Branle bas de combat dans trois quartiers de l’Ariana (El Menzah 6, El Nasr et El Manar) dimanche 11 novembre 2012. Près d’un millier de personnes ont organisé un sit-in pour protester contre le projet de l’établissement d’une pépinière sur un terrain comportant un circuit de santé. «On ne se laissera pas faire», vocifère un habitant.
L’histoire pourrait être narrée ainsi: Il était une fois un parc comportant un circuit de santé qu’une délégation spéciale dans cette Tunisie postrévolutionnaire veut amputer d’une surface somme toute importante en vue d’établir un projet. L’histoire ne peut qu’intéresser les habitants lorsqu’on sait que ce parc est la seule et unique zone verte de cette région peuplée de grands immeubles, de tours et de villas. Colère donc des habitants des quartiers concernés qui ont décidé d’organiser dimanche 11 novembre un sit-in.
Tout commence lorsque les habitants d’El Menzah 6, El Nasr et d’El Manar, dans le gouvernorat de l’Ariana, puisque c’est de ces quartiers qu’il s’agit, découvrent début octobre des ouvriers maçons dans le parc d’El Menzah 6 au niveau du croisement de la rue du Lycée et de la rue d’Aboulbaba Al Ansari.
Des informations commencent à circuler sur Facebook et Twitter
Bouches cousues, ils s’affairent calmement à bâtir une clôture en briques rouges pour séparer une partie du parc de l’autre. Les quartiers cités plus haut où habitent beaucoup de commis de l’Etat finissent par découvrir le pot au rose: la délégation spéciale de l’Ariana a décidé en quasi catimini de bâtir une pépinière.
L’information circule de bouche à oreille. Nombreux sont les habitants des trois quartiers qui se mobilisent contre le projet. Des informations commencent à circuler sur Facebook et Twitter où les habitants s’interrogent sur le pourquoi du projet. Ils mettent en exergue le fait que le parc est la seule zone verte de la région.
Bref, des appels sont placardés dans les immeubles, dans les cafés, commerces et sur les murs des trois quartiers en vue d’organiser un sit-in le dimanche 11 novembre 2012. Ces appels sont placardés à côté de photocopie de messages publiés dans les pages des réseaux sociaux. L’un d’entre eux en format A3 est limpide. On y lit : «Nous sommes tous concernés».
C’est donc tout naturellement que des habitants des trois quartiers commencent à se rassembler dimanche vers 10 heures du matin pour protester contre le projet de la pépinière. La foule grandit peu à peu jusqu’à atteindre près de mille personnes vers midi.
«Nos enfants ont droit à de l’air pur»
On y aperçoit des couples en jogging, en jeans et basket, mais aussi des enfants qui portent des drapeaux tunisiens et des pancartes et des banderoles sur lesquelles on peut lire: «Nous refusons le projet de la délégation spéciale de l’Ariana», «Nos enfants ont droit à de l’air pur», «La pratique du sport est un droit», «Stop à la détérioration de l’environnement»…
Moez est de la partie. Cadre supérieur dans une société financière, il nous dit toute sa révolte: «La délégation spéciale de l’Ariana veut nous étouffer. Et puis de quel droit un conseil municipal non élu ose prendre une décision aussi grave!»
Son voisin de palier dans un immeuble situé à côté de la Cité Jamil à El Menzah 6, Imed, affirme que les habitants des quartiers concernés iront jusqu’au bout. Il précise: «Nous n’avons pas vu telle pratique sous la dictature. Que la délégation spéciale de l’Ariana s’occupe de la voirie, de lever les ordures qui s’entassent sous nos fenêtres pendant des jours».
Des show-rooms dans une autre partie du parc
«Qu’ils s’occupent de rendre en bon état de marche certaines infrastructures comme le petit espace vert situé face à la Cité Jamil. Celui-ci est désolant: un gazon non entretenu, des nids féconds de moustiques, un jet d’eau à l’abandon… Au lieu de s’occuper de l’amélioration de notre quotidien, ces messieurs veulent se faire de l’argent», ajoute-t-il.
Les débats s’enflamment et des cris de colère fusent de partout lorsque des sit-inneurs entendent l’évocation d’autres projets comme la construction de garages de réparation de voitures dans une autre partie du parc ou encore des show-rooms. Vrais ou faux, ces échos remplissent de colère les présents. «On ne se laissera pas faire», vocifère Salah un habitant du quartier d’El Nasr venu à la hâte se joindre à la foule après avoir fait des courses dans une superette de sa rue.
Et c’est alors que est mayonnaise est montée, l’enceinte bâtie avec des briques rouges pour protéger la pépinière s’écroule encore une fois. C’est la troisième fois que cette destruction a lieu. Un message qui veut dire que décidément la construction du mur ne protégera pas la délégation spécifique de l’Ariana de la colère des habitants. Et le projet en lui-même ne semble pas avoir de beaux jours devant lui.