la jeune démocratie tunisienne.
Dans le camp d’Al Joumhouri, d’autres députés se feront remarquer en défendant bec et ongle, orbi et urbi, leurs idées. Interpellant le gouvernement sur des pans entiers de sa politique et de ses choix. Il y a évidement Ahmed Néjib Chebbi. Mais aussi Issam Chebbi, Iyed Dahmani et Mehdi Ben Gharbia.
Tenir la dragée haute
Toujours dans les rangs de ce qui tient lieu de l’opposition, on retiendra les noms de Ahmed Brahim et de Samir Bettaieb du mouvement Al Massar, anciennement «Ettajdid» et Pôle Démocratique Moderniste (PDM). Ce dernier tient la dragée haute aux membres du gouvernement sur nombre de questions avec force d’arguments.
Au chapitre toujours des députés qui ont défrayé la chronique, il y a également les députés qui ont observé, en septembre-octobre 2012, une grève de la faim pour attirer l’attention sur la situation dans le gouvernorat de Sidi Bouzid. Parmi lesquels figurent Mohamed Brahmi du mouvement du Peuple Achâab, Ahmed Khaskhoussi du Mouvement des Démocrates Socialistes (MDS) et Mohamed Taher Ilahi du Bloc Dignité et Liberté.
Fadhel Moussa, député du PDM et président de la Commission de la justice judiciaire, administrative, financière et constitutionnelle de l’ANC, est, quant à lui, un homme qui s’est distingué dans les rangs de l’opposition par son savoir. Doyen de la Faculté de sciences juridiques et sociales de Tunis, il n’a pratiquement jamais eu un mot plus haut que l’autre. Le verbe précis et clair, il a beaucoup participé à faire la pédagogie de la Constitution.
Face à eux, les députés de la Troïka ont eu des attitudes différentes. Il y eut ceux qui ont quitté le bateau ou qui n’ont pas toujours accepté de jouer les gentils matelots. Comme Khemaïs Kessila d’Ettakatol, qui a rejoint Nidâa Tounes, et Sami Abou du Congrès Pour la République (CPR), qui n’a pas accepté de marcher sur les pas de son parti, le 24 juillet 2012, lorsqu’il s’agissait de choisir un nouveau gouverneur à la Banque centrale de Tunisie en remplacement de Mustapha Kamel Nabli.
Dans les rangs des députés de la Troïka qui ont marché en rangs serrés, deux députés ont attiré, sans doute, l’attention: Sahbi Atig, le président du groupe d’Ennahdha à l’ANC, et Habib Kheder, rapporteur général de la Constitution, fort en thème du côté du droit, et qui ne place un mot que pour donner raison à son mouvement. Tout va bien madame la marquise!
Et il y a ceux qui sont allés très loin. Jusqu’à exacerber les passions et gêner le parti dont ils sont issus. Comme Sadok Chourrou du parti Ennahdha qui a signifié, dans une séance de l’ANC, le 23 janvier 2012, que les sit-inneurs, les grévistes et ceux qui bloquent les routes pourraient mériter un châtiment ultime: se faire couper la main.
A classer dans la même catégorie, Habib Ellouze, qui a crié toute sa colère, dans un meeting, tenu à la Kasbah, le 7 septembre 2012, contre les médias tunisiens les accusant d’être à la fois des contre-révolutionnaires, des RCDistes et des partiaux et qui omettent volontairement de parler des réalisations du gouvernement: création de postes d’emploi, réalisation d’un taux de croissance qui est passé de -1,8% à 3,2%, soit une croissance de 5%. Notamment.
Cela s’appelle aller plus vite que la musique!