Des syndicalistes devant la raffinerie Petroplus de Petit-Couronne, le 6 janvier 2012 (Photo : Kenzo Tribouillard) |
[06/02/2013 11:50:35] PARIS (AFP) Les pétroliers français estiment que l’Hexagone a déjà payé un assez lourd tribut à la rationalisation du secteur du raffinage européen, et espèrent que les fermetures de sites qui ne devraient pas manquer d’arriver frapperont d’autres pays.
“Les raffineries européennes vont continuer de souffrir, c’est quelque chose que les gouvernants doivent bien comprendre”, a souligné Jean-Louis Schilansky, président de l’Union française des industries pétrolières (Ufip), lors d’une conférence de presse.
Le secteur souffre simultanément d’une surcapacité structurelle en Europe par rapport à la demande pétrolière locale, en baisse depuis plusieurs années, mais aussi d’une concurrence accrue des raffineries américaines, qui bénéficient pour leur part d’un avantage compétitif grandissant grâce à l’essor des hydrocarbures non conventionnels aux Etats-Unis, qui leur donne accès à des matières premières bon marché, a-t-il expliqué.
En outre, de nouveaux acteurs font leur entrée au niveau mondial, en particulier dans les pays émergents et notamment l’Inde où plusieurs mégaraffineries ont été construites ces dernières années, a-t-il rappelé.
Dans ce contexte, “nous continuons à prévoir qu’à l’horizon 2015, il y aura encore 8 à 10% de surcapacités dans le système européen de raffinage”, a estimé M. Schilansky, ajoutant que “la restructuration du raffinage européen n’est pas terminée”.
“Les raffineries françaises ont beaucoup donné”
Toutefois il a jugé que la France avait déjà fortement contribué à la rationalisation des capacités de raffinage sur le Vieux continent, et souhaité que les raffineries françaises accèdent à une “période de stabilité”.
“Les raffineries françaises ont beaucoup donné, nous sommes passés de douze en activité en 2009 à huit actuellement, et j’espère très sincèrement qu’il y aura une période de stabilité du système de raffinage français. S’il y a des raffineries à fermer, il y d’autres pays où il peut y avoir des fermetures, plutôt qu’en France”, a-t-il argumenté.
Les raffineries en sommeil sont celle de Petroplus à Petit-Couronne (Seine-Maritime) et LyondellBasell à Berre-l’Etang (Bouches-du Rhône).
Celle de Total Flandres a fermé en 2010 et celle de Petroplus à Reichstett (Bas-Rhin) a été arrêtée en avril 2011.
Selon l’Ufip, les activités de raffinage représentent environ 13.000 emplois directs en France, auxquels s’ajoutent environ 40.000 emplois indirects.
Concernant le sort de Petit-Couronne en Seine-Maritime, objet de 5 offres de reprise déposées mardi, dont 2 jugées “sérieuses” par le gouvernement, le patron de l’Ufip a espéré qu’un repreneur “sérieux et solide” soit désigné.
Les salariés du site vivent une situation “extrêmement difficile” depuis un an et “il serait catastrophique qu’on se retrouve dans une situation d’arrêt au bout de quelques mois”, a-t-il dit.
A propos de la motivation des repreneurs potentiels, M. Schilansky a souligné qu’ils avaient presque tous “un lien avec les pays producteurs” de pétrole.
“S’ils y voient un intérêt qui leur est propre, pourquoi pas”, a-t-il dit, soulignant qu’une reprise de la raffinerie “va sauver 470 emplois”.
Enfin, interrogé sur la possibilité d’une prise de participation minoritaire du gouvernement français pour faciliter la reprise, M. Schilansky s’est dit surpris, mais pas opposé “si cela peut aider à donner plus de confiance à un repreneur”.
Par ailleurs, M. Schilansky a prévenu qu’après une amélioration des marges de raffinage en France l’an dernier, le secteur n’ayant pas perdu d’argent en contrairement aux deux milliards de pertes essuyées en 2011, les marges allaient probablement redescendre cette année.
“Je ne crois pas non plus qu’on sera dans une situation catastrophique, mais le regain de compétitivité des raffineries américaines va entraîner beaucoup de pression sur les raffineries européennes”.