La soie lyonnaise, exemple d’industrie tirant son épingle du jeu grâce au luxe

photo_1353483421144-1-1.jpg
ée de la société Tassinari et Chatel, à Lyon, travaille sur un métier à tisser (Photo : Jeff Pachoud)

[21/11/2012 07:43:19] LYON (AFP) L’époque semble lointaine où la soierie lyonnaise détenait le leadership en Europe et pourtant, malgré son long déclin au XXe siècle, le prestigieux brocart tire aujourd’hui son épingle du jeu grâce au marché du luxe et au savoir-faire “made in France”.

“La soierie à Lyon et en Rhône-Alpes se porte bien, 170 tonnes de fils de soie sont traités chaque année, c’est une filière complète avec de nombreux métiers qui vont du moulinage à l’ennoblissement de la soie”, explique à l’AFP Isabelle Weiler, chargée de projet à Unitex, l’organisation professionnelle du textile.

La région Rhône-Alpes compte une quarantaine d’entreprises actrices de la soie, soit un peu plus de 16.000 emplois. Elles servent principalement les métiers du luxe pour l’habillement ou l’ameublement.

“Ce sont des niches de luxe tournées vers l’export à 80%”, ajoute Mme Weiler.

La soierie à Lyon est plus qu’une tradition, elle a modelé la ville, jusqu’à ses appartements, les fameux canuts de plus de 4 mètres de hauteur qui abritaient les monumentaux métiers à bras dans le quartier de la Croix-Rousse.

Les canuts désignaient aussi les ouvriers tisserands qui ont quasiment tous disparus. Il en reste toutefois quelques uns dont la dextérité est digne des plus grands artisans d’art.

photo_1353483569796-1-1.jpg
é de la société Tassinari et Chatel, à Lyon, travaille sur un métier à tisser (Photo : Jeff Pachoud)

C’est ce savoir-faire unique que la société Tassinari et Chatel, fondée en 1680 (groupe Lelièvre), a su préserver en réinvestissant la Croix-Rousse dans un atelier rythmé au son de 8 métiers à bras.

Tradition et modernité

C’est là que Virginie, une Canut de 30 ans à peine, actionne des pédales, passe des fils dans des mailles, fait glisser une navette: un travail de fourmi à raison de 10cm tissés chaque jour.

“Je prépare une commande de ployants (ancêtres du tabouret pliant) pour le Château de Versailles”, explique la jeune femme, “fière” d’exercer un métier peu courant.

photo_1353483669075-1-1.jpg
é sur un des métiers à tisser de la société Tassinari et Chatel, à Lyon (Photo : Jeff Pachoud)

Tassinari et Chatel fabrique des étoffes qui ont embelli de nombreux musées, châteaux, et compte parmi ses plus prestigieux clients l’Elysée, la Maison Blanche… Son chiffre d’affaires en 2011 s’élève à 4 millions d’euros mais elle produit plus de 95% de ses tissus dans une usine à Panissières, dans la Loire.

“La quasi totalité des tissus sont faits avec des machines automatiques, nous utilisons le tissage à bras pour des productions exceptionnelles, par exemple lorsqu’on utilise des fils laminés or ou argent, qu’on ne peut passer qu’à la main”, explique à l’AFP Patrick Lelièvre, PDG de Lelièvre.

Bien que la soie provienne de Chine ou du Brésil, “on porte sur nous le +made in France+” souligne aussi Bertrand Demailly, directeur Technique de l’entreprise. La soie ne connaît pas non plus la crise dans l’habillement, comme Chez “Marc Rozier”, une entreprise familiale créée en 1890.

“Nous en sommes à la 4e génération, l’activité est essentiellement tournée vers le foulard à 80%, 20% est consacré au tissu pour la confection haut de gamme”, souligne Didier Provent, PDG de Marc Rozier, désignant une pile de magnifiques carrés de soie chatoyants dans un atelier lyonnais.

“Il y a encore une fibre pour la soie à Lyon, nous sommes sur un marché qualitatif et non quantitatif qui nous permet de résister à la concurrence asiatique”, se félicite-t-il.

Selon cet amoureux du textile, “c’est un plus de vendre du made in France aujourd’hui, cela peut jouer jusqu’à 15% dans le chiffre d’affaires”.

Son entreprise a réussi le pari de conserver la fabrication en France: “Après l’achat du fil en Chine ou Brésil, tout le reste que ce soient le tissage, l’impression, la teinture, l’apprêt, la confection, est réalisé dans nos propres usines”, localement.

Ces industriels et bien d’autres créateurs se retrouveront du jeudi 22 au dimanche 25 novembre au 8e Marché des soies à Lyon, grand marché professionnel du secteur.