Visite du président de la Banque mondiale en Tunisie… le dit et le non dit

jim-yong-bm-2013.jpgLe président du groupe de la Banque mondiale (BM), Jim Yong Kim (Corée du Sud), vient d’effectuer, sa première visite officielle en Tunisie, depuis qu’il a pris ses fonctions, en juillet 2012. Officiellement, l’objectif est de discuter des réformes nécessaires à la reprise de la croissance, de prendre connaissance des attentes de la société civile tunisienne et d’examiner le rôle de la BM dans le soutien du processus démocratique en cours.

Concrètement, la visite a été marquée par la signature, au grand bonheur du gouvernement tunisien, d’un accord de principe en vertu duquel la BM octroie à la Tunisie un prêt de 500 millions dollars sous forme d’appui budgétaire pour 2013 en plus d’un programme de réformes et d’assistance technique.

Ce crédit intervient après l’octroi de deux prêts de 500 millions de dollars, chacun, en juin 2011 et novembre 2012. Ces prêts sont destinés à soutenir le processus de transition politique et économique entamé avec la chute du dictateur Ben Ali, un certain 14 janvier 2011.

Le nouveau prêt ne manque pas d’enjeux dans la mesure où il constitue un message fort rassurant, non seulement, pour les autres partenaires financiers de la Tunisie, mais également, pour les investisseurs locaux et étrangers.

Le seul hic dans ce prêt réside dans le fait qu’il soit conditionné par l’initiation de réformes, a priori, difficiles à réaliser.

Le chef du gouvernement, Hamadi Jebali a été très vague, à ce sujet, lors de la signature de l’accord. Pour lui, “le soutien de la Banque mondiale à la Tunisie vise non seulement à aider financièrement le gouvernement provisoire mais également à appuyer ses réformes, notamment dans les secteurs bancaire, de la formation, des études, de l’investissement, de la décentralisation et des Petites et moyennes entreprises (PME)”.

Quant au président de la Banque mondiale, sans être plus précis, il a été plus direct. Il a parlé de “réformes douloureuses” qui devaient être menées à bien dans un pays miné par les conflits sociaux et la pauvreté deux ans après la révolution.

“Nous savons que toutes les sociétés qui ont géré dans la douleur les réformes à court terme ont pu construire les fondations d’une croissance économique à long terme”, a-t-il-dit.

Lors de la conférence de presse qu’il a tenue au terme de sa visite, Jim Yong Kim a révélé deux importants éléments sur ces réformes.

Premièrement, il a déclaré que les autorités tunisiennes se sont engagées à réaliser ces réformes: «les dirigeants tunisiens se sont engagés à faire ce qu’il faut», a-t-il-précisé.

Deuxièmement, il a indiqué que le groupe de la Banque mondiale se doit de “s’assurer que la Tunisie est capable de démontrer avec succès qu’Islam et démocratie sont compatibles et que les tunisiens peuvent jouir d’un développement économique qui inclut tout le monde”.

Décryptage: la Tunisie ne doit pas compter indéfiniment sur la générosité de la BM car il y a des seuils d’emprunt à respecter et qu’au regard de la situation socio-économique difficile par laquelle elle passe (récession de ses principaux partenaires commerciaux: zone euro et Libye), elle n’a d’autre choix, en 2013, que d’initier, au plan intérieur, les réformes requises pour contrebalancer les effets récessionnistes exogènes.

Il s’agit essentiellement d’améliorer l’environnement politique (sécurité, visibilité, consensus politiques…), d’accélérer l’adoption du Code d’investissement et de tout faire pour que le climat social ne se dégrade pas davantage.

Un joli programme pour une Troïka qui se croyait à l’abri des crises.