L’Union européenne est-elle en train de rater l’occasion historique que lui offrent les changements de régime ayant eu lieu en 2011 dans plusieurs pays de la rive sud de la Méditerranée pour tisser de nouveaux rapports avec eux réellement bénéfiques pour les deux parties?
Beaucoup le pensent et pas seulement de ce côté-ci du Mare Nostrum. Plus surprenant, si le discours au Sud de la Méditerranée sur l’insuffisance des efforts de l’Union européenne en faveur de ses voisins méridionaux est chose courante chez eux, il est paradoxalement rarement aussi argumenté qu’au Nord. Le récent rapport du Conseil européen des Affaires étrangères -CEAE), think tank européen créé en 2007 pour, à partir de Londres, mener études et débat sur la formulation et la mise en œuvre d’une politique étrangère européenne commune digne de ce nom, en est une parfaite illustration.
Cet institut, appuyé par des organismes européen (Réseau des Fondations Soros, la Fondation pour les Relations Internationales et le Dialogue Extérieur –Espagne-, Fondation des Communautés Bulgares, UniCredit Group –Italie-, et la Fondation Mercator et Steven Heinz), vient de publier un rapport mettant à nue les faiblesses conceptuelles, organisationnelles et pratiques de la politique –«de voisinage»- de l’Union européenne en direction des pays d’Afrique du Nord. Un rapport tombé dans le domaine public à quelques semaines de la signature de l’accord portant octroi à la Tunisie du «Statut avancé».
En apparence, l’Union européenne a fait le nécessaire pour mettre à jour sa «politique de voisinage» à la lumière des changements intervenus au Sud, même si elle l’a fait avec un certain retard. «La réponse initiale de Bruxelles aux révolutions arabes en Afrique du Nord a été hésitante et incertaine», observent les auteurs du rapport (Nick Witney and Anthony DworkinNick Witney and Anthony Dworkin).
Mais après une première annonce, par Catherine Ashton, la Haute représentante pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, lors de sa première visite en février 2011, du déblocage d’une aide d’urgence de 17 millions d’euros à la Tunisie –une mesure qualifié de «ridicule» par Afif Chelbi, alors ministre de l’Industrie et des Télécommunications, l’Union européenne a essayé de se rattraper.
Un mois plus tard, le 8 mars 2011, Mme Ashton et Manuel Barroso -président de la Commission européenne-, présentaient les grandes lignes d’une nouvelle politique en direction des pays du Sud résumée par le slogan «Plus pour plus», offrant une plus grande assistance financière, et des avantages supplémentaires en matière de mobilité et d’accès au marché européen, en échange d’avancées politiques.
Une offre dans laquelle le CEAE voit l’admission implicite par les Européens que «la conditionnalité de l’aide européenne à l’Afrique du Nord au cours des années passées était une comédie couvrant la réalité de la complicité avec les régimes autocratiques -et la promesse d’appliquer la conditionnalité correctement à l’avenir».
A suivre.