La fête de l’indépendance serait-elle effacée de l’histoire comme s’il n’y avait pas eu d’occupation, pas de mouvement national, pas de combattants pour la décolonisation, pas de fellagas et bien sûr pas de destouriens ?
Dans cette volonté de gommer tout ce qui a précédé la prétendue révolution du jasmin, y compris l’histoire plus ou moins récente de la Tunisie, pousserait-on le vice jusqu’à vouloir ôter de la mémoire du peuple et des annales du pays le mouvement de libération national? Est-ce une amnésie collective que l’on cherche à instaurer ôtant toute dimension nationale à la fête de l’Indépendance au point de ne voir aucun drapeau flottant sur les artères principales ou dans les grandes avenues de la capitale en célébration de la fête de l’indépendance?
La Tunisie voudrait-elle s’élever vers une plus haute destinée ou rester esclave d’une lecture erronée de l’histoire basée sur les jalousies, les vindictes, et les désirs de vengeance de certains leaders politiques en mal de reconnaissance ?
Le peuple tunisien qui a manqué nombre de rendez-vous pour marquer son attachement à son pays, car écarté de la vie publique pendant des décennies, se veut aujourd’hui un acteur dans la construction d’un Etat civil, dans l’instauration de la justice et de l’Etat de droit et dans l’édification d’une véritable citoyenneté. Comment le faire si l’on ne renforçait pas son sentiment d’appartenance en célébrant comme il se doit les fêtes nationales et en les marginalisant? Comme l’année précédente (2012), la Mairie de Tunis a oublié de décorer la ville aux couleurs nationales.
Voilà 57 ans que la Tunisie a retrouvé sa souveraineté et quoiqu’on en dise, c’est grâce à des personnes de l’envergure de Bourguiba, de Farhat Hached, d’Habib Achour, de Béchir Sfar, de Ahmed Tlili et de beaucoup d’autres que l’on y a réussi. A force de luttes politiques et de combats de rues, dans les montagnes et à l’intérieur du pays que le pays a gagné son indépendance. Le nier aujourd’hui est ingrat, refuser le mérite des hommes et femmes qui ont lutté pour la fin de l’occupation de la Tunisie par la France est pervers en cette période où la dimension identitaire des Tunisiens revêt de plus en plus de l’importance.
En négligeant de fêter l’indépendance et de rendre honneur à la journée du 20 mars, le gouvernement est en train de faillir à un devoir de mémoire et de s’auto-désacraliser car ce n’est pas ce genre de fêtes nationales que l’on redonne à l’Etat dignité, distinction, prestige et autorité et qu’on conforte le peuple dans son appartenance à un pays libre et souverain. Pendant ce temps, le président de la République reconnaît la fête de l’indépendance en libérant 366 prisonniers; c’est sa manière à lui de célébrer cette fête nationale.
Dans la rue, l’absence des drapeaux traduit chez de nombreuses personnes une volonté affirmée de nier l’indépendance de la Tunisie? Messieurs les nouveaux gouvernants comptent-ils nous imposer une nouvelle histoire ou une nouvelle lecture de l’histoire tout comme ils auraient, selon certaines sources, oeuvré à l’orchestration de la «révolution du Jasmin» ?