ée dans un établissement (Photo : Martin Bureau) |
[28/03/2013 08:47:02] BOBIGNY (AFP) Ils attirent les clients à coups de tarifs bradés mais ne payent ni charges ni licence et ne déclarent pas leurs employés: les bars illégaux sont la bête noire des patrons de cafés qui bataillent contre ce phénomène dit de “paracommercialisme”.
La nuit de la Saint-Sylvestre, les policiers ont interrompu la fête qui battait son plein au Saphir bleu, à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), un établissement qui n’avait aucune autorisation pour ce type de soirées. Près de deux cents personnes ont été évacuées et trois d’entre elles ont été interpellées pour port d’armes.
L’établissement a été fermé.
En Seine-Saint-Denis, le problème est en recrudescence. Vingt procédures pour ouverture de débits de boissons clandestins ont été recensées en 2012, contre 6 en 2011.
Une situation qui fait bondir Laurent Lutse, président de la “fédération nationale des cafés-bars, brasseries et monde de la nuit” au sein de l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie): “pour nous c’est une plaie, c’est ce qui gangrène nos métiers”.
“En 1960, il y avait 200.000 cafés, aujourd’hui, entre 32.000 et 34.000”, se désole le professionnel. L’Umih représente entre 25.000 et 30.000 bars/brasseries et 4.500 établissements de nuit.
Les patrons de cafés doivent s’acquitter d’une licence IV pour avoir l’autorisation de vendre de l’alcool, dont le coût “peut monter à 50.000 euros”, précise Laurent Lutse. TVA, charges non payées, employés non déclarés…: “on peut chiffrer à plusieurs milliards d’euros ce qui échappe à l’Etat”, estime-t-il.
“Quand l’entrée coûte 15 ou 20 euros et qu’il y a facilement 300 ou 400 personnes, les sommes montent très vite”, commente Jean-Michel Aldebert, procureur à Créteil chargé de ces dossiers.
Comas, accidents
Dans le Val-de-Marne, trois boîtes de nuit ont été contrôlées en 2012 dans des opérations communes entre la police, l’Urssaf et l’inspection du travail. “Deux n’avaient pas d’existence régulière”, explique M. Aldebert.
Parmi elles, une boîte de nuit clandestine discrètement située au coeur d’une zone industrielle de Créteil. Le Kingdom club, “club afro généraliste le plus select de la capitale”, selon la description vantée sur internet, faisait danser plusieurs centaines de personnes chaque week-end.
“C’était vraiment une boîte de nuit qui fonctionnait au noir et qui organisait des soirées en invitant les gens en distribuant des flyers, ou par internet”, décrit le procureur.
“Pour nous, c’est une concurrence déloyale qui fait mourir le vrai bistrot et pour le consommateur, c’est un danger. Il n’y a pas de contrôles, pas de critères d’hygiène”, alerte Marcel Benezet, président des Cafés, bars, brasseries du Syndicat national des hôteliers, restaurateurs, cafetiers et traiteurs (Synhorcat).
“Il y a eu des comas profonds, des accidents”, affirme Laurent Lutse, qui souligne également l’absence de réglementation contre les incendies.
De la drogue ou des cigarettes de contrebande peuvent parfois circuler et dans certains cas les arrière-salles se transforment en salle de passe.
En 2012, en Seine-Saint-Denis, les procédures pour ouverture illicite de débit de boissons ont abouti à 7 fermetures temporaires, 3 fermetures définitives pour manquement grave à l’hygiène et à la santé et troubles à l’ordre public, et une fermeture définitive pour proxénétisme.
L’Umih a fait du paracommercialisme, qui touche également l’hôtellerie et la restauration, son cheval de bataille.
“Nous sommes en train d’identifier des commerces illégaux. Le but, c’est de faire remonter quelques cas bien concrets et on fera une opération sur la même semaine, avec des dépôts de plainte”, annonce Roland Héguy, président de l’Umih. Une opération destinée à sensibiliser l’opinion publique et alerter les pouvoirs publics.
L’Umih a a déjà remporté une première victoire: sa fédération des Bouches-du-Rhône a fait condamner un établissement d’Aix-en-Provence à lui payer 200.000 euros de dommages et intérêts.