Ne nous arrêtons pas aux déclarations tonitruantes du gouverneur de Siliana parlant des «pierres importées»! Le ridicule ne tue pas! Les affrontements de Siliana et l’usage démesuré de la force par la police et surtout l’usage immodéré des chevrotines par des flics nouvellement recrutés et très mal encadrés ont déjà fait des dégâts énormes pour le gouvernement de la Troïka et surtout pour les habitants de Siliana mais également pour le pays en entier!
Les Nahdhaouis officiels et députés crient au scandale et accusent l’opposition de «politiser» l’affaire et de l’exploiter avec des syndicalistes «véreux»! Rien que ça! Ali Laaryedh, ministre de l’Intérieur, est allé jusqu’à accuser le parti des Patriotes Démocratiques Unifié (Watad) de Chokri Belaïd d’être derrière tout ça! Il leur fait un grand honneur entre nous soit dit !
Beaucoup de citoyens reprennent ses accusations à vrai dire, et se demandent pourquoi l’opposition est toujours à l’affût de toute faute du gouvernement pour la «politiser». Ces accusations ne sont pas nouvelles. Ben Ali les utilisait comme il utilisait la rengaine d’absence de programme de l’opposition, de la sempiternelle «nous agissons, eux ils fustigent», ou encore le célèbre dicton tunisien «le spectateur est toujours meilleur cavalier!». C’est cela oui!
Mais que voulez-vous que l’opposition fasse? À part s’opposer au gouvernement, que peut faire un opposant? Il s’oppose au gouvernement. Par tout les moyens en sa possession. Il critique le gouvernement et il lui cherche la petite bête comme on dit. À charge au gouvernement de veiller à ce que l’opposant ne puisse pas critiquer son action. L’action doit être parfaite!
Donc, Messieurs, que l’opposition vienne à Siliana prêter main forte aux manifestants et exprimer son soutien, c’est dans l’ordre des choses! Que l’UGTT de Siliana soit à la tête du mouvement de contestation, c’est également dans l’ordre des choses.
D’ailleurs, c’est une tradition. Souvenons-nous de ce qu’ont fait les unions régionales de l’UGTT à Sfax et à Sidi Bouzid pendant les jours de braise de janvier 2011. Si l’UGTT de ces régions ne s’était pas mobilisée avec les manifestants, Ben Ali aurait encore son fauteuil à Carthage et certains autres leur exil doré à Londres et à Paris.
Cessons ces accusations ridicules! L’UGTT était, est, et restera la «maison de la nation» comme Hached l’a voulu et comme Tlili l’a voulu depuis 1946!
En revanche, on peut se demander si le gouvernement de la Troïka a su bien gérer le dossier de Siliana. Une alerte a été donnée par l’UGTT avant 10 jours! Rien ne bouge! L’UGTT a clairement dit au gouvernement que le wali est en perte de vitesse et que les attentes des gens s’exacerbent! Rien ne bouge! Il y a eu une première journée de grève générale dans le gouvernorat. Rien ne bouge! Et enfin ça s’enflamme! On envoie la troupe! Cette manière a déjà été testée à Gabès il y a un mois, et enfin de compte on joue quand même le remake! Pourquoi? Pour sauver la face d’un wali? Pour ne pas paraître céder devant la rue? L’ennui est que le gouvernement s’est risqué de cette manière à subir des dégâts plus graves encore que la simple révocation d’un fonctionnaire même si c’est le wali de Siliana!
Sur le fond, on peut même trouver des excuses au gouvernement pour la lenteur du développement dans une région où tout est à refaire, où l’infrastructure n’existe presque pas et où l’administration est un désert.
Effectivement Siliana a besoin de plus d’argent et de plus de temps qu’une simple année. Tout le monde peut se mettre d’accord sur ce constat. Mais il aurait fallu le faire humblement et savoir mettre tous les acteurs autour d’une table, même s’il faut qu’elle ne soit pas présidée par le wali. Il fallait savoir introduire une dose d’espoir et chercher des sorties honorables pour tous. Ceci n’a pas été fait! Dommage!
Espérons seulement que nous n’aurons pas d’autres Siliana bientôt à travers le pays!