La super-taxe Hollande se réduit comme peau de chagrin

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ésident François Hollande (d) et le ministre des Finances Pierre Moscovici (g) le 25 août 2012 à Paris (Photo : Bertrand Langlois)

[25/03/2013 18:03:59] PARIS (AFP) On savait que la super-taxe sur les très hauts revenus n’atteindrait jamais le taux symbolique de 75% promis par François Hollande. Mais de censure constitutionnelle en avis juridique, elle se réduit comme peau de chagrin et Bercy cherche une formule pour en sauver l’esprit.

Après avoir décrypté l’avis remis vendredi par le Conseil d’Etat, le gouvernement a acquis la conviction qu’il ne pourra pas imposer les revenus d’activité d’un foyer fiscal à plus de 60%, loin de la version initiale.

Promesse phare du candidat Hollande, la contribution de 75% au-delà d’un million d’euros par an a été retoquée fin décembre par le Conseil constitutionnel. Motif : elle visait chaque personne et non le foyer fiscal, créant une différence de traitement entre ménages.

Le gouvernement a immédiatement promis une nouvelle mouture. Mais il redoute de voir sa taxe censurée à nouveau, cette fois pour un éventuel caractère confiscatoire. Bercy a donc saisi le Conseil d’Etat pour minimiser les risques.

Pour la plus haute juridiction administrative, l’impôt ne doit aller au-delà d’un “taux marginal maximal d’imposition des deux tiers”, soit 66,6% des revenus.

Ce taux maximum doit inclure la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu (45%), la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus créée fin 2011 (4%), et les prélèvements sociaux qui sont de 8% sur les revenus du travail mais de 15,5% sur ceux du capital.

Pour atteindre 66,6%, la surtaxe ne peut donc dépasser 9,6% sur les revenus du travail et 2,1% sur ceux du capital.

Mais le Conseil d’Etat stipule aussi que la taxe doit viser avec le même taux “l’ensemble” des revenus, du travail comme du capital, alors que la contribution à 75% ne concernait que les revenus d’activité.

“Cette taxe commune fait que les revenus d’activité ne seraient même pas taxés à 66,6%”, mais “autour de 60%”, explique-t-on au ministère du Budget.

Autant de “contraintes juridiques” qui “encadrent fortement les marges de manoeuvre”, ont reconnu le ministre des Finances Pierre Moscovici et son nouveau ministre délégué au Budget Bernard Cazeneuve.

Certaines voix poussent donc le gouvernement a explorer de nouvelles options.

A droite, le président de la commission des Finances du Sénat Philippe Marini l’incite tout simplement à “refermer ce dossier” et à renoncer à “cette promesse hasardeuse”, car, dit-il à l’AFP, “tout ce qui incite à l’expatriation des capitaux est contreproductif”.

Plus surprenant, le député socialiste Jean-Marie Le Guen appelle dans Le Parisien à “tourner la page des 75%”, une idée qui à ses yeux n’est “plus judicieuse aujourd’hui”.

Le principal syndicat des impôts, Solidaires Finances publiques, estime que l’exécutif devrait “instaurer une nouvelle (ou deux) tranche(s) au barème de l’impôt sur le revenu”, pour “renforcer la progressivité”. Une telle mesure serait “pérenne” et non limitée à la durée de la crise comme la précédente.

L’avis du Conseil d’Etat remet enfin sur la table une piste qui semblait avoir été écartée : la taxation des entreprises qui versent des salaires exorbitants. “L’objectif qui consisterait à imposer les rémunérations très élevées ne semble ainsi pouvoir être atteint (…) que par l’imposition de la partie versante”, écrivent les juges administratifs.

Cette option a les faveurs du rapporteur du budget à l’Assemblée nationale, le socialiste Christian Eckert.

“On regarde toutes les options : entreprises, ménages, règlementaires”, assure-t-on à Bercy.

Reste l’inconnue du calendrier. Après avoir annoncé des délais jamais tenus, l’exécutif se veut prudent. L’objectif est d’insérer le dispositif dans le projet de budget pour 2014, en septembre.

Mais si une taxation des entreprises était retenue, le gouvernement pourrait, selon une source proche du dossier, l’inclure dans le texte pour encadrer les salaires des grands patrons du privé qui doit être présenté avant l’été.