ées par le FBI le 19 avril 2013 |
[20/04/2013 06:53:27] WASHINGTON (AFP) Les deux suspects de l’attentat de Boston, des Tchétchènes ayant grandi aux Etats-Unis, pourraient correspondre au profil d’une nouvelle génération venue au jihad par internet qui choisissent de frapper sur place, selon des experts.
Les motivations de Tamerlan Tsarnaev, 26 ans, mort dans la nuit de jeudi à vendredi, et de son cadet Djokhar, 19 ans, blessé et arrêté près de 24 heures plus tard au terme d’une gigantesque chasse à l’homme, restent floues à l’heure actuelle.
“Manifestement, ce soir il y a encore de nombreuses questions sans réponse”, a reconnu le président Barack Obama lors d’une intervention après la capture de Djokhar Tsarnaev.
“Pourquoi de jeunes hommes qui ont grandi et étudié ici parmi nous, dans notre pays, ont recours à une telle violence? Comment ont-ils planifié et mené ces attentats? Et ont-ils reçu de l’aide”, a-t-il énuméré.
L’aîné avait bien été interrogé par le FBI “à la demande d’un gouvernement étranger” mais la police fédérale a indiqué à l’AFP qu'”aucune information suspecte” n’en était sortie.
Pour Frank Cilluffo, directeur de l’institut sur la sécurité intérieure de l’Université George Washington, les actes et les méthodes des deux frères montrent “clairement une radicalisation aux forts relents internationaux”.
Musulmans et Tchétchènes, ils sont arrivés avec leur famille comme réfugiés vers 2003 à Cambridge, près de Boston, selon le récit de leur oncle. Djokhar n’avait pas 10 ans.
éployées à Watertown, Massachusetts, lors de la traque du deuxième suspect dans les attentats de Boston, le 19 avril 2013 (Photo : Jared Wickerham) |
“Le déracinement rend les jeunes plus facilement tentés par le discours radical”, commente Bayram Balci, spécialiste du Caucase à la Carnegie, un groupe de réflexion de Washington.
“Il semble que le problème soit moins qu’ils aient pu ou non s’entraîner dans des camps en Tchétchénie, que leur radicalisation sur les réseaux sociaux”, argue Seth Jones, spécialiste du terrorisme islamiste à la Rand Corporation.
Vidéos islamistes
Tamerlan avait une page Youtube à son nom, créée en août 2012, où il avait marqué plusieurs vidéos islamistes comme favorites, notamment dans une catégorie “terrorisme”. Djokhar, qui semble détenir le compte twitter @J_tsar, fréquentait le réseau social VKontakte, équivalent en Russie de Facebook.
Le conflit en Tchétchénie est utilisé comme un “outil de recrutement par al-Qaïda” qui met en ligne de nombreuses vidéos pour attirer de nouvelles recrues, note Fiona Hill, spécialiste du Caucase à la Brookings Institution.
Sur sa page Youtube, l’aîné citait Feiz Mohammad, un prêcheur radical islamiste, et Abdel al-Hamid al-Juhani, un idéologue d’al-Qaïda en Tchéchénie.
Selon Mary Habeck, spécialiste de l’islamisme radical à l’Université John Hopkins, les premiers éléments semblent montrer que “Tsarnaev s’intéressait à une forme très radicale du salafisme, habituellement associé à al-Qaïda et ses filiales”.
L’attentat de Boston peut aussi être un acte de terrorisme “purement intérieur” qu’une action “d’envergure internationale”, selon que les frères Tsarnaev ont ou non eu des contacts avec des responsables jihadistes, explique Ben Wittes, de la Brookings Institution.
Il rappelle le cas de l’attentat sur la base militaire de Fort Hood en 2009, quand Nidal Malek Hasan, un psychiatre de l’armée avait abattu 13 personnes. Il avait auparavant échangé des courriels avec l’imam radical Anwar al-Aulaqi.
“Il y a beaucoup d’exemples de gens souhaitant combattre à l’étranger qu’al-Qaïda a encouragé à agir dans leur propre pays”, rappelle Frank Cilluffo, soulignant que c’est précisément ce que prône Inspire, le magazine en ligne de la branche yéménite d’Al-Qaïda.
Les engins explosifs camouflés dans des cocottes-minute utilisés sur le marathon de Boston, rappellent en outre singulièrement ceux dont Inspire enseigne la fabrication.
Brian Jenkins, auteur d’une étude de la Rand sur le profil des jihadistes aux Etats-Unis, a recensé 104 attentats et projets depuis le 11-Septembre. Les trois-quarts des personnes impliquées sont citoyens américains, la moitié étant nées sur le territoire, 29% ayant été naturalisés. Comme le plus jeune des frères Tsaraev.
Le schéma est semblable dans de nombreux cas, affirme-t-il: “nombre de jihadistes identifiés dans ces affaires ont commencé sur internet leur parcours vers la radicalisation” et pour eux “le jihad est moins l’expression d’une croyance religieuse qu’un prétexte à l’expression d’un malaise personnel”.