écembre 2012 à Lansing (Photo : Bill Pugliano) |
[11/12/2012 19:40:23] CHICAGO (AFP) La longue bataille pour affaiblir les syndicats aux Etats-Unis a pris un nouveau tournant et touche à présent le coeur du mouvement ouvrier, dans le Michigan, avec le gouverneur républicain de cet Etat du Nord qui s’apprête à signer une loi vivement dénoncée par ces derniers.
La Chambre des représentants de l’Etat a approuvé mardi en milieu de journée une législation controversée qui ne rendra désormais plus obligatoire le fait de payer des cotisations syndicales pour les ouvriers d’une entreprise publique ou privée. Seuls les membres syndiqués devront s’acquitter de ces frais, ce qui, notent les détracteurs de la loi, poussera les travailleurs à ne pas rejoindre les syndicats pour économiser de l’argent en des temps difficiles.
Le Sénat du Michigan avait déjà voté en faveur du texte la semaine dernière –les deux chambres sont dominées par les républicains– et le gouverneur Rick Snyder a annoncé qu’il promulguerait la loi dès cette semaine.
En signe de protestation, des milliers de personnes ont manifesté mardi devant le Congrès du Michigan, dans la capitale Lansing.
Pour justifier cette législation, dite du “droit-au-travail”, Rick Snyder met en avant un argument économique. Il assure que le texte est nécessaire pour “maintenir notre avantage compétitif” et attirer de nouveaux emplois, surtout après que l’Indiana voisin fut devenu cette année le 23e Etat du pays (sur 50) à promulguer une telle loi.
à Lansing, le 11 décembre 2012 (Photo : Bill Pugliano) |
Lors d’un déplacement lundi dans une usine automobile du Michigan, où il était venu plaider pour une hausse des impôts pour les plus riches, le président Barack Obama a fermement condamné les nouvelles mesures.
“Vous savez ces lois sur le soi-disant +droit-au-travail-+, elles n’ont rien à voir avec l’économie. Elles ont tout à voir avec la politique”, a martelé le démocrate. Sous les hourras d’une foule de travailleurs syndiqués, il a ajouté que les républicains “essayent de vous retirer vos droits à négocier pour obtenir de meilleurs salaires et conditions de travail”.
“attaque directe contre le monde ouvrier”
Ces lois, largement défendues par patronat et entreprises, avaient jusqu’à présent été limitées aux Etats avec une faible présence syndicale, notamment dans le Sud et l’Ouest.
Leur extension au coeur même des régions traditionnellement industrielles de l’Indiana et du Michigan — lieu de naissance du United Auto Workers Union, l’un des plus importants syndicats d’Amérique du Nord — marque un tournant.
Cela intervient par ailleurs après des tentatives d’élus républicains locaux arrivés au pouvoir en 2010 de réduire les droits de négocier des syndicats dans la “Rust Belt” (“ceinture de la rouille”), zone de développement historique des industries lourdes s’étendant de Chicago au nord-est des Etats-Unis.
à Lansing le 11 décembre 2012 (Photo : Bill Pugliano) |
C’est le cas du Wisconsin et de l’Ohio, dont les assemblées ont fait adopter des lois limitant les conventions collectives des salariés du secteur public.
Si dans l’Ohio, les syndicats sont parvenus à renverser ce genre de législations, dans le Wisconsin les restrictions demeurent.
Dans le Michigan, les démocrates prédisent déjà un “conflit sans fin”.
Pour Harley Shaiken, professeur à l’Université Berkeley de Californie, le gouverneur Snyder et ses acolytes vont “payer un coût politique élevé”: “Ils ont enclenché une guerre qui n’existait pas (…) c’est une attaque directe contre le monde ouvrier”.
Les syndicats restent puissants sur le plan économique et politique aux Etats-Unis, même si les adhésions sont tombées de 20,1% des travailleurs en 1983 à 11,8% en 2011.
Roland Zullo, de l’Université du Michigan, explique que si les entreprises vont profiter de ce genre de lois, les vraies motivations des élus restent politiques, “car les syndicats dans le Michigan ont été des acteurs très importants pour la victoire des démocrates aux dernières élections”.