Changer de politique économique et de modèle de développement est plus facile à clamer qu’à faire. Notamment en raison de la complexité de l’opération et des pré-requis de sa réussite. Parmi ceux-ci figure la politique d’aménagement du territoire, c’est-à-dire, rappelle une note du ministère de l’Equipement, cet ensemble de choix, orientations et dispositions «arrêtés sur le plan national ou régional pour organiser l’utilisation du territoire» pour assurer le développement économique et social et «garantir l’homogénéité dans la mise en œuvre des grands projets d’infrastructure, des équipements publics et des regroupements de populations, conformément à une vision à long terme prenant en considération les spécificités nationales et régionales et la bonne répartition des habitants et des activités économiques sur le territoire national».
«En cinquante-six ans d’indépendance, la Tunisie a acquis «une grande expérience dans ce domaine», rappelle Ahmed El Kamel, directeur général de l’Aménagement du territoire au ministère de l’Equipement. Malgré cela, la politique suivie dans ce domaine a généré, ainsi que cela a été démontré lors du séminaire «aménagement du territoire: réalisations et orientations d’avenir» -organisé mardi 13 novembre par le ministère de l’Equipement- de nombreux problèmes économiques, sociaux, administratifs.
Le plus grave de ces problèmes est, note Mohamed Salmane, ministre de l’Equipement, le déséquilibre entre les régions en matière de répartition de la population (67% des habitants vivent sur la côte) et d’installation des activités économiques et des équipements collectifs. Un déséquilibre qui est à l’origine de l’incapacité du modèle de développement «à satisfaire les demandes de certaines catégories sociales et régions» ayant entraîné «la vive tension qui frise l’explosion», observe Ridha Saïdi, ministre auprès du chef du gouvernement chargé des Dossiers économiques et sociaux.
Mais la politique d’aménagement du territoire suivie a également engendré la multiplicité des intervenants dans ce domaine, la prédominance de l’aspect sectoriel sur la dimension horizontale en matière d’aménagement, une organisation administrative –en gouvernorats- qui ne permet pas une planification régionale adaptée, la faiblesse des moyens humains et matériels des collectivités locales, une expansion urbaine chaotique au détriment des terres agricoles, etc.
Pour pallier à ces faiblesses, une réflexion a été entamée en 2010, avec le soutien de l’Agence Française de Développement (AFD), dont les fruits commencent à être récoltés sous la forme d’une multitude d’études. Trois d’entre elles ont été présentées lors du séminaire du mardi 13 novembre, qui concernent, respectivement, l’aménagement et le développement des régions frontalières (Rachid Taleb, URAM), l’aménagement du territoire et le tissu industriel (Jaafar Laouani, SERAH), et l’aménagement du territoire et la planification urbaine (Mohamed Ghami, Horizon Consulting). Des études qui alimentent la réflexion sur les orientations qui pourraient être mises en œuvre à l’avenir –renforcement de la décentralisation à travers l’élection des autorités régionales, révision du découpage territorial et création de régions économiques homogènes naturellement, humainement et économiquement, élaboration de visions régionales d’aménagement et de développement, création d’un Conseil national de l’aménagement, etc.- pour donner à la Tunisie les outils de l’aménagement susceptibles de favorise la mise en œuvre d’un nouveau modèle de développement.