Platine : le marché mondial confronté à la chute de la production sud-africaine

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ée par Lonmin à Marikana, en Afrique du sud, le 30 octobre 2012 (Photo : Jean Liou)

[13/11/2012 10:54:16] LONDRES (AFP) La production mondiale de platine devrait chuter cette année de 10%, frappée par le plongeon de l’offre minière sud-africaine en raison de conflits sociaux, a estimé mardi le cabinet Johnson Matthey, ce qui pourrait pousser les cours à la hausse, en dépit d’un ralentissement de la demande.

Depuis mi-août et la fusillade de Marikana, site sud-africain du groupe Lonmin où la police a abattu une trentaine de mineurs grévistes, l’Afrique du sud, premier exportateur de platine (sa production représente plus de 70% de l’offre mondiale), a vu se multiplier les grèves sauvages dans son secteur minier.

“Les conflits sociaux, mais aussi des fermetures de mines pour des raisons de sécurité, ont entraîné (dans le pays) des pertes totales de production estimées à au moins 300.000 onces de platine sur les trois premiers trimestre de 2012”, a indiqué mardi le cabinet Johnson Matthey, leader mondial des platinoïdes.

“La production sud-africaine est attendue sur l’ensemble de l’année en baisse de 12% sur un an, à 4,25 millions d’onces”, faisant plonger du même coup l’offre mondiale de 10% par rapport à 2011, à 5,84 millions d’onces, et entraînant à l’échelle de la planète un déficit de 400.000 onces, ont ajouté dans un rapport les experts de Johnson Matthey.

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és par le géant américain du platine Amplats manifestent à Rustenburg, le 6 octobre 2012 (Photo : Alexander Joe)

Le numéro un mondial du platine Amplats, affecté depuis huit semaines par des grèves qui paralysent notamment ses opérations dans le bassin minier de Rustenburg (le plus grand gisement de platinoïdes du monde), a indiqué vendredi avoir déjà perdu quelque 167.680 onces en raison du mouvement social.

“Les pertes de production (du secteur) au quatrième trimestre pourraient s’avérer encore plus importantes que ce que nous prévoyons”, a commenté Jonathan Butler, directeur de publication chez Johnson Matthey.

“Il serait très improbable de voir la situation s’améliorer en 2013. Ces grèves ne font qu’accentuer les pressions sur le secteur minier, déjà confronté aux hausses des coûts de l’énergie et des salaires” qui contraignent les groupes à réduire leur voilure et fermer des mines, a expliqué M. Butler à l’AFP.

De quoi doper le cours du platine: celui-ci s’est déjà envolé de plus de 20% entre mi-août et début octobre, dépassant les 1.730 dollars l’once — un sommet depuis fin février. Mais il a néanmoins sensiblement limité ses gains depuis, et évoluait ces derniers jours autour de 1.550 dollars.

En effet, “les stocks mondiaux restent confortables, et, surtout, la demande mondiale a ralenti”, affectée notamment par la chute des ventes de voitures en Europe (-10,8% sur un an en septembre) alors que l’industrie automobile est le principal débouché des platinoïdes, expliquent les analystes de Barclays Capital.

Selon Johnson Matthey, la demande devrait atteindre cette année 8,07 millions d’onces, un niveau équivalent à 2011.

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âtau de mariage décoré avec du platine présenté le 22 mai 2012 à Tokyo (Photo : Yoshikazu Tsuno)

Miné par un environnement économique morose, “le secteur automobile reste dans les limbes, la demande industrielle est mitigée, et la poussée de fièvre des prix du platine au deuxième semestre va freiner les achats de platine dans la joaillerie en Chine”, abonde Anne-Laure Tremblay, analyste de BNP Paribas.

La Chine représente quelque 70% de la demande mondiale de platine dans le secteur de la joaillerie.

Pour autant, le niveau actuel des cours pourrait représenter “un plancher” à partir duquel ils devraient remonter, a tempéré Robin Bhar, analyste de Société Générale, pointant la situation de blocage sur le bassin de Rustenburg.

“Si les difficultés en Afrique du sud persistent en 2013, le marché pourrait rapidement se retrouver également en déficit l’an prochain”, a reconnu Anne-Laure Tremblay. Les experts de BNP Paribas misent sur un cours de 1.785 dollars au premier trimestre 2013.

En revanche, chez Johnson Matthey, on n’anticipe pas une folle envolée des prix, mais plutôt un climat de forte volatilité, dans un marché tiraillé entre les aléas de la demande et les pressions sur l’offre, avec un cours moyen attendu de 1.625 dollars au cours des six prochains mois.