Si nous sommes égaux devant la mort, nous sommes loin de l’être face au voyage !
Certains voyagent en première classe et font des allers et retours entre Dubaï et les Seychelles pour profiter du soleil et des cocotiers. Un voyage ennuyant au pays de «Nemo» aurait été d’une platitude telle pour Sakher El Materi et son épouse (je suppose), si ce n’étaient les quelques interférences «justiciennes bhiriennes» rajoutées aux notions de géographie de l’érudit Docteur Rafik Abdessalem, ministre des Affaires étrangères, qui y ont mis du pep’s.
Faut-il aller aussi loin pour retenir l’attention? Pas forcément! Si les Tunisiens aiment généralement Istanbul pour faire du shopping et y prendre du bon temps, il y en qui affectionnent les capitales (n’est-ce pas Mr Rafik Abdessalem?) et qui préfèrent Ankara. Surtout quand elles se sentent dans la peau d’une «James Bond Girl», n’ayant pas besoin de fuir Interpol pour y recevoir un prix. L’heureux récipiendaire n’est nulle autre que Saïda Agrebi qui se dit honorer son pays et réclame que «le gouvernement soit fier du prix international qu’on lui a décerné. La «Zabagirl» doit regretter le temps de voyages en avion présidentiel… Grandeur et décadence! Un prix et adieu les privilèges!
Ceci dit, après le grand périple du 23 octobre, il y en qui voyagent de leur ministère à l’hôtel d’en face et ont voulu faire du tourisme jusqu’à l’Ile Maurice! Le ministre des Affaires étrangères est un sacré bourreau de travail! Pilier du tourisme, il est celui qui a le plus voyagé de tout le gouvernement de la Troïka et pourrait sauver à lui seul le secteur du voyage. Sa générosité ne s’applique hélas pas au tourisme local puisque l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) exclut des déplacements professionnels de ce que l’on appelle vacances depuis 1995 !
S’il est clair qu’en ces temps de turbulences, beaucoup confondent chemin et destination, il ne fait aucun doute qu’il y en a beaucoup qui voyagent dans l’enfer d’un quotidien difficile et luttent pour ne pas sous-classer leur pays au vu de la crise économique et sociale dans laquelle il plonge.
Ceux-là ont voté pour une poignée de VIP qui a désormais une pension complète avec chambre avec vue au sein de l’Assemblée nationale constituante (ANC) au palais du Bardo, l’ancienne résidence du Bey. Ils n’ont rien fait pour ceux qui voyagent, comme des sardines qui se tassent dans des rafiots pour traverser la mer et vont mourir en Syrie. Ils sont (mal) menés par ceux qui reviennent de voyage et qui ont vécu l’exil doré. Un bien lumineux univers comparé à ceux qui ont plongé dans l’obscurité de la clandestinité et la noirceur des prisons.
Par contre, il y a une autre catégorie. Celle qui est interdite de voyages. Les derniers en date qui en sont frappés sont la bloggeuse Olfa Riahi et Ayoub Messoudi. L’interdiction de voyager est une mesure d’emprisonnement à ciel ouvert et on se demande ce qui la justifie Veut-on nous faire croire qu’ils fuiraient leur pays, pour se réfugier à l’étranger? Veut-on nous faire croire qu’ils ont enfreint la loi en défendant leurs idées et liberté d’expression?
Cette interdiction ne vise certainement pas à amoindrir leur valeur humaine et de les considérer immatures et incapables. Bien au contraire! Cette précaution est une protection de leur personne à une époque où les routes ne sont pas sécurisées! Qu’allez-vous chercher d’autre? Que vous voulez-vous, pensez-vous qu’est interdit de voyage qui veut? Non, c’est un club des «happy few» où est passé ou passe encore Abdessalem Jrad, Kamel Ltaief, Farhat Rajhi, et autres ex-ministres, hommes d’affaires…
Tien oui ! Les hommes d’affaires ne sont tellement plus VIP ou happy few que Rached Ghannouchi en personne a appelé dans une interview accordée à El Dhamir à la levée de leur interdiction de voyage afin de leur envoyer un message de confiance et d’encouragement.
Il a demandé au gouvernement de lever les restrictions frappant les hommes d’affaires et d’œuvrer en vue de trouver des arrangements d’ordre financier à travers l’estimation approximative des bénéfices et des avantages qu’ils ont tirés de leurs liens avec le régime déchu.
Le parti Ettakatol au gouvernement a, lui, appelé la société civile à se mobiliser pour lever l’interdiction sur Olfa Riahi!
Qu’allez-vous chercher… Ne sommes-nous pas tous égaux devant le voyage mais pas de son prix!