étudiants chypriotes manifestent à Nicosie le 26 mars 2013 (Photo : Patrick Baz) |
[27/03/2013 05:54:29] NICOSIE (AFP) Chypre se préparait mercredi à d’ultimes efforts “surhumains” pour rouvrir ses banques jeudi comme prévu, alors que l’annonce d’un plan de sauvetage international n’a pas complètement rassuré les marchés.
Tandis que l’île entamait sa 12e journée sans banques, les bourses asiatiques ont ouvert en légère hausse. Mais l’euro, après avoir atteint lundi son plus bas niveau en quatre mois à cause de la crise chypriote, affichait une tendance ambivalente: affaibli face au dollar mais en légère hausse vis-à-vis du yen.
En dépit de ce plan aux conditions draconiennes décidé à la dernière minute lundi, la tension restait forte à Nicosie, où des centaines d’employés de banque et un millier de lycéens ont manifesté pour dire, chacun à leur manière, leur inquiétude pour l’avenir.
Afin d’éviter une fuite massive de capitaux, en particulier étrangers, toutes les banques de l’île sont fermées et les virements impossibles depuis le 16 mars, ce qui prive de liquidités nombre d’entreprises et de particuliers.
és de Bank of Cyprus manifestent devant le siège de leur banque à Nicosie le 26 mars 2013 (Photo : Yiannis Kourtoglou) |
Face à cette situation, les autorités mènent “des efforts intenses”, selon le porte-parole du gouvernement, “surhumains” selon le gouverneur de la banque centrale, Panicos Demetriades, pour permettre la réouverture jeudi des banques, déjà reportée à plusieurs reprises.
Selon M. Demetriades, la principale difficulté reste la nécessité d’assurer la solidité de la première banque du pays, la Bank of Cyprus, dont les comptes dépassant 100.000 euros vont subir une ponction évaluée pour l’instant à 40% et qui doit absorber la deuxième banque de l’île, Laiki Bank.
Pour les autres banques, “chaque jour où le système bancaire est fermé, la confiance des gens baisse et ils veulent retirer leur argent, alors nous sommes obligés d’imposer des restrictions” aux mouvements de capitaux, a expliqué M. Demetriades, tout en assurant qu’elles ne seraient pas très sévères.
Chypre a accepté une réduction drastique de son système bancaire, en contrepartie d’une aide de dix milliards d’euros de l’Union européenne, du Fonds monétaire internationale et de la Banque centrale européenne (BCE) pour éviter la faillite.
ïki le 21 mars 2013 à Nicosie (Photo : Yiannis Kourtoglou) |
Première victime
Première victime du plan, le président de la Bank of Cyprus, Andreas Artemis, a démissionné mardi. Le conseil d’administration a rejeté cette décision, ce qui devrait seulement la reporter d’une semaine.
Pendant ce temps, les clients de Bank of Cyprus et Laiki Bank ne peuvent retirer que 100 euros par jour aux distributeurs.
“On finit par s’y habituer”, a plaisanté Paris, gérant d’un salon de coiffure, avant de reconnaître, la mine assombrie, que la fréquentation de son salon avait diminué d’au moins un tiers ces dix derniers jours.
Les Chypriotes commencent toutefois à s’inquiéter. “J’ai des chèques chez moi, mais je ne veux pas les déposer à ma banque. Comment est-ce que je peux être sûr qu’ils vont créditer mon compte”, dit le propriétaire d’une petite imprimerie.
euros pour Chypre |
De nombreuses entreprises chypriotes peinent à fonctionner normalement, et certaines d’entre elles risquent d’être rapidement “poussées à la faillite”, selon la chambre de commerce chypriote.
De petites entreprises russes, qui font transiter leurs fonds à Chypre pour des raisons fiscales, sont désormais elles aussi confrontées à des difficultés de trésorerie.
M. Sarris a prévenu que l’activité économique de Chypre allait connaître une “baisse sérieuse”, mais que l’île pouvait compter sur ses réserves sous-marines de gaz naturel pour rebondir.
Cas unique
Le président conservateur Nicos Anastasiades, qui a succédé il y a moins d’un mois au communiste Demetris Christofias, entend cependant mettre en place une commission chargée de déterminer les responsabilités dans ce désastre.
Mardi, les marchés financiers internationaux ont retrouvé un peu de sérénité, après des propos très controversés de Joeren Dijsselbloem, le patron de l’Eurogroupe, qui rassemble les ministres des Finances de la zone euro.
Mercredi matin, les bourses asiatiques ont ouvert en légère hausse. A Tokyo l’indice Nikkei a entamé la séance en progression de 0,23%, encouragé notamment par un apaisement des tensions autour de la crise chypriote, ainsi que par des statistiques de bon augure aux Etats-Unis.
La veille, les principales bourses européennes avaient clôturé en timide hausse, à l’exception des bourses de Madrid, Milan et surtout Athènes, où la chute a frôlé les 5%. Les investisseurs en Grèce s’inquiètent en effet des conditions de la reprise par un établissement local, la Banque du Pirée, de trois filiales grecques de banques chypriotes.
M. Dijsselbloem a en effet laissé entendre que la solution apportée à Chypre pourrait être appliquée à d’autres pays. Quelques heures plus tard, il est revenu sur ses propos, affirmant que Chypre était un cas spécifique.
La crise chypriote “avait atteint une ampleur qui n’est comparable à aucun autre pays”, a aussi assuré Benoit Coeuré, membre du directoire de la BCE.
Le président français François Hollande a lui aussi souligné le traitement “exceptionnel, spécifique, unique” de Chypre.