Le thème «l’entreprise et l’investissement» choisi pour les Journées de l’entreprise de cette année 2012 est en intelligence avec l’actualité du pays. Quels leviers pour la relance de cette manne bienfaisante? Pour donner toutes ses chances à cette résolution de renaissance économique, l’écosystème national peut-il, dans ce sillage, accomplir son aggiornamento?
Quand bien même l’instant est à la contestation dans le pays et malgré un climat social tendu, les Journées de l’entreprise, ce rendez-vous annuel de l’IACE, qui en est à sa 27ème édition, parvient à créer l’événement et à se donner une certaine audience. Outre l’importance de ce séminaire, qui s’est incrusté jusque dans la scène maghrébine et méditerranéenne, le thème se trouve en intelligence totale avec la priorité de l’heure. Cela rend la tâche encore plus difficile pour le nouveau conseil d’administration de l’IACE, qui en est à son baptême du feu et qui tente cette fois un nouveau format pour les journées.
Ahmed Bouzguenda, président, et son équipe tentent le changement et font dans l’interactivité avec leurs adhérents. Les enquêtes et les sondages occuperont une place centrale dans les travaux des Journées et constitueront la matière principale pour alimenter les débats.
Le tempo de cette équipe, fortement rajeunie, qui s’accorde à un style vibrillonnant dans le style David CAMERON (Premier ministre britannique), est tout à fait dans l’air du temps. Ils veulent que l’Institut se positionner dans le cogito national qui s’emploie à faire revenir le dynamisme à l’économie du pays.
La refondation du code des investissements constituera, nous a-ton annoncé, le canevas de ces journées.
L’écosystème doit performer
On peut s’enthousiasmer pour le renouveau du code des investissements. C’est un framework indispensable. C’est lui qui éclaire sur le dispositif institutionnel dont on sait qu’il est l’écrin du climat d’affaires dans le pays. Mais ce n’est pas tout. Le code actuel date de 1993. On comprend qu’il soit devenu obsolète. C’est un code né avant la mondialisation et avant l’accord d’association avec l’UE. Il est par conséquent totalement dépassé. Ce cadre réglementaire a construit l’attractivité du site national, pour les investisseurs étrangers, essentiellement sur les incitations fiscales.
Cet avantage comparatif est totalement décalé par rapport à la carte des flux d’IDE dans le monde. Rectifier le tir est donc devenu une nécessité. Mais doter le pays d’un code up to date est une chose. Faire repartir l’investissement en est une autre. Nous sommes à l’âge de l’instantanéité en affaires, donc pour doper l’investissement, il faut aussi que tout l’écosystème national accomplisse son aggiornamento.
Le code nouveau peut-il introduire une dose de fraîcheur et de réactivité à tous les chainons du circuit d’accompagnement de l’investissement? C’est là, par conséquent, un chantier induit qui nécessite sa part de reconfiguration.
Investissement : voir grand
Faire repartir l’investissement, c’est d’abord voir grand. Or les chefs d’entreprise tunisiens, longtemps prisonniers du schéma étriqué de l’import/substitution ne se sont pas familiarisés à la consigne, agir local et penser à l’international. Ce n’est pas faute d’ouverture d’esprit, mais faute de masse critique de notre marché national. Souvent des investisseurs internationaux séduits par notre environnement national se décident pourtant à s’établir dans le voisinage, précisément pour motif de dimension physique du marché.
La FIPA avait, pendant un temps, imaginé la formule de triangulation. Des investisseurs de standing international qui s’établiraient sur notre sol pourraient distribuer à l’international et notamment sur le principal marché de consommation qu’est l’UE, exploitant la proximité géographique. La construction théorique est séduisante et crédible. Mais elle a été peu suivie d’effets. Saurons-nous, à la lumière de ce nouveau code, la faire repartir? C’est peut-être une voie qu’il faudra réexplorer pendant les Journées de 2012 de l’IACE.
D’autre part, la FIPA est à l’origine d’un autre slogan tout aussi important: “Tunisia, a country that works». L’IACE, think tank militant pourra-t-il «remuscler» cette idée? Ce ne serait pas le moindre des mérites des Journées.
Par ailleurs, l’IACE pourrait aider à rapprocher les perspectives de partenariat entre les milieux patronaux maghrébins. On a toujours fait cru que ces milieux se concertent pour agir collectivement. Et, pourtant sur terrain, on les voit jouer perso et chacun pour soi. Jouer collectivement est une riposte à la carence de masse critique de nos marchés restés encore cloisonnés.
L’édition 2012 sera-t-elle ce millésime d’exception qui pourrait infléchir les nationalismes économiques en vue d’un sentiment d’intégration régional?