opticien dans une rue de Paris (Photo : Jacques Demarthon) |
[23/04/2013 08:44:13] PARIS (AFP) A 470 euros la paire, la France est le pays d’Europe où les lunettes sont en moyenne les plus chères, selon une étude publiée mardi par l’UFC-Que Choisir qui fustige les “dérapages tarifaires” des opticiens s’assurant des “marges exorbitantes” de parfois plus de 300%.
Selon l’association de consommateurs, près de 13 millions de paires de lunettes sont vendues chaque année en France, sans pour autant que les prix baissent, bien au contraire.
En 2012, le marché de la lunette a représenté 4,7 milliards d’euros (1,38 milliard pour les montures et 3,29 pour les verres). Avec les lentilles, les solaires et les produits d’entretien, les 11.400 magasins d’optique français se sont ainsi partagés un total de 5,7 milliards.
Selon l’UFC, “un équipement (verres + montures) est vendu en moyenne 393 euros hors taxes (soit 470 euros TTC)” soit “3,3 fois son prix d’achat”. L’opticien dégage donc “une marge brute de 275 euros” sur chaque paire “soit un taux de marge de 233%”, qui “atteint même 317%” en moyenne sur les verres.
Ce niveau de marge “excessif des distributeurs sert à couvrir des frais fixes trop élevés et des dépenses marketing inconsidérées”, dénonce l’association.
Le poids des frais de distribution représente environ 70% du prix de vente hors taxes. Cela explique que “les consommateurs français aient le budget lunettes le plus lourd d’Europe (50% plus élevé que la moyenne)”, une situation qu’elle juge “inacceptable”.
Une personne choisit une paire de lunettes (Photo : Stephane de Sakutin) |
L’inflation “exponentielle du nombre de points de vente (+47% depuis 2000)” est bien supérieure aux besoins réels de la population, estime l’UFC. Résultat: chaque boutique vend trop peu pour pouvoir supporter ses coûts et répercute donc ces derniers directement dans le prix de vente aux clients.
L’association chiffre le surcoût généré à “510 millions d’euros par an pour les consommateurs soit 54 euros par paire vendue”.
Ces prix “excessifs ont pu se développer (…) grâce à une complexité des produits d’optique et à une opacité tarifaire qui empêchent le consommateur seul de faire réellement jouer la concurrence”, souligne-t-elle par ailleurs.
Déplorant l'”absence de régulation publique”, l’UFC réclame un “encadrement de l’activité” des opticiens et l’examen par le Sénat de la proposition de loi visant à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins”, qui pourraient faire baisser les tarifs.
Le prix des lunettes fait l’objet depuis plusieurs mois de nombreux débats. Fin mars, Marc Simoncini, fondateur de Meetic reconverti en e-opticien – il dirige Sensee.com – dénonçait les “surfacturations” et les pratiques “anti-concurrentielles” des grandes chaînes de distribution d’optique.
Selon lui, le refus des distributeurs, Essilor et Krys en tête, de consentir à ce que les verres de qualité soient vendus sur internet, empêche les consommateurs de réaliser des comparaisons et de faire baisser les prix.
Du côté des enseignes, Krys justifie les tarifs français par la qualité des soins et des conseils prodigués, renvoyant la balle aux pure-players, qui “en conservant trop de marge”, sont à l’origine selon lui des prix élevés des lentilles.
Pour Alain Afflelou, ce sont plutôt les remboursements des mutuelles, qui par un effet pervers, “poussent à la consommation” de lunettes plus chères.
Une affirmation récusée par la Mutualité française, selon lquelle “c’est exactement l’inverse! Ce sont les opticiens qui disent:+combien vous rembourse votre mutuelle?+ et qui vont au maximum”.
La ministre de la Santé, Marisol Touraine, avait elle-même, en octobre, insisté sur la nécessité “de réguler le prix des lunettes”, misant elle aussi sur les réseaux de soins mutualistes.