éaire Areva, Luc Oursel, le 1er septembre 2011 (Photo : Eric Piermont) |
[07/12/2012 09:27:51] TOKYO (AFP) Luc Oursel, président du directoire du groupe français Areva, estime que le Japon aura du mal à se passer d’énergie nucléaire et à recourir rapidement aux renouvelables, malgré l’accident traumatisant de Fukushima. M. Oursel, qui revient du site sinistré, estime que la situation y évolue cependant dans le bon sens.
Q- Le gouvernement japonais a annoncé un nouveau plan énergétique prévoyant l’abandon progressif de l’énergie nucléaire à horizon 2040, cela vous paraît-il possible ?
R- “Je pense que l’énergie nucléaire continuera à garder une place dans la production énergétique japonaise pour un temps important. Il est en effet difficile d’imaginer un approvisionnement énergétique compétitif en s’en passant totalement. La crise a déjà eu des conséquences très négatives sur la balance commerciale.
“On verra ce que le prochain gouvernement dira, mais il me semble que l’annonce (d’abandon progressif) qui a été faite marque plus une déclaration de tendance que le début d’un plan d’actions”.
“Il est vraisemblable que la part de l’énergie nucléaire va baisser au Japon, il est probable que quelques centrales ne redémarreront pas pour des raisons spécifiques de sûreté. Mais le maintien des projets de retraitement et de construction de réacteurs montre que l’énergie nucléaire continuera à jouer un rôle dans la production électrique”.
“L’impact de l’accident de Fukushima sur nos affaires est finalement limité. Areva joue même un rôle majeur dans la mise à niveau de sûreté de la flotte mondiale de réacteurs”.
Q- Les autorités estiment néanmoins pouvoir compenser à moyen terme par des énergies renouvelables, vous n’y croyez pas ?
R- Areva propose aussi des solutions d’énergie renouvelable, mais le Japon est un pays dont les caractéristiques naturelles ne favorisent pas leur développement, compte tenu de l’absence de surfaces étendues pour le déploiement de parcs photovoltaïques ou de plates-formes éoliennes de très grandes puissance.
“Il est certain qu’il faut poursuivre les recherches. Mais si l’on veut massivement avoir recours à des énergies dont la compétitivité n’est pas encore suffisante, on s’expose à des surcoûts colossaux, comme c’est le cas en Allemagne”.
éacteur de la centrale de Fukushima |
Q- Vous vous êtes rendu mercredi dans le complexe atomique de Fukushima où Areva a apporté un soutien technique et continue de faire des propositions, quels changements avez-vous perçus depuis une précédente visite en septembre 2011 ?
R- “En septembre 2011, six mois après l’accident, la centrale était encore en situation de crise. Aujourd’hui, c’est un site industriel organisé, avec des contrôles rigoureux de la radioactivité des personnels, des systèmes de refroidissement robustes, des bâtiments renforcés, même si la radioactivité y reste forte par endroits.”
“Il y a en outre une plus grande ouverture, extrêmement bénéfique, envers des coopérations internationales. Il est important pour l’ensemble du secteur de savoir ce qu’il se passe à Fukushima. Pour les Japonais, cela peut être un élément de crédibilité et de rétablissement de la confiance sérieusement altérée”.
“Dans ce cadre, Areva propose plusieurs technologies, pour établir des cartes détaillées de la radioactivité, pour le tri et le traitement des sols contaminés”.
“Si les populations reviennent habiter la région dans des conditions de sûreté acceptables, ce sera un événement très important qui différenciera nettement l’accident de Fukushima de celui de Tchernobyl, prouvant que son impact aura été maîtrisé dans la durée”.
Propos recueillis par Karyn POUPEE