«La Tunisie a besoin d’aide, d’accompagnement et de confiance, bien évidemment, les yeux ouverts. Mais nous estimons qu’elle a en elle-même les ressources nécessaires pour faire face à la pauvreté, à l’extrémisme et au désir de domination des hommes sur les femmes… Les Droits de l’Homme ne relèvent pas de l’abstrait, ils sont tangibles, la situation en milieu hospitalier, le sort des handicapés et ces jeunes dont nous devons faire des citoyens. L’une des leçons que je tire des «printemps arabes» est que les Droits de l’Homme sont des aspirations universelles, l’universalité n’est pas un concept occidental, il appartient à tout le monde.
C’est ainsi que s’est exprimé, lors de sa récente visite en Tunisie, François Zimeray, ambassadeur français chargé des Droits de l’Homme.
M. Zimeray a voulu, par cette visite, «toucher du doigt les réalités, comprendre où on est la Tunisie au regard des Droits de l’Homme». Il a eu l’occasion de rencontrer différents acteurs concernés par les Droits de l’Homme dans la société civile, des personnes proprement confrontées à des difficultés comme le doyen de la Faculté des Lettres de La Manouba, des blogueurs, ainsi que les représentants des institutions comme le ministre des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle, Samir Dilou, ou la ministre de la Femme.
Loin des jugements ou de la position de donneur de leçons, l’ambassadeur français a adopté une approche du partage d’expérience et de partenariat constructif.
«Notre action est d’être à l’écoute, d’identifier les besoins, d’aller au plus près du terrain, d’essayer de mettre à votre disposition le maximum de compétences et de moyens, de vous laisser agir par vous-mêmes et prendre en main votre destin. Nous ne voulons en aucun cas nous substituer à vous». La France veut accompagner l’effervescence et le foisonnement qui font la vitalité de la société civile tunisienne qui «porte tous les espoirs non seulement des Tunisiens mais aussi des Français qui observent attentivement la Tunisie», a indiqué M.Zimeray.
Il considère qu’«il y a une dimension universelle dans ce qui se passe en Tunisie et de l’avenir de la révolution tunisienne qui n’est pas encore terminée. Du mouvement de l’aventure démocratique tunisienne dépendra non seulement le sort de la Tunisie mais celui de tous les peuples qui prennent exemple sur vous et qui regardent ce qui se passe chez vous. Le rôle de la société civile est capital en la matière car lorsqu’on n’est pas en contact avec elle, on est dans la rupture avec le pays tout court».
L’ambassadeur français des Droits de l’Homme a discuté «très librement» avec les ministres des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle et de la Femme. Il a relevé de véritables progrès et principalement en matière de liberté d’expression, mais aussi exprimé des inquiétudes nourries par «des incidents réels». Le ministre Dilou, dit-il, tient un discours qui incite à un certain optimisme. Le travail sur la Constitution est, d’après lui, une occasion extraordinaire de prouver par des actes l’attachement de la Tunisie aux droits fondamentaux et sa volonté d’habiter le siècle parce que les Droits de l’Homme est une grammaire commune au monde d’aujourd’hui. «Les pays sont des porte-valeurs, on choisit d’y investir ou de ne pas y investir, d’acheter des produits ou de ne pas en acheter. On ne peut pas à la fois bénéficier des fruits de la croissance économique et vouloir s’inscrire dans la modernité des échanges tout en refusant cette grammaire commune au monde entier qui est les standards internationaux en matière de Droits de l’Homme dont la dimension ne peut être qu’universelle».