L’Italie, fragilisée par une nouvelle crise politique, sous le feu des marchés

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éenne, le 10 décembre 2012 (Photo : John Macdougall)

[10/12/2012 18:29:10] MILAN (AFP) L’Italie s’est de nouveau retrouvée sous le feu des marchés lundi après l’annonce de la démission du chef du gouvernement Mario Monti, dirigeant perçu comme son principal gage de stabilité et qui s’est efforcé de rassurer en affirmant que le pays ne connaîtrait pas de “vide” politique.

Les investisseurs ont vivement réagi lundi matin au double coup de théâtre politique du week-end, avec l’annonce coup sur coup du retour de Silvio Berlusconi sur la scène politique et de la prochaine démission du gouvernement Monti à la suite de la rupture de la coalition au pouvoir.

La Bourse a lourdement chuté et les taux italiens des emprunts à dix ans, baromètre de la confiance des marchés, se sont envolés, ravivant le souvenir des heures noires de la crise de l’euro et le spectre d’une contagion à l’échelle du continent.

Mais au final, l’indice vedette de la Bourse de Milan, le FTSE Mib, a réussi à contenir ses pertes à -2,20%, contre -3,5% et plus en matinée. Les taux à dix ans ont fait un bond de 30 points de base, attestant d’un regain de défiance envers la dette italienne.

M. Monti, qui se trouvait dans l’après-midi à Oslo pour la cérémonie de remise du prix Nobel de la paix à l’Union européenne, a appelé à ne pas “dramatiser” la réaction des marchés, qu’il a jugée “normale”. “Les marchés ne devraient pas craindre de vide décisionnaire” en Italie, a-t-il ajouté, soulignant que le gouvernement demeurait à son poste.

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à la Bourse de Milan montrant la chute des valeurs (Photo : Olivier Morin)

Mais pour les économistes de Capital Economics, la décision de M. Monti a ramené “l’Italie sous les feux de la rampe après près d’une année de relative stabilité politique et de calme sur les marchés”, la Grèce et l’Espagne ayant accaparé leur attention.

“Ce n’était qu’une question de temps avant que les inquiétudes sur la situation italienne ne réapparaissent”, jugent-ils, soulignant la performance économique “très mauvaise” du pays.

Les nouvelles turbulences italiennes ont provoqué l’inquiétude des autres pays fragiles de la zone euro, à commencer par l’Espagne: “les doutes sur la stabilité politique” de l’Italie ont un “effet de contagion immédiat” sur l’Espagne, a déploré le ministre espagnol de l’Economie, Luis de Guindos.

De leur côté, nombre de dirigeants européens ont fait l’éloge du travail accompli par M. Monti et appelé à continuer sur cette voie, sous peine d’affaiblir à nouveau l’Europe.

“L’Italie ne doit pas s’arrêter sur le chemin des réformes alors qu’elle a fait les deux tiers du chemin à parcourir. Cela plongerait non seulement l’Italie, mais aussi l’Europe dans une zone de turbulences”, a déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle.

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à Milanello, le 8 décembre 2012 (Photo : Giuseppe Cacace)

“Il n’y a pas de bonne alternative à la politique actuelle de consolidation budgétaire et de correction de la situation des finances publiques”, a renchéri le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, dans une interview à une chaîne de télévision italienne.

Quant aux élections législatives anticipées, qui devraient avoir lieu en février, il a espéré qu’elles ne seraient pas “utilisées pour repousser les réformes nécessaires ou même les abandonner car l’Italie en a besoin”.

Le président français François Hollande a de son côté fait part de son optimisme. “Je suis convaincu que ce qui vient de se passer permettra à l’Italie de trouver un gouvernement stable après les élections du mois de février. Et j’ai senti qu’il y avait chez M. Monti non pas de l’abattement, nullement, mais au contraire de l’envie de s’engager pour son pays”, a-t-il déclaré à Oslo.

M. Monti, arrivé au pouvoir à la tête d’un gouvernement dit “technique” en novembre 2011 en remplacement de M. Berlusconi, est très apprécié de ses pairs européens pour avoir su éloigner l’Italie du précipice de la dette et lancer des réformes, notamment celles des retraites ou du marché du travail.

Mais en Italie, son image a pâti ces derniers mois du strict régime de rigueur et notamment des impopulaires hausses d’impôts qu’il lui a imposées, ainsi que de la mauvaise santé persistante de l’économie italienne, dont le PIB affiche cinq trimestres consécutifs de contraction.

Pour l’heure, si le résultat du scrutin à venir apparaît encore incertain, les chances de Silvio Berlusconi semblent faibles. Et son principal concurrent, le socialiste Pierluigi Bersani, pour l’instant en tête des sondages, a promis de continuer sur la voie des réformes.

Le principal point d’interrogation concerne l’avenir du “professore”: Mario Monti, bien que démissionnaire, n’a apparemment pas jeté l’éponge. Il pourrait même se présenter de son côté aux élections, comme l’a discrètement suggéré son entourage ces derniers jours, ou bien viser la présidence de la République. L’intéressé a assuré lundi ne pas se poser la question “à ce stade”.