Goodyear : le patron de Titan raille les salariés, le gouvernement promet de répondre

[20/02/2013 15:38:02] PARIS (AFP) Des “soi-disant ouvriers” qui “ne travaillent que 3 heures”, le patron de Titan International ne mâche pas ses mots contre les salariés de Goodyear à Amiens-nord qu’il a envisagé de reprendre, au grand dam des syndicats qui parlent d'”insulte”, le gouvernement promet de répondre.

Les critiques sont acerbes: “les salariés discutent pendant trois heures et travaillent pendant trois heures”, “vous pouvez garder les soi-disant ouvriers”, fustige Maurice M. Taylor, en anglais, dans une lettre adressée au ministre français du Redressement productif, Arnaud Montebourg, et dont Les Echos ont publié mardi une copie.

Le patron du groupe américain de pneumatiques agricoles parle encore de “syndicat fou” et insiste sur la responsabilité du gouvernement français dans ce dossier.

Face à ce flot de critiques, Arnaud Montebourg a d’abord choisi le silence, mardi, pour ne “pas nuire aux intérêt de la France”, avant de promettre le lendemain une réponse “par écrit”.

En 2012, Titan avait proposé de reprendre plus de 500 salariés de l’usine en difficulté Goodyear d’Amiens-nord, mais le projet avait capoté.

Goodyear a annoncé fin janvier que le site allait fermer, menaçant 1.173 postes.

“Goodyear a essayé pendant plus de quatre ans de sauver une partie des emplois à Amiens, qui sont parmi les mieux payés, mais les syndicats et le gouvernement français n’ont fait rien d’autre que de discuter”, écrit Maurice M. Taylor.

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évrier 2013 à Paris (Photo : Francois Guillot)

Un brin provocateur, il annonce que “Titan va acheter un fabricant de pneus chinois ou indien, payer moins d’un euro l’heure de salaire et exporter tous les pneus dont la France a besoin”.

Au passage, le patron se fait aussi oiseau de mauvaise augure pour les activités du géant français du pneumatique Michelin dont il prédit que “dans cinq ans, il ne pourra plus produire de pneus en France”.

“leurre dès le départ”

Le Parti communiste (PCF) n’a pas tardé à réagir estimant mardi, dans un communiqué, que Titan incarnait “un capitalisme de vautours” et qualifiant ce courrier de “lamentable provocation, doublée d’une xénophobie assumée à l’encontre des salariés français”.

Plus sévère, le représentant de la CGT, majoritaire à l’usine Goodyear d’Amiens-nord, Mickaël Wamen a dénoncé mercredi une “insulte totale”, jugeant Maurice M. Taylor proche de l'”asile psychiatrique”.

“Ca montre bien le personnage que c’est, de ce qu’il entendait faire avec nous. Titan, c’était un leurre dès le départ”, a estimé Magid Boubeker, délégué Sud à l’usine d’Amiens-nord.

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à Rueil-Malmaison près de Paris (Photo : Martin Bureau)

Cédric Soares, ouvrier non syndiqué de l’usine d’Amiens-nord, suggère de “retourner” la lettre à Goodyear en disant que ce sont “eux les incapables, eux qui ont été incapables de maintenir un outil de travail qui ramène de l’argent”.

Les propos sont plus nuancés à droite où l’ex-président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer (UMP), a dénoncé un “jusqu’au-boutisme de certains syndicats” français même si la lettre du PDG de Titan lui semble “moqueuse” et “caricaturale”.

De son côté, la direction de Goodyear Dunlop Tires France (GDTF) a indiqué qu’elle n’entendait “pas entrer dans la polémique et les excès”.

“Notre souci est avant tout celui des salariés concernés par le projet. Nous sommes très attachés à trouver avec eux, dans le cadre légal prévu, les solutions les plus adaptées à la situation actuelle”, a-t-elle affirmé dans un communiqué adressé à l’AFP.

Lors d’un Comité central d’entreprise (CCE) le 12 février, la direction de Goodyear a exposé “les motivations économiques” de son projet aux élus du personnel ainsi que le Plan de sauvegarde de l’emploi envisagé.

Elle a affirmé vouloir “utiliser au mieux” les possibilités de reclassement interne et devrait proposer en France “au moins 100” postes, un nombre toutefois limité au regard des 1.173 subissant l’impact de la fermeture.