és de Sanofi interpellent le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg (C) le 25 mars 2013 à Lyon (Photo : Jeff Pachoud) |
[26/03/2013 10:07:22] LYON (AFP) “Le plus dur, c’est l’incertitude”. Face aux plans de restructuration et aux suppressions de postes qui se succèdent chez Sanofi, les salariés du géant de l’industrie pharmaceutique vivent très mal de ne pas savoir ce qu’il adviendra demain de leur emploi et de leur vie.
Parmi eux, Yvon Lopez, chercheur biologiste de 51 ans, salarié depuis 18 ans au pôle Sanofi-recherche de Toulouse.
Comme 150 de ses collègues toulousains, il a fait près de 8 heures de car dans la nuit de dimanche à lundi pour venir interpeller à Lyon le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg sur la situation du groupe.
“Le PDG de Sanofi, Christopher Viehbacher, veut se désengager de Toulouse, mais on ne sait pas ce qu’il veut faire exactement. Tout ce qu’on nous dit c’est que +l’avenir du site reste à définir+. On est dans le flou le plus total”, explique-t-il.
“Si la direction nous avait dit +que ça vous plaise ou pas, le site ferme+ ou si on nous avait annoncé un PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi, ndlr), au moins ils auraient été amenés à faire des propositions”, raconte à l’AFP Yvon Lopez.
“Mais là, on nous dit +la recherche doit être réorganisée, point barre+ et nous ne savons même pas si nous sommes inclus dans les 914 suppressions d’emplois”, dénonce-t-il, “c’est cette situation d’expectative qui est angoissante et anxiogène”.
és de Sanofi le 25 mars 2013 à Lyon (Photo : Jeff Pachoud) |
Pour ce père de deux enfants, comme pour ses 613 collègues du site de Toulouse, tous hyper-spécialisés qu’ils soient techniciens à bac +2 ou +3, thésards ou post-doctorants, la situation du marché de l’emploi n’incite guère à l’optimisme.
“Que ce soit dans le bassin d’emplois de Midi-Pyrénées ou en région parisienne, où les besoins sont les plus importants, il n’y a pas beaucoup de perspectives”, assure-t-il.
Plans à répétition
Ce qui irrite le plus Yvon Lopez ce sont les raisons de cette restructuration “dont on a du mal à comprendre les motivations industrielles et qui sont essentiellement financières”, selon lui.
“En 2010, 110 salariés de plus de 55 ans sont déjà partis du site de Toulouse dans le cadre d’un premier plan de retraites anticipées. L’objectif était de faire 2 milliard d’euros d’économies. Ils ont atteint cet objectif en un an. Et là, ils remettent le couvert”, peste-t-il.
“Mais pourquoi s’arrêteraient-ils puisque l’action continue à grimper?”, ajoute-t-il soulignant que celle-ci est passée de 45 à 77 euros depuis l’annonce de la nouvelle restructuration en juillet.
Ces plans à répétition, les salariés de l’usine Sanofi de Neuville-sur-Saône (Rhône) ne les connaissent eux aussi que trop bien.
à Lyon (Photo : Jeff Pachoud) |
L’activité chimie du site, qui emploie 450 personnes, va cesser, seule sera maintenue l’activité vaccins.
Une nouvelle restructuration qui intervient alors que 50 salariés d’un précédent plan de cessation d’activité n’ont toujours pas été reclassés. “D’autres, déjà partis travailler sur le site voisin de Marcy l’Etoile, dans le nord-ouest lyonnais, ont appris que leur poste allait être de nouveau supprimé”, raconte Sandrine Solovieff, déléguée CGT du site.
Selon la jeune femme, qui, avec son mari a déjà connu un plan social en 2005 chez Archemis (Rhône-Poulenc) à Décines (Rhône), “ces plans sociaux qui s’enchaînent, alors que les précédents ne sont même pas terminés, créent une incertitude, un stress considérable pendant des mois et des mois”.
A Neuville, un des salariés figurant parmi les gens à reclasser s’est suicidé fin janvier sur son lieu de travail, en avalant du cyanure dans son laboratoire.
Si la direction a évoqué sa “situation personnelle difficile”, les syndicats y voient eux une conséquence directe du contexte social. “L’aspect financier prime sur tout, même si pour cela il faut mettre en souffrance des milliers de personnes”, dénonce Sandrine Solovieff.
A Sanofi Toulouse, le secrétaire du CHSCT, Laurent Besson-Imbert a fait réaliser une enquête auprès des salariés, démontrant, selon lui, les effets délétères du plan de la direction.
“380 personnes (sur 614) ont consulté un des deux psychologues présents sur le site, on compte entre 3 et 5 fois plus de dépressions, 333 ont connu des troubles du sommeil, 225 souffrent d’anxiété, 65 ont vécu des crises d’angoisse”, énumère-t-il.
“Pour une entreprise qui s’autoproclame au service de la santé, c’est quand même un comble”, lâche-t-il.