Le Prix Nobel de la Paix 2006 et promoteur du microcrédit au Bengladesh, Muhammad Yunus, a encouragé à Tunis, le mardi 12 mars, la Banque africaine de développement (BAD) à apporter un appui à l’entreprenariat à but social (social business, en anglais), estimant qu’il a un grand impact en matière de réduction de la pauvreté. Yunus s’exprimait devant des membres de la direction de la BAD au cours d’une rencontre organisée par le Bureau de l’Economiste en chef de l’institution.
Après l’historique de l’entreprenariat social et de la Grameen Bank (Banque des populations défavorisées) qu’il a créée, l’économiste et Prix Nobel s’est appesanti sur les motivations et la philosophie de son initiative dénommée ‘Yunus Social Business’.
Un capitalisme à visage humain
Pour lui, il s’agit essentiellement d’aider les populations à améliorer leurs conditions de vie en se prenant en charge. Une approche qui s’apparente d’une certaine manière à la philanthropie. Mais une différence de taille, c’est qu’ici, il ne s’agit pas ici de donner, mais plutôt de prêter à des couches défavorisées de la population, d’investir dans des secteurs sociaux ou de créer des entreprises dont l’objectif ultime, n’est pas le profit comme c’est le cas dans les entreprises capitalistiques ordinaires.
Selon Yunus, son initiative est la contribution qu’il a voulu apporter face à la grande pauvreté qui existait dans son pays, le Bangladesh, dans les années 1970, lorsqu’il venait d’achever ses études d’économie aux Etats-Unis. Il s’agit donc d’un capitalisme à visage humain, motivé par l’action humanitaire et dont les dividendes sont réinvestis dans le circuit initial.
Un impact considérable
Parlant de l’impact du microcrédit de la Grameen Bank et de son approche sociale, Yunus l’estime immense. Au Bengladesh, cet impact est tangible, en ce sens qu’il a permis d’améliorer considérablement bien des indicateurs socio-économiques concernant les femmes et les enfants.
Une forte proportion de femmes a ainsi acquis l’autonomie sociale et financière. Ce qui leur a permis de mieux soigner leurs enfants et de leur assurer une meilleure éducation à travers des programmes de bourses.
Des projets de développement ont également permis ici et là d’installer des panneaux d’énergie solaire et des points d’eau potable, tout comme de réduire le taux de mortalité dû au paludisme, grâce à la promotion de l’utilisation de moustiquaires.
Cet impact palpable sur le terrain est, a-t-il dit, ce qui fait le succès de l’entreprenariat social. Toutes choses qui le fondent à encourager des institutions comme la BAD à s’y intéresser. Il a félicité la BAD pour son programme pilote d’entreprenariat social pour le Togo, la Tunisie et l’Ouganda.
Selon le Prix Nobel, le succès de son initiative vient aussi de la simplicité du système, exempt de bureaucratie, d’intermédiaires, d’avocats, etc. «L’entreprenariat social est basé sur la confiance», a-t-il souligné.
Face à certaines interrogations teintées de scepticisme, et notamment à propos du caractère ‘humanitaire’ de l’initiative, Yunus estime que pour juger l’entreprenariat social, «il faut changer de lunettes et en porter de nouvelles qui permettent de voir autrement».
Soude : BAD