à Tokyo le 10 avril 2013 (Photo : Yoshikazu Tsuno) |
[10/04/2013 13:35:07] TOKYO (AFP) Le gouverneur de la banque centrale du Japon (BoJ), Haruhiko Kuroda, a insisté mercredi sur le fait que la politique monétaire qu’il met en oeuvre vise à en finir avec la déflation, pas à faire baisser le yen, ajoutant que la réaction des marchés n’a pas constitué une surprise.
“Le but des mesures prises est d’atteindre en deux ans un objectif d’inflation de 2%”, a expliqué Haruhiko Kuroda lors d’une rencontre avec un groupe de journalistes, des propos qu’il devrait réitérer lors de la réunion avec ses homologues du G20 les 18 et 19 avril.
Plus à l’aise devant la presse que son prédécesseur Masaaki Shirakawa, M. Kuroda dit avoir pris toutes les mesures actuellement possibles pour que les prix arrêtent de chuter au Japon, un phénomène qui freine l’activité économique.
“La précédente politique consistait à additionner des dispositions de façon incrémentale, mais cela n’a pas permis de sortir le pays de la déflation”, a-t-il souligné.
“Plusieurs facteurs expliquent cette déflation”, a-t-il précisé, citant de mauvais prêts des banques japonaises dans les années 1990 après l’éclatement d’une bulle, la flambée du yen qui amoindrit le coût des importations, l’impact des produits à bas prix fabriqués dans les pays émergents ou encore la guerre tarifaire pour attirer les clients.
Selon lui, il est de la responsabilité de la banque centrale d’en finir avec ce dysfonctionnement économique et il est important pour ce faire d’agir au bon moment, jugeant que la BoJ avait mis fin trop tôt à ses assouplissements monétaires en 2000 et 2006, considérant alors la déflation finie.
“L’assouplissement quantitatif et qualitatif décidé cette fois est très différent des politiques passées, et la réaction du marché a été jusqu’à présent en ligne avec ce à quoi nous nous attendions”, a en outre déclaré M. Kuroda.
La semaine dernière, à l’issue de la première réunion du comité de politique monétaire de la BoJ présidée par cet ex-haut fonctionnaire du ministère des Finances et ex-président de la Banque asiatique de développement, un changement radical a été annoncé.
La mesure-phare: viser un doublement de la base monétaire en deux ans, de sorte à faciliter le financement des particuliers et entreprises, le tout via le rachat massif d’obligations d’Etat et de titres de fonds cotés et immobiliers.
Même si tel n’était pas le but, cet assouplissement a eu pour conséquence immédiate d’accentuer le recul du yen face aux autres devises et de doper les actions des entreprises nippones à la Bourse de Tokyo.
Mercredi, le dollar s’échangeait au-delà de 99 yens, soit un gain de près de 7 yens en sept jours dû à l’annonce de la refonte monétaire de la BoJ jeudi dernier.
L’euro a pour sa part gagné quelque 10 yens en une semaine.
Quant au taux d’intérêt des obligations étatiques nippones à dix ans, il est tombé à un plus bas historique.
Bravant les critiques étrangères sur la dévaluation rapide du yen en raison de la politique budgétaire et monétaire japonaise, M. Kuroda a souligné que le rétablissement de la santé économique de l’archipel serait profitable au-delà de ses frontières.
“Si, grâce à la politique monétaire nationale visant à atteindre une inflation stable de 2%, l’économie japonaise se redresse de façon durable… ce sera bénéfique non seulement au Japon, mais aussi au voisinage et à l’ensemble de l’économie mondiale”, a-t-il souligné.
Et le même de promettre d’expliquer les tenants et aboutissants de ses décisions non seulement aux acteurs des marchés japonais et étrangers, mais aussi aux autres grands argentiers du monde.
“J’ai l’intention d’expliquer précisément la raison de l’assouplissement lors du G20”, a-t-il dit, se référant à la réunion des ministres des Finances et gouverneurs de banques centrales prévue la semaine prochaine à Washington, en marge de l’assemblée semestrielle de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI).
Si les acteurs du marché ont fort bien réagi aux mesures fortes décidées par l’institution, d’aucuns s’inquiètent quand même des risques encourus par les largesses octroyées qui pourraient donner l’impression que la banque centrale finance la dette de l’Etat ou encore dégénérer en bulle.
Interrogé sur ce danger, M. Kuroda s’est montré serein: “nous ne pensons pas que les dernières mesures vont déclencher des effets secondaires graves qui nous empêcheraient d’atteindre la cible d’inflation 2%”.