à Nicosie, le 29 mars 2013 (Photo : Patrick Baz) |
[30/03/2013 21:47:30] NICOSIE (AFP) Les détenteurs de gros dépôts à la plus grande banque de Chypre, Bank of Cyprus, pourraient enregistrer des pertes allant jusqu’à 60%, plus que ce qui était d’abord envisagé dans le cadre du plan de sauvetage, ont indiqué samedi des responsables.
En contrepartie d’un prêt de 10 milliards d’euros conclu à Bruxelles, les autorités chypriotes doivent trouver 5,8 milliards. A cette fin, les comptes dépassant 100.000 euros sont gelés à la Bank of Cyprus et à la Laïki, les deux plus grandes banques du pays. La première (18,5 milliards d’euros de dépôts) doit être restructurée et la seconde (9,2 milliards) liquidée.
Des calculs sont en cours pour déterminer l’ampleur de la ponction prévue sur les dépôts à la Bank of Cyprus, qui a été fixée pour l’instant à 37,5% mais pourrait aller jusqu’à 60%.
Les détenteurs de dépôts de plus de 100.000 euros verront au moins 37,5% de leurs fonds transformés en actions, et 22,5% en plus qui sera immobilisé jusqu’à ce que les autorités sachent si elles peuvent remplir les conditions du plan de sauvetage, a indiqué samedi soir la Banque centrale.
“La première estimation a été que 37,5% des dépôts au-delà de 100.000 euros seront convertis en actions”, a également indiqué à la presse le ministre des Finances Michalis Sarris.
“Pour être sûrs –une fois que tous les calculs auront été faits sur le montant de la somme dont on a besoin–, 22,5% a été mis de côté”, a-t-il ajouté.
La Banque centrale a indiqué que la décision finale sur le pourcentage à déduire serait faite “dans pas plus de 90 jours après la fin de l’évaluation” et le reste serait rendu au dépositaire.
A la question de savoir si la ponction pourrait être supérieure à 60%, Mario Skandalis, un expert et cadre de la Bank of Cyprus, a indiqué que c’est “une possibilité mais je dirais qu’elle reste assez lointaine”.
Selon Marios Mavrides, député de Disy, le parti de droite du président Nicos Anastasiades, les 40% restants seront placés “dans un compte bloqué pendant six mois pour empêcher les gens de retirer tout leur argent”, mais doivent au final revenir à leur propriétaire, a ajouté M. Mavrides, tout en rappelant que ce délai de six mois menaçait la survie de nombreuses entreprises.
De façon générale, la restructuration drastique du paysage bancaire va avoir des conséquences dramatiques pour l’économie, ont prévenu de nombreux experts.
“Chute libre”
établissement bancaire, à Nicosie, le 30 mars 2013 (Photo : Patrick Baz) |
L’Institut de la finance internationale (IIF), qui représente les plus grandes banques du globe, a estimé que pays allait connaître une “chute libre”, avec une récession pouvant atteindre 20% sur les deux prochaines années.
Parallèlement, les autorités se sont engagées à mener une enquête approfondie après la publication dans la presse d’une liste de prêts octroyés à des personnalités politiques qui auraient vu leur dette effacée par les banques pourtant proches de la faillite.
Selon la presse grecque, Bank of Cyprus, Laïki et Hellenic Bank ont effacé des millions d’euros de dettes ces cinq dernières années au bénéfice de députés, de proches ou de sociétés liées à des personnalités politiques. Mais plusieurs personnes citées ont démenti tout favoritisme ou délit.
A ce sujet, le ministre des Finances a indiqué que les “banques, de temps en temps, font le choix de récupérer ou non l’argent qu’elles ont prêté”. “Ces pratiques ne sont pas rares”, a-t-il ajouté.
Alors que les Chypriotes débutaient un long week-end, lundi étant férié, les mouvements de fonds restaient fortement limités. Pour les entreprises, seules les transactions commerciales habituelles et validées par une commission indépendante sont autorisées.
Pour les particuliers, les retraits sont limités à 300 euros par jour et par personne et les paiements par carte à l’étranger ne peuvent dépasser 5.000 euros par mois. Les virements bancaires restent impossibles vers l’étranger et limitées vers Chypre même.
Par ailleurs, les voyageurs quittant l’île ne peuvent pas emporter plus de 1.000 euros en espèces. A Larnaca, le principal aéroport du pays, des affichages en grec, anglais et russe pressent les voyageurs de respecter ces restrictions.
Le décret instaurant ces mesures a été prolongé jusqu’à la fin de la semaine prochaine. La Banque centrale de Chypre a cependant indiqué que l’ensemble des mesures seraient réexaminées sur une base quotidienne pour être “ajustées” ou “allégées”.