érard Depardieu, le 1er octobre 2012 à Berlin (Photo : Johannes Eisele) |
[20/12/2012 19:03:13] PARIS (AFP) En pleine polémique sur l’exil fiscal du comédien Gérard Depardieu, le gouvernement a avancé jeudi l’idée de taxer en France les expatriés, un concept qui avait déjà été esquissé pendant la campagne présidentielle par Nicolas Sarkozy.
Interrogé au Sénat, le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, a évoqué cette idée comme une “piste”.
Il s’agit, a-t-il expliqué “d’éviter que ceux qui décident de vivre en dehors de nos frontières s’exonèrent par là-même des obligations fiscales que ces personnes ont à l’égard de leur pays dans lequel elles sont nées, elles ont grandi, elles ont été éduquées, formées, le plus souvent où elles ont rencontré la prospérité sinon la fortune”.
“Bref un pays auquel elles doivent beaucoup et dont elles ont tort, me semble-t-il, de s’exonérer des charges que celui-ci leur demande d’acquitter afin d’être redressé”, a-t-il ajouté.
Sollicité par l’AFP, Bercy n’a pas souhaité donner davantage de détails sur une telle mesure. Le gouvernement avait déjà évoqué ces questions, par le biais notamment de la nécessaire révision des conventions fiscales avec certains pays.
“Le Président de la République a suggéré que les conventions fiscales soient revues, je crois que c’est la seule façon d’éviter” l’expatriation pour raisons fiscales, a estimé M. Cahuzac, sans citer les pays concernés.
Interrogé jeudi sur le thème de l’exil fiscal sur BFM Business, le ministre de l’Economie Pierre Moscovici a renchéri, estimant qu’il faut “rétablir nos bases fiscales”. “Il faudra rediscuter nos conventions avec un certain nombre de pays, je pense notamment à la Belgique et à la Suisse”, a-t-il détaillé.
“Difficile à mesurer”
Pendant la campagne présidentielle, en mars 2012, le président sortant, Nicolas Sarkozy, avait proposé d’imposer les “exilés fiscaux” sur leur capital, mais pas les expatriés en général, jugeant que la mesure pouvait rapporter 500 millions d’euros.
A l’époque, M. Cahuzac, qui était président de la commission de Finances de l’Assemblée nationale, avait défendu l’idée d’une contribution des expatriés dont le revenu annuel était supérieur à 200.000 euros.
“Dans exil fiscal, il y a deux mots: il faudrait arriver à prouver que s’il y a exil, il est fiscal”, a observé jeudi M. Moscovici, en référence à la délicate nuance entre expatriés, le plus souvent pour raisons professionnelles, et exilés fiscaux.
L’annonce fracassante par le comédien Gérard Depardieu de son départ pour la Belgique pour payer moins d’impôt a provoqué de très nombreuses réactions politiques.
Il y a 2,5 millions de Français expatriés. Ils ont élu, pour la première fois, 11 parlementaires aux législatives de juin.
L’exil fiscal “est une notion extraordinairement difficile à mesurer, il n’y a pas de données objectives”, a rappelé M. Moscovici.
Pour M. Cahuzac, on ne peut pas “imputer à la seule fiscalité la responsabilité de ces expatriations”, citant comme exemple la multiplication par 2,5 des départs pour raisons fiscales entre 2003 et 2006, avec une politique fiscale qu’il qualifiait d'”accommodante”.
Il a rappelé que la mise en place d’un bouclier fiscal par le gouvernement Villepin et surtout en 2007 par Nicolas Sarkozy, “qui avait notamment vocation à empêcher les expatriations et favoriser les impatriations”, n’avait pas changé le nombre de départs, évalués par les services du ministère du Budget à entre 750 et 850 contribuables.
“Incontestablement pour certains de nos compatriotes, il y aura toujours des raisons de partir car ils estimeront toujours qu’ils paient trop d’impôts”, a conclu M. Cahuzac.