En
ouvrant les travaux de l’atelier sur le Private equity, Tarek Chérif s’est livré
à un vibrant plaidoyer en faveur du recours des entreprises tunisiennes à ce
mode de financement, qui présente, entre autres avantages, de se faire à long
terme, et, de ce fait, d’améliorer les fonds propres et de réduire
l’endettement. Et cela ne relève pas du prêche diplomatique, car le président de
la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (CONECT) est, en tant que
patron, l’un des plus fervents partisans du Private equity et l’un des
entrepreneurs qui en font le plus usage en Tunisie.
Malheureusement, peu nombreux sont ses confrères qui font comme lui. «En
Tunisie, il y a un retard (en matière de Private equity) dû au manque de
transparence sous l’ancien régime, à la prédominance du financement bancaire et
au fait que la culture des entreprises tunisiennes, souvent familiales, les rend
hostiles à l’entrée de nouveaux actionnaires», analyse Eileen Murray,
représentante résidente de la Banque mondiale en Tunisie.
Pour cette raison, le Private equity qui, rappelle Fadhel Abdelkéfi, a été
introduit en Tunisie il y a près de vingt ans, n’a jamais décollé, parce qu’il a
mal démarré. «En fait, le financement de la Société d’Investissement à Capital
Risque (SICAR) a longtemps été perçu comme une dette supplémentaire, ayant la
forme d’une dette personnelle ne figurant pas au bilan de la société, parce que
contractée par le promoteur dans le cadre d’un portage», rappelle le directeur
général de Tunisie Valeurs et président du Conseil d’administration de la Bourse
des Valeurs Mobilières de Tunis (BVMT).
Un avis partagé par Chadly Ayari. En effet, «les
SICAR, souvent des filiales de
banques, dominent le secteur et se comportent comme des banquiers» qui n’ont pas
de culture du risque et, de surcroît, n’assurent pas ou très peu le coaching des
entrepreneurs, observe le gouverneur la Banque centrale de Tunisie (BCT).
Raisons pour lesquelles le patron de la «Mère des banques» affirme que le
dossier des Sicar en Tunisie a besoin d’être revisité. Et pour que le Private
equity puisse devenir un outil aidant «à transmettre le capital d’une génération
à une autre», il faudrait, selon M. Ayari, séparer les fonctions les rôles de la
banque et de la Sicar et faciliter la sortie de cette dernière, par le biais de
la Bourse. Ce qui n’est pas encore tout à fait le cas, puisque «les Sicar
préfèrent sortir hors marché, notamment en raison du refus de l’investisseur de
partager le pouvoir et de son opacité pour des raisons fiscales».
Revue et corrigée à plusieurs reprises au cours des dernières années, la
législation afférente aux Sicar a encore besoin d’être améliorée, d’après
certains professionnels. Mais pour Aziz Mbarek, «en Tunisie, plus que les
textes, c’est leur application qui pose problème». Le directeur général de
Tuninvest estime, en outre, que dans notre pays «il manque un chaînon comme la
Banque de développement économique de la Tunisie (BDET) qui a joué un rôle
important dans le développement industriel».