La Troika porte l’entière responsabilité du Budget de 2013. Cette dernière prend donc plein risque sur les deux objectifs simultanés de stabilisation sociale et de relance économique. Les hypothèses de calcul du budget reposent sur des objectifs ambitieux sur la dette, les déficits jumeaux et la croissance. Cela fait trop de « si ». Et, si la reprise n’est pas relayée par la croissance, comment dés lors assurer les grands équilibres ?
Invité d’honneur du dernier rendez-vous mensuel du CJD, Slim Besbes a voulu, d’entrée de jeu, prendre ses hôtes à contrepied. Pour éluder les critiques conventionnelles, le SE aux finances et principal architecte du budget pour avoir occupé durant toute la période écoulée le poste de ministre par interim, a dit que le budget 2013 revêt un caractère exceptionnel. La circonstance l’imposerait comme tel. Il serait en ligne avec les exigences de la dernière ligne droite de la période de transition. Ses interlocuteurs ne se laisseront pas dribbler pour autant. Ils s’infiltreront par un angle de tir redoutable : la fiscalité. C’est un substitut à la dette. Pourquoi n’a-t-elle pas été optimisée ? Et, si c’était pour des motifs électoralistes, donc à dessein ? Oups !
Mettre en avant les indicateurs
Le budget 2013 est porté de bout en bout par la coalition actuelle. Celui de 2012 avait été préparé par le gouvernement de BCE. Et le gouvernement actuel n’y apporté qu’une touche accessoire en lui accolant une loi de finances complémentaire. Le budget de 2013 sera-t-il celui du retour à la normale ? Les indicateurs avancés par Slim Besbes, servent de paravent pour dire que la partie est jouable. Mais la manœuvre n’a pas fait diversion. Ainsi en est-il des indicateurs tel les réserves de change qui remontent à 118 jours en date du 8 janvier 2013 contre 108 en 2012 et 144 en 2011. Pareil pour le déficit budgétaire qui après avoir été doublé entre 2010 et 2012 passant de 3 à 6,6% retomberait à 5,9% en 2013. Mais ce n’est pas là que l’attendait l’auditoire. L’auditoire est allé droit vers les fragilités sur lesquelles ont été construits les grands équilibres. Ils se demandent si le budget de cette année nous effacerait les contreperformances de 2011 et 2012 et pourra-t-il enjamber toute la mauvaise publicité qui nous a été faite par les agences de notation ?Avec un taux de 4,5 % et des indicateurs en convalescence on renouerait avec le niveau de 2010 soutenait en substance le SE, mais les intervenants n’y voyaient pas un exploit, outre que cela reste en-deçà des attentes. Et revenons d’abord à la croissance.
Un taux de croissance de 4,5 % : pari ou réalité ?
Les conditions du retour de la croissance sont controversées. A chaque intervention en public, le SE sait qu’il est en épreuve de grand oral. Le budget de 2013 en croissance de 5% environ est « Zero Growth Budget ». Donc avec un budget à croissance zéro, la politique de Go &Stop fait que cette année est l’année du STOP. La relance de l’investissement devient donc problématique. Par ailleurs le titre 2, celui de l’investissement est rogné par le Titre 1, c’est-à-dire celui de fonctionnement. Par ailleurs ces dépenses alourdies par les charges de la Caisse Générale de compensation, ont été financées en partie par le produit des biens confisquées. On redoute que pour ne pas fâcher l’opinion le gouvernement n’en arrive à financer les dépenses sociales par la dette. Par ailleurs, l’endettement ne peut progresser indéfiniment. D’un côté le creusement du déficit n’est pas une option extensible, à l’infini. De l’autre, les conditions du marché seront de plus en plus difficiles. Et, au lieu de la dette pourquoi ne pas optimiser la fiscalité. Il est vrai que la pression fiscale et les prélèvements sur les entreprises plafonnent. Un gisement est resté à l’abri, celui des 400.000 forfaitaires dont une bonne partie peut aisément passer au régime fiscal réel. Un salarié paie ce qu’on sait alors qu’un gérant de café peut s’acquitter de son devoir fiscal pour un forfait de 200 dinars environ. Le million de salariés rapportent 2,7 milliards de dinars et les 400.000 forfaitaires ne ramènent que 0,02 milliard au budget.
La stabilité sociale et la relance économique : deux objectifs compatibles ?
En veillant à ne pas heurter l’opinion et à ne pas s’engager sur la voie de la vérité des prix, le gouvernement pense garantir la stabilisation sociale. Il est vrai que le relèvement, ne serait-ce que progressif, des prix des denrées subventionnées tel que le produits alimentaires de base ou l’énergie, relanceraient les revendications salariales. L’opération vérité des prix est impopulaire, dirions-nous et sans vouloir faire de jeu de mots, par essence. Quand bien même elle est inéquitable. Sachez que 80 % des subventions de l’énergie profitent aux 20% les plus privilégiés de la population. Une autre mesure, tout aussi délicate peut également avoir des retombées électorales désastreuses, à savoir l’inclusion des forfaitaires dans le régime fiscal réel. Par ailleurs, on ne voit pas comment on tiendrait les grands équilibres si le cours du brut grimpait à plus de 110 dollars, cours qui a servi aux calculs des planificateurs. Qu’en sera-t-il du cours du dinar, si d’aventure et pour des raisons exogènes, il se déprécierait par rapport au dollar, comment ferons nous pour compenser notre déficit commercial. Il est donc bien clair que si le gouvernement, pour des raisons électorales, persistait dans une voie d’état providence, le financement du budget fera problème. Quant aux 4,5 % de croissance suffiront-ils à amortir les aspirations populaires. Et puis, promettre un taux de croissance de 7 % en 2017 c’est comme si on promettait ‘’demain on rase gratis’’, ça manque de mordant. Déjà que pour les 4,5 % de 2013 Fayçal Derbal, membre du Conseil de l’ordre des experts comptables dira que ce taux ne peut être atteint que si avant le 31 mars de cette année le pays est remis sur rails. Il entendait par là que le code de l’investissement soit fin prêt que la constitution soit votée et que la feuille de route pour la finalisation de la transition démocratique soit définitivement arrêtée. Cela fait trop d’inconnues ce qui rend les système, complexe.