Lorsque l’ambassadeur de France en Tunisie, François Gouyette, déclare, ces derniers jours, au magazine des Tunisiens en France «00216» que «l’influence de la France n’est pas en déclin en Tunisie», il a tout à fait raison. Pour preuve, les affaires marchent bien. Pour n’en citer que la plus récente, le groupe bancaire français, la Banque fédérative du Crédit mutuel (BFCM-CIC), jusque-là actionnaire à hauteur de 20% du capital de la Banque de Tunisie, vient d’acquérir pour la coquette somme de 217 MDT, la cession d’un bloc d’actions représentant 13,1% du capital de la BT, revenant à l’Etat, ce qui lui permet de contrôler la Banque (33,1%).
Cette prise de contrôle ne manque pas d’enjeux dans la mesure où elle vient renforcer la présence des banques françaises en Tunisie.
Faut-il rappeler que le groupe français BNP Paribas détient 51% du capital de l’Union bancaire du commerce et de l’industrie (UBCI) et 60% des droits de vote de cette banque… Les 49% restants du capital étant détenus par des actionnaires privés tunisiens.
Est-ce nécessaire de rappeler également que le groupe bancaire français, la Société générale détient 52,34% du capital de l’Union Internationale de Banques (UIB) après la cession de la part de l’Etat dans son capital?
Et pour ne rien oublier, le groupe français Caisse d’Epargne détient 60%, par le biais de sa filiale, la société financière Oceor. Le reste est détenu par l’Etat tunisien (20%) et l’Etat koweïtien (20%).
A ces participations majoritaires, viennent s’ajouter des participations françaises minoritaires, dans le capital de banques tunisiennes. Il s’agit, notamment, de Proparco, filiale de l’Agence Française de Développement, dans le capital de la Banque de Tunisie (BT), de la Société Marseillaise de Crédit et Natexis Banques Populaires dans celui de la Banque Internationale Arabe de Tunisie (BIAT).
Cette percée spectaculaire des banques françaises s’est faite en grande partie avec la complicité de hauts cadres tunisiens peu regardants, au temps de Ben Ali, sur l’intérêt de la Tunisie et, surtout, avant même que le pays n’engage les négociations avec l’Union européenne sur la libéralisation des échanges de services.
Conséquence: les banques françaises occupent le terrain et ont une belle avance sur leurs éventuels concurrents.
Quant à la perception qu’ont les Tunisiens de ces banques, elle est négative dans son ensemble. Ils n’y voient, jusque-là, aucune valeur ajoutée. Les banques françaises en Tunisie, qui sont pour la plupart des résurgences de banques coloniales, se préoccupent plus de la conclusion de contrats avec les maisons mères lesquelles ne semblent pas considérer la Tunisie comme un site stratégique, d’où leur tendance à y dépêcher des managers incompétents et peu entreprenants.
Globalement, les analystes qualifient les banques françaises en Tunisie de «banques opaques, renfermées, peu communicatives et peu agressives», à l’exception de la Caisse d’Epargne qui commence à grignoter d’importantes parts de marché et le CIC qui évolue dans une banque réputée pour son traditionnel professionnalisme, en l’occurrence, la Banque de Tunisie.
L’heure est, désormais, à l’évaluation du rendement des banques françaises implantées en Tunisie. Nous espérons que le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Chedly Ayari, s’y penchera, dans le cadre de sa prochaine réforme du secteur bancaire.