çais, le 13 novembre 2012 à Paris (Photo : Lionel Bonaventure) |
[06/12/2012 15:50:23] PARIS (AFP) Le mécontentement contre Amazon, déjà dans le collimateur du fisc français, s’intensifie en France, plusieurs distributeurs hexagonaux dénonçant les subventions publiques et le manque d’harmonie fiscale au niveau européen dont bénéficie le géant américain.
Jeudi, le patron de Système U, Serge Papin, s’en est pris au commerçant en ligne dans un entretien aux Echos, fustigeant notamment l'”injustice” que représente, selon lui, l’octroi de subventions publiques qui lui sont accordées, alors même qu’il ne paie quasiment pas d’impôts en France.
“Nous estimons juste que des gens comme Amazon n’ont pas à être favorisés”, déclare-t-il.
Amazon dispose de trois entrepôts en France, dont le dernier inauguré en septembre à Sevrey (Saône-et-Loire), a bénéficié de subventions publiques, dont le montant s’élèverait à plus de trois millions d’euros sur cinq ans.
Selon le conseil régional de Bourgogne, Amazon recevra ainsi 3.400 euros par emploi par la région, 1.100 euros par emploi par le département, auxquels s’ajouteront 1.000 à 2.000 euros par emploi de la part de l’Etat au titre de la prime d’aménagement du territoire.
Amazon prévoit également d’ouvrir une quatrième plateforme logistique dans le Nord d’ici 2015, pour lequel il pourrait là aussi bénéficier d’aides publiques.
“C’est encore en débat. Pour des raisons de chômage, certains pourraient ne pas être trop regardants (…) mais on ne va tout de même pas donner de l’argent à quelqu’un qui réalise des centaines de millions de chiffres d’affaires et qui, en plus, doit de l’argent au fisc français”, fustige Dominique Plancke, élu EELV du Nord/Pas-de-Calais.
Le deuxième grief mis en avant par les distributeurs français est en effet celui de la fiscalité.
Urgence d’une harmonisation fiscale
Comme d’autres multinationales, Amazon optimise ses impôts grâce à un pilotage de ses activités commerciales françaises depuis son siège au Luxembourg, pays à la fiscalité plus légère.
Cela lui permet notamment de ne déclarer un chiffre d’affaires que de 110 millions d’euros en France, alors que selon une estimation d’Euromonitor, ses ventes 2011 dans l’Hexagone représenteraient 1,3 milliard d’euros.
L’impôt sur les bénéfices, dont il doit s’acquitter, serait ainsi minoré, estime le fisc français, qui réclame au géant américain 250 millions de dollars d’arriérés au titre des exercices 2006 à 2010.
Amazon, qui conteste ces affirmations, a déjà indiqué qu’il comptait “faire appel à tous les recours administratifs à sa disposition” pour s’opposer à cette réclamation.
Selon Serge Papin, même si Amazon n’est “pas dans l’illégalité, il joue avec les règles d’une Europe qui marche sur la tête”.
C’est aussi ce point qui a été mis en avant récemment par d’autres distributeurs français.
Alexandre Bompard, PDG de la Fnac, a ainsi condamné sur son compte Twitter les “pratiques hégémoniques” et le “dumping fiscal et réglementaire pratiqués par ce type d’entreprises US”.
De la même manière, le patron de Vente-privée.com, Jacques-Antoine Granjon, a déclaré le 27 novembre face à la ministre déléguée à l’économie numérique Fleur Pellerin, qu’il n’y avait “aucune raison pour qu’Amazon paie zéro impôts en France parce que son siège est au Luxembourg”.
Cette dernière avait réagi en soulignant la différence de taux de TVA au niveau européen, dont bénéficie également le géant américain, qui crée une “concurrence déloyale”.
En effet, le taux de TVA en Europe s’applique pour le moment en fonction du pays de résidence de l’entreprise. Or, comme Amazon est domicilié au Luxembourg, il bénéficie d’une TVA à 15%, contre un taux à 19,6% pour ses concurrents français.
La ministre a réaffirmé la volonté du gouvernement français d’accélérer le calendrier prévu pour l’harmonisation fiscale au niveau européen. “On ne doit pas attendre 2019 pour que cette concurrence déloyale cesse de s’exercer”, a-t-elle estimé.