Même s’il continue à refinancer les banques, le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie est loin d’être satisfait de leur comportement, notamment sur le marché monétaire.
En prenant les commandes de la Banque centrale de Tunisie (BCT), en juillet 2012, Chadly Ayari n’ignorait sans doute pas l’ampleur et, partant, la difficulté des tâches qui l’attendent. L’un des chantiers qui l’absorbe le plus et l’occupera de plus en plus à l’avenir est celui des banques, dont la situation en inquiète plus d’un.
Ces établissements ayant été saignées par le retrait massif, après le 14 janvier 2011, de près de 1,2 milliard de dinars, la BCT a dû voler à leur secours en les refinançant à hauteur de 5 milliards de dinars par jour. Mais le gouverneur de la BCT n’est pas satisfait de la manière dont cette enveloppe est utilisée et il le dit haut et fort.
«Cette masse est extrêmement mal distribuée et utilisée», estime le patron de la BCT. Qui constate qu’«il y a un glissement de plus en plus des crédits vers la consommation, plutôt que vers l’investissement». Certes, concède-t-il, lors de l’Atelier sur le financement des petites et moyennes entreprises, organisé le 14 juin 2012 par la Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie (CONECT), «le désir d’investissement est actuellement faible. Et ce n’est pas à cause du taux d’intérêt ou du manque de liquidité. Il n’y a pas d’investissement, parce que l’investisseur ne peut pas affronter à la fois un risque économique, politique et sécuritaire. Il faut éliminer les deux risques non-économiques».
Mais le fait qu’il prenne un peu la défense des banques, au sujet de l’investissement, n’empêche pas Chadly Ayari de les critiquer au sujet de l’utilisation des 5 milliards de refinancement avancés par la BCT.
«Le marché monétaire est une véritable jungle», reproche le gouverneur. Qui s’étonne de voir les banques «offrir des taux d’intérêt à TMM+2, voire +3 et +4 pour y arracher les liquidités disponibilités». Et révèle, à ce sujet, qu’en réaction, il «n’arrête pas de signer» des décisions de sanction contre des banques.
Mais le bras de fer ne semble qu’à ses débuts. Puisque le gouverneur de la BCT soupçonne «certaines banques» de «jouer le risque systématique», c’est-à-dire de faire de la résistance parce que convaincues que leur éventuelle faillite pouvant faire courir un risque systémique à l’ensemble du système bancaire, la BCT n’oserait pas les presser au-delà d’un certain seuil, et encore moins oser mettre en faillite une banque de la place.
Or, M. Ayari est non seulement convaincu qu’aucune banque tunisienne ne représente un risque systémique, mais il est également déterminé à engager des «réformes de fond, sans craindre le risque systémique».
Plus même, le gouverneur de la BCT a «l’intention de faire en sorte que les banques qui sont complètement inefficaces disparaissent de la scène». D’autant qu’il est absolument convaincu qu’il y a trop de banques en Tunisie.
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