L’évènement : le Centre de recherche sur le développement du nord-ouest (CRSDNO) a organisé, les 16 et 17 mars 2013 à Tabarka, un séminaire sur «les perspectives de développement du tourisme écologique dans la région». Le point d’orgue de ce séminaire a été, de toute évidence, la présentation du mégaprojet Jinene Medjerda.
Il s’agit d’aménager, à 70 km de Tunis, sur les monticules hauteurs du village Oued Zarga (gouvernorat de Béja) d’une nouvelle ville de plus de 100.000 habitants autour d’une université (College Town).
Selon ses initiateurs, Tahar Ben Lakhdar, fondateur de l’école privée d’ingénieurs “ESPRIT“, et Belgacem Mezni, ingénieur à la retraite, l’idée est inspirée des expériences réussies de Louvain La Neuve (Belgique), Harvard Le Massachusetts Institute of Technology (MIT aux Etats-Unis).
Le but est de mettre en œuvre, sur la base du «Knowledge Management Economy», un nouveau modèle de développement socio-économique adapté à la région du nord-ouest.
L’objectif stratégique est de créer les conditions de restructuration et de transformation profonde de l’économie du nord-ouest à travers l’amélioration des compétences technologiques et de gestion des exploitations agricoles et l’introduction de nouveaux produits à haute valeur ajoutée à l’export.
Plus simplement, pour Tahar Ben Lakhdar, ce mégaprojet, voire ce pôle de compétitivité à forte employabilité développé dans le cadre d’un partenariat public/privé (PPP), se propose de mettre la technologie au service de l’agriculture, d’accroître le chiffre d’affaires agricole, de créer à terme 40.000 nouveaux emplois dont un bon pourcentage d’ingénieurs et de gestionnaires qualifiés et de mettre à profit le savoir-faire de l’université ESPRIT et son partenariat avec les universités pour accueillir une forte communauté d’étudiants.
Le nord-ouest aura son «College Town»
Jinene Medjerda aura pour principales composantes une institution privée d’enseignement supérieur pour la formation et la diffusion du savoir pour 10.000 étudiants en 2020 (50% arabes et africains) et 20.000 étudiants à terme, un centre de recherche et développement, un centre de production agroalimentaire composé de clusters de haute technologie sur une ferme de 500 hectares: fruits tardifs, Stevia, héliciculture, élevage ovin, produits aromatiques, des activités touristiques «agro-éco-sport-santé» (5 étoiles), y compris des facilités de loisirs lacustres propres sur les quatre îlots du barrage pour riches clients, et enfin une nouvelle ville du type «College Town» conforme aux normes internationales et dédiée totalement à l’université.
La future cité sera articulée autour de plusieurs centres intérêt économique: agriculture, agro-alimentaire, énergie renouvelable, écotourisme, Cloud computing…
Il s’agit de capitaliser en amont sur l’amélioration de l’enseignement, la formation et l’encadrement pour promouvoir des activités agricoles, agro-forestières et éco-touristiques avec en val le développement d’industries agroalimentaires et biotechnologiques propres, ainsi qu’une station photovoltaïque flottante de 5 mégawatts, l’ensemble soutenu par des industries et services adaptés.
Financement…
Concrètement, Jenene Medjerda œuvrera à introduire des productions agricoles, agroalimentaire et éco-touristiques innovantes à forte de valeur ajoutée pour multiplier par dix le rendement économique de la ferme, et l’extension sur d’autres sites, à créer des emplois en particulier pour les cadres dans les domaines agricoles, agro-alimentaires et de service, à promouvoir des exportations de produits de grande qualité et à identifier de nouvelles filières agricoles et agro-alimentaires à haut contenu technologique respectueux de l’environnement utilisant les énergies vertes.
Les objectifs fixés sont impressionnants. Les promoteurs du projet ambitionnent de générer, d’ici 2025, un chiffre d’affaires annuel global de 900 MDT répartis en 200 MDT pour les activités académiques, 500 MDT pour l’agrobusiness, 50 MDT pour les activités touristiques et 150 MDT pour le seul College Town.
Le coût préliminaire est estimé à 1,945 milliard de dinars. Les investissements projetés sont répartis sur l’infrastructure et utilités à la charge de l’Etat (65 MDT), station photovoltaïque (280 MDT), agriculture (200 MDT), éco-agro-santé tourisme (55 MDT), Education (145 MDT), College Town (1.200 MDT).
Les concepteurs du projet estiment que Jinene Medjerda ne peut réussir que si l’Etat accepte de céder 1.000 hectares en faveur du projet, de doubler la voie ferrée reliant Tunis-Oued Zarga et autorise l’accès au plan d’eau (barrage Sidi Salem).
S’agissant de la délicate question du financement, les promoteurs ne semblent pas se faire des soucis. Des bailleurs de fonds comme la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et l’Agence française de développement auraient fait état de leur disposition à cofinancer le projet.
Reste à savoir où en est actuellement le projet. Selon Belgacem Mezni, le projet est lancé par trois partenaires, en l’occurrence l’Université ESPRITt (3.500 étudiants), la Société de développement et d’investissement du nord-ouest (SODINO) et la société Sadira.
Au niveau institutionnel, il a indiqué que le ministère de l’Investissement et de la Coopération internationale (MICI) a tenu une réunion avec les représentants de tous les ministères pour recueillir leurs soutiens. Pour lui, les résultats étaient mitigés. Tous considèrent, certes, Jinene Medjerda comme un très bon concept mais pour certains il n’est pas suffisamment mature.
Au plan du financement, il a révélé qu’un montant de 65.000 DT ont déjà été engagés par petits porteurs de la région. Ce montant s’ajoute aux 45.000 DT promis et confirmés par SODINO (opération de portage). L’objectif est de transformer Jinene.sarl (10.000 DT) en SA au capital de 110.000DT.
Et pour ne rien oublier, compte tenu de la qualité de ce projet qui va tirer vers le haut le processus de développement du nord-ouest et générer un effet d’entraînement salutaire, la société civile s’est mise dans la partie et a été ainsi sollicitée pour défendre Jinene Medjerda et mettre la pression sur les décideurs. C’est ainsi que les représentants régionaux de l’UTICA, UGTT, UTAP, CRSNO et 14 associations de développement ont rédigé une déclaration qu’ils comptent envoyer incessamment au président du gouvernement, à tous les ministres concernés et au gouverneur demandant un ensemble de décisions permettant de faire avancer le projet.