éo, joue à Pac-Man (1980) au MoMA de New York, le 1er mars 2013 (Photo : Emmanuel Dunand) |
[05/03/2013 08:59:38] NEW YORK (AFP) Ils sont jeunes, pas forcément beaux, parfois bruyants, mais qu’importe: les jeux vidéo ont fait ce week-end une entrée très remarquée et toute en élégance au MoMA, le célèbre musée d’Art moderne de New York.
Ils sont désormais 14, présentés dans la galerie sophistiquée de design contemporain du 3e étage, dans le cadre d’une exposition plus large intitulée “Applied design” qui met à l’honneur “les nouvelles directions du design contemporain”.
Sur un mur sombre, un jeu Tetris en gris et blanc (1984) voisine avec le mythique Pac-Man (1980), tous les deux sous forme d’un petit écran numérique incrusté dans le mur. Chacun a son descriptif, racontant par qui et dans quel contexte ils ont été créés. A côté de Pac-Man, est exposé un vaste graphique de son code, là encore expliqué au profane.
Dans une salle voisine, sont exposés Myst (1993), Another World (1991), les Sims (2000), etc. Un fond sonore déroule leur musique, familière pour de nombreux jeunes visiteurs.
Un homme devant le jeu SimCity (2000) au MoMA de New York, le 1er mars 2013 (Photo : Emmanuel Dunand) |
Dans le décor épuré du MoMA, la plupart des jeux sont accompagnés de manettes ou souris permettant d’y jouer, et de casques pour le son. Seuls les jeux en ligne disputés à plusieurs joueurs ne le sont pas.
Parmi la collection, de nombreux jeux datent évidemment de la dernière décennie: Katamari Damacy (2004), EVE Online (2003), Dwarf Fortress (2006), Portal (2007), flOw (2006), Passage (2008) ou Canabalt (2009), où la vie entière d’un couple défile en moins de cinq minutes.
De l’art ?
Souvenirs de toute une génération qui ne pensait probablement pas finir si vite au musée, peuvent-ils être pour autant qualifiés d’oeuvres d’art? Ont-ils leur place dans un établissement aussi prestigieux que le MoMa ?
Paola Antonelli, la responsable de l’exposition, balaie d’un revers de phrase la question.
“Le monde entier a toujours pensé qu’ils étaient une forme d’art (…) mais franchement, je ne suis pas intéressée par la discussion de savoir si les jeux vidéo sont de l’art, ou si une chaise est de l’art. Le design est pour moi la plus haute forme de l’expression créative humaine, et quand quelque chose a un design magnifique, cela me suffit largement”, confie-t-elle à l’AFP.
Une femme devant le jeu EVE Online (2003) au MoMA de New York, le 1er mars 2013 (Photo : Emmanuel Dunand) |
C’est cette approche design qui a été retenue pour cette exposition qui dure jusqu’en janvier 2014, et participe de la volonté du musée d’élargir ses collections de design interactif.
Sa préparation a pris plus d’un an et demi, impliquant experts, historiens, et critiques.
Pour choisir les jeux, une multitude de critères ont été étudiés: leur pertinence historique et culturelle, leur qualité esthétique, mais aussi “l’élégance du code”, et même l’attitude qu’il génère chez le joueur.
Pour toutes les collections de design interactives du MoMa, “la fonction est importante, mais de nos jours elle n’est pas seulement pratique, elle peut être aussi émotionnelle. La forme est aussi une forme de communication, et nous en regardons le sens” explique Mme Antonelli.
Et, dit-elle, “nous nous posons une question clé: est-ce que cela manquerait au monde si cela n’existait pas ?”
Le MoMa a en tête une liste totale de 40 jeux vidéo, qu’il espère acquérir dans les prochaines années. Parmi ceux-là, figurent des jeux plus anciens, notamment Spacewar! (1962), Pong (1972), Space Invaders (1978), Asteroids (1979), Zork (1979), Tempest (1981), Yars’ Revenge (1982), Marble Madness (1984), Super Mario Bros (1985), ou encore la Légende de Zelda (1986).
“Mais nous prenons notre temps”, dit encore Mme Antonelli. “Car notre rôle en tant que musée est aussi de conserver ce que acquérons. Nous essayons donc d’obtenir le logiciel et même le code” des jeux, même si ce n’est pas toujours possible.