Jamal Gamra veut mieux faire qu’en 2012. Sa mission est mal aisée. Il intervient en cours de route alors que la saison a été taclée par la crise politique. Un objectif chiffré : 7 millions de touristes, c’est concret. Mais quelles rentrées pour le secteur? Il ne faut pas que la saison tourne au rabais !
Jamel Gamra arrive au ministère du Tourisme en endossant un habit de manager. Avec pour horizon un mandat de neuf mois, le nouveau ministre du Tourisme se met en mode pragmatique. Il a ciblé son objectif: sauver la saison touristique, mal embrayée jusque-là.
Peut-il réussir dans sa mission?
Un plan d’action concret
Le gouvernement a nommé Jamel Gamra au Tourisme, sans se concerter avec la profession, c’est-à-dire le directoire de la Fédération du tourisme et de l’hôtellerie (FTH). Les responsables de la Fédération sont occupés à faire feu de tous bois. Après un début d’année plutôt «business as usual», le secteur s’est engourdi après l’assassinat du martyr Chokri Belaïd. Alors, hôteliers et voyagistes se sont mis au four et au moulin pour apaiser les marchés et les opérateurs.
Ils auraient vu d’un bon œil que le gouvernement les consulte. Qu’importe, le ministre s’emploiera à réparer l’impair avec perspicacité. Il va tout de suite au charbon. Sitôt installé, il est déjà sur le front russe au Salon de Moscou. C’est un signal fort aux professionnels pour dire que le ministère veut embrayer sur leurs soucis du moment et qu’il va leur prêter main forte pour qu’ensemble, ils parviennent à sauver la saison.
Sachant qu’il est en «mission éclair», Jamal Gamra se met sous la tyrannie du chrono. Sa feuille de route est un plan d’action avec consignes concrètes. Il faut être en B to B, pour enlever des commandes aux TO, à l’arrachée. La saison se jouera au corps à corps. Il faudra user de persuasion. Cela dit, le ministre prend certains risques. Quels sont ses atouts?
Le marketing personnalisé
Le ministre a une idée précise de la manière de mener la saison. Faisant preuve d’une touche de balle pragmatique, il opte pour un marketing personnalisé.
Sur le marché russe, avec un budget qui a triplé, il lorgne vers la clientèle fortunée de ce marché. Sur les marchés européens traditionnels, il a shunté le Salon de Paris pour faire du porte-à-porte. Sur ces marchés, la notoriété de la destination est acquise. Il faut surtout tranquilliser les Ordonnateurs.
Face aux TO, le ministre prend un engagement personnel, entre “quat’zyeux“. Cela pourrait les décider à augmenter les flux sur la Tunisie.
Pour les touristes maghrébins, la partie ne sera plus facile. Avec les deux gros contingents, à savoir les Algériens et les Libyens, il faut user d’un mix, marketing et politique. Quand bien même les contacts et campagnes de promotion seraient à la hauteur, sur ces deux marchés, le résultat n’est pas garanti d’avance.
Le ministre a du beau jeu, mais quelles cartes lui échappent?
Des ressources, mais des aléas
Le ministre dispose de plus de munitions que ses prédécesseurs pour faire de la promotion. A titre d’exemple, le budget pub’ sur la Russie a explosé. Il a triplé pour passer à 20 millions d’euros. Mais c’est l’offre qui reste aléatoire. Aux tares connues du secteur s’ajoutent les aléas sécuritaires et de propreté des stations touristiques. C’est autant de variables qui lui échappent. En face, ses interlocuteurs le savent. Ils seraient tentés de les monnayer en tirant les prix vers le bas. Déjà qu’avant 2011 les cours piquaient de la tête.
Comment infléchir la tendance? L’enthousiasme du ministre pourrait aider à faire remplir les hôtels, mais fera-t-il recette? Il existe bien le risque de brader les prix. C’est bien de vouloir faire performer le secteur, mais il faut se souvenir que l’on n’a pas fait les réformes nécessaires pour les fragilités que nous connaissons et notamment pour la qualité du service. C’est notamment sous cet angle que nous avons tendance à relativiser les objectifs du ministre, sans toutefois douter de sa bonne foi et de sa volonté de réussir.