Diesel, “taxe carbone”… : le délicat “verdissement” de l’impôt

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éoliennes (Photo : Joel Saget/Archives)

[18/12/2012 17:07:48] PARIS (AFP) Davantage taxer le diesel, reparler d’une “taxe carbone” ou revoir les exonérations dont bénéficient certaines activités: “verdir” la fiscalité pour combattre les comportements néfastes à la planète, est une “mission pleine de pièges”, selon l’économiste Christian de Perthuis.

En termes de fiscalité écologique, “on a un passif” en France, a rappelé mardi ce spécialiste du climat, qui préside un nouveau comité chargé d’évaluer les mesures fiscales vertes du gouvernement et d’en proposer.

Lionel Jospin avait échoué à mettre en place une “éco-taxe” sur les entreprises consommatrices d’énergie en 2000 et François Fillon avait vu son projet de “taxe carbone” retoqué par le Conseil constitutionnel en 2010.

C’est pourquoi la tâche du nouveau comité, composé de 40 élus et représentants des entreprises, salariés, associations et collectivités, s’apparente à “une mission pleine de dangers”, selon son président.

Premier sujet “chaud”: la fiscalité des carburants, favorable actuellement au diesel, désormais classé comme cancérigène par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Aligner les taxes pesant sur le diesel sur celles de l’essence est-il inévitable? “On le fera, la question, c’est à quel rythme et comment on va faire passer la pilule”, juge M. de Perthuis.

“Toutes les études sanitaires montrent qu’on avait plutôt tendance à sous-estimer les risques. Il y a bien un moment où le corps social va réagir, et même le gouvernement”, estime-t-il.

Mais il reconnaît que ce sujet “n’est pas le plus facile à traiter” car “un alignement du diesel sur l’essence est une mesure qui, prise brutalement, pose un certain nombre de difficultés à un certain nombre de professions”. Comme la pêche, l’agriculture, le transport routier ou les taxis.

Autre sujet délicat, le retour d’une éventuelle “taxe carbone”, constamment renvoyée à une hypothétique décision européenne depuis l’abandon du projet Fillon en 2010.

“En matière de fiscalité, les décisions au niveau européen se prennent à l’unanimité, il faudra donc que beaucoup d’eau coule sous les ponts pour qu’on ait l’unanimité sur une taxe carbone européenne”, relève M. de Perthuis.

Agir au niveau domestique est possible, affirme-t-il, citant l’exemple des six pays européens disposant de leur propre “taxe carbone”: Danemark, Finlande, Suède, Norvège, Suisse et Irlande.

“Que je sache, la Suède n’a pas vu baisser sa compétitivité depuis dix ans”, glisse ce défenseur revendiqué d’un système permettant de donner un prix au carbone et donc d’inciter des activités ou des consommations moins polluantes.

“Aujourd’hui, on ne sait pas intégrer dans notre système fiscal et le fonctionnement de notre économie tout ce qui concerne la protection des écosystèmes et la diversité du vivant”, explique-t-il.

La fiscalité écologique, que le gouvernement s’est engagé à promouvoir, n’a pas pour objectif de “faire entrer de l’argent dans les caisses mais de faire changer les comportements”, rappelle-t-il.

Un “verdissement” possible, conclut l’expert, à condition que la création de prélèvements verts ne se traduise pas par une hausse globale des impôts et prévoie des compensations pour les ménages les plus modestes.