Tunisie-Sondage Portland State University/Yale University : Les leaders religieux n’ont pas à se mêler de politique, estime une majorité de Tunisiens

sondage_tunisie-22122012.jpgLes
deux tiers des Tunisiens pensent que les religieux ne devraient avoir
d’influence sur les décisions du gouvernement. Voilà l’une des plus importantes
conclusions d’un récent sondage d’opinions réalisé en octobre et novembre 2012
par deux universités américaines (Portland State University et Yale University).
Appelés à commenter l’affirmation selon laquelle les leaders religieux ne
devraient avoir aucune influence sur les décisions du gouvernement, 41,8%
approuvent fortement, 25,4% approuvent –soit les deux tiers des Tunisiens-,
18,4% désapprouvent, 8,5% désapprouvent fortement et 5,4% n’ont pas d’opinion.

Réalisé sous la houlette d’experts tunisiens dirigés par Dhafer Malouche (Ecole
Supérieure de la Statistique et de l’Analyse de l’Information), le sondage jette
un éclairage fort instructif sur la manière dont les Tunisiens envisage leur
participation au processus politique, évaluent la situation actuelle, leur
attitude à l’égard des institutions politiques et leur perception de l’avenir.

Deuxième révélation: malgré le nouveau contexte de liberté, les Tunisiens ne
sont pas amateurs des manifestations. Sur les 1.200 sondés, 86,7% n’ont jamais
participé à une manifestation avant la révolution et –presque- autant (85,9%)
après; et 9% seulement y ont pris part plus d’une fois.

Concernant la situation actuelle dans le pays, on apprend sans surprise –ce fait
a déjà été révélé par d’autres sondages- que seulement 26% des Tunisiens
trouvent la leur meilleure qu’avant la révolution et 46,9% pire. Et pour 52,2%,
il n’y a eu aucun changement sur le plan financier.

De même, on a la confirmation que plus des trois quarts des Tunisiens ne sont
pas satisfaits de l’actuel leadership du pays, contre moins de 20% qui ne
partagent pas ce point de vue. Plus de 53% ne sont pas contents des performances
de l’Assemblée nationale constituante.

Même les partis
politiques en général n’échappent pas –comme l’ont déjà démontré
d’autres sondages- à ce sentiment d’insatisfaction et aux critiques. A titre
d’exemple, seule une minorité des Tunisiens –Ennahdha (38,7%), CPR (24,6%),
Ettakatol (21,8%), le PDP (15,3%) et Al Aridha (15%)- pensent que les partis
sont capables d’atteindre des objectifs, et une portion similaire –Ennahdha
(36,6%), CPR (24,9%), Ettakatol (21,8%) PDP (14%) et Al Aridha (13,9%)- leur
reconnaît une «plateforme politique claire».

Cette distance entre les citoyens et les partis se confirme dans la réalité
puisque seulement 1,5% des Tunisiens sont membres actifs d’un parti, 24,7%
disent ne pas s’y intéresser. Plus important: près de la moitié des Tunisiens
(44,6%) affirment soutenir différents partis en fonction des circonstances.

Autre révélation importante: malgré leur insatisfaction à l’égard de la
situation actuelle, les Tunisiens «demeurent engagés pour une participation aux
institutions démocratiques». Quand on leur demande ce qu’ils pensent de
l’affirmation selon laquelle «la démocratie pourrait avoir ses problèmes mais
demeure une meilleure forme de gouvernement que les autres», plus de 80% se
disent d’accord (dont plus de 40% fortement), et seulement 13,1% ne la partagent
pas.

Autre indication rassurante: 70,9% ont l’intention de voter si les élections
avaient lieu demain.

Enfin, une plus forte majorité (90,5%) pense que les membres de l’ancien régime
doivent être jugés pour corruption.

Paradoxalement, malgré leur mécontentement, et alors qu’ils affrontent un avenir
incertain, les Tunisiens demeurent majoritairement -53,2%- optimistes. 21,6%
sont pessimistes et 23,1% n’ont pas d’opinion.