Vérification – Censure du budget : un coût de 500 millions ou d’un milliard?

photo_1357149132480-1-1.jpg
Le Conseil constitutionnel (Photo : Thomas Samson)

[02/01/2013 17:54:11] PARIS (AFP) Combien vont coûter les mesures du budget 2013 censurées par le Conseil constitutionnel samedi ? Le gouvernement maintient un chiffre de 500 millions d’euros, Les Echos ont calculé le double et l’opposition réclame la transparence.

En titrant sur plus d’un milliard d’euros mercredi, le quotidien économique a lancé un débat qui jusqu’ici avait été délaissé: combien de millions va coûter la censure en terme de recettes non engrangées ? Les commentateurs s’étaient jusqu’à présent focalisés sur le refus par le Conseil de la taxe à 75% pour les contribuables les plus riches, camouflet pour François Hollande.

Les ministres de l’Economie, Pierre Moscovici, et du Budget, Jérôme Cahuzac, ont aussitôt démenti le chiffre des Echos, maintenant l’évaluation avancée dès ce week-end de 500 millions d’euros.

L’opposition n’a pas tardé à s’engouffrer dans la brèche, réclamant une audition des deux ministres par la commission des Finances de l’Assemblée nationale et demandant “au gouvernement de faire toute la transparence”.

Dans le détail, tout le monde s’accorde sur un point: la censure de la taxation à 75% des contribuables gagnant individuellement plus d’un million par an va provoquer un manque à gagner de 200 millions d’euros.

A cela, s’ajoutent 180 millions de recettes chiffrées par le gouvernement dans des documents budgétaires consultés par l’AFP et que les Sages ont rayé d’un trait de crayon en censurant l’article réformant la fiscalité sur les plus-values immobilières. Les Echos reprennent ce chiffre brut, Bercy le revoit à 170 millions.

Deux autres montants, plus techniques, fâchent particulièrement. Ils font monter l’addition de 600 millions d’euros selon les Echos, de quelques dizaines de millions seulement selon Bercy.

D’abord, le Conseil constitutionnel a censuré la rétroactivité à 2012 de l’alignement de la taxation des dividendes sur le barème de l’impôt sur le revenu. Concrètement, des contribuables ayant déjà payé un prélèvement forfaitaire libératoire en 2012 pouvaient être à nouveau mis à contribution sur ce même exercice.

Des mesures difficiles à chiffrer

Dans les documents budgétaires accompagnant le débat parlementaire sur le projet de loi de Finances rectificatif pour 2012, le gouvernement prévoyait en effet environ 400 millions de recettes grâce à ces “revenus des capitaux mobiliers”.

Or, rappelle Bercy dans un communiqué, “l’essentiel du gain de cette réforme provient de la suppression de l’abattement forfaitaire de 1.525 euros (3.050 euros pour un couple marié), qui n’est pas censurée”. La partie censurée “engendrait des gains et des pertes de recettes (…) qui devaient globalement s’équilibrer”, ajoute-t-il.

“Ce que dit Bercy est crédible, ce n’est pas 400 millions, ça ne peut pas mécaniquement être le coût. C’est nécessairement moins, est-ce que c’est nettement moins, je ne peux pas le dire”, précise à l’AFP Vincent Drezet, secrétaire général de Solidaires-Finances publiques.

Autre vif sujet de débat, les Echos s’appuient sur des rapports parlementaires pour calculer un manque à gagner de 100 à 200 millions d’euros lié à la censure de la prise en compte des plus-values dites “latentes” – non encore touchées – dans le calcul du plafonnement de l’ISF.

“L’impact de cette mesure n’avait pas été pris en compte dans l’équilibre de la loi de finances car il était impossible d’en estimer précisément le rendement”, assure Bercy mercredi.

“C’est ce qu’il y a de plus difficile à chiffrer, (…) d’expérience, je sais qu’on peut faire des erreurs si on ne fait pas de simulations”, confirme à l’AFP Alain Trannoy, économiste directeur d’études à l’EHESS.

Globalement, confie-t-il, “j’aurais plutôt tendance à croire Bercy parce qu’ils sont aujourd’hui les seuls à pouvoir faire des simulations sur des revenus des capitaux”. “On n’a pas les moyens universitaires d’avoir des données pour l’instant, la seule source valable, c’est Bercy”, poursuit-il.