L’industrie aéronautique fait feu de tout bois pour recruter

photo_1366785500353-1-1.jpg
à Toulouse, le 23 octobre 2012 (Photo : Remy Gabalda)

[24/04/2013 06:40:49] TOULOUSE (AFP) Formation des ouvriers demandeurs d’emploi, alternance emploi-formation, conventions avec les grandes écoles: l’industrie aéronautique, Airbus en tête, fait feu de tout bois pour accroître le vivier de main d’oeuvre adaptée à ses besoins et faire face à sa croissance.

A l’heure où le chômage global ne cesse de croître en raison des difficultés de nombreux secteurs de l’économie française, l’attrait de l’aéronautique est fort. “Les demandeurs d’emploi savent que c’est un secteur porteur, représentant 10.000 à 12.000 embauches par an”, relève Danielle Canet, représentante du Gifas (groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) dans le “Train de l’industrie” qui vient de sillonner la France.

“En une journée, à Toulouse, 60 CV de demandeurs d’emploi ou de candidats à une formation ont été remis à Airbus, la veille à Marseille c’était la même chose avec Eurocopter”, ajoute-t-elle.

Former les chômeurs

Pourtant, les chômeurs des abattoirs de poulets bretons ou de l’automobile d’Ile-de-France ne deviennent pas d’un coup de baguette magique ouvriers qualifiés en moteurs d’avion chez Safran ou dans les usines Airbus à Nantes, Saint-Nazaire et Toulouse.

Face au décalage entre les demandes des industriels et les qualifications des chômeurs ou des jeunes sortant du système éducatif, les entreprises ont souvent pris en main elles-mêmes le dossier.

L’équipementier Latécoère, créateur il y a dix ans d’une usine en zone rurale à Gimont (Gers), a ainsi été pionnier des formations pré-recrutement lancées avec pôle emploi.

Les demandeurs d’emploi, choisis après des tests d’habileté, suivent une formation d’environ 3 mois avant un contrat de professionnalisation de 6 mois à un an dans l’entreprise, débouchant normalement sur un CDI.

Airbus y recourt régulièrement, explique sa directrice de l’emploi et de la formation en France, Danielle Suinot, pour qui il ne s’agit que “d’un élément d’un puzzle, avec la formation initiale et la formation en alternance”.

La Région Midi-Pyrénées, compétente pour les lycées et la formation des chômeurs, insiste comme elle sur la nécessité de “coordonner tous les moyens”.

“Nous allons réunir toutes nos informations avec le rectorat, les formateurs et la profession d’ici juin, pour savoir s’il faut mettre en place un plan régional lourd”, précise son président, Martin Malvy (PS).

photo_1366785604759-1-1.jpg
éronautique, à Toulouse, le 23 octobre 2012 (Photo : Remy Gabalda)

Si Airbus forme 120 ouvriers et techniciens par an dans son propre lycée professionnel, l’avionneur a aussi passé des conventions avec les écoles aéronautiques (ENAC, ISAE) “pour les sensibiliser à nos besoins et les inciter a augmenter leurs promotions”, ajoute Mme Suinot. 65% des 1.300 recrues 2013 d’Airbus en France auront en effet une formation supérieure à Bac +3.

L’alternance (formation partagée entre établissement d’enseignement et apprentissage en entreprise), dernière pièce du puzzle, concerne 1.000 personnes chez Airbus, s’ajoutant à ses 24.000 salariés en France.

“Cela se développe à vitesse grand V dans l’enseignement supérieur”, assure sa directrice, qui compte atteindre 5% des salariés en alternance en 2015-2016, contre 4% actuellement. Malgré “une certaine tension” pour recruter sur quelques métiers d’ingénieur, Airbus “n’est pas aux abois”, selon elle.

Certains sous-traitants se plaignant de voir leurs meilleurs éléments les quitter, attirés chez Airbus par les salaires et la carrière, elle “dément toute tentation de les dépouiller” car “un avion est fait à 70% par les sous-traitants”.

Tout pour un vrai boulot

Les PME, moins connues qu’Airbus, ont encore du mal à embaucher chaudronniers ou ajusteurs, métiers industriels naguère peu valorisés. Mais la crise de l’emploi est telle que beaucoup de chômeurs font de nécessité vertu.

“Certains sont prêts à descendre dans la hiérarchie et en qualification pour entrer dans l’aéronautique, car c’est l’assurance d’un boulot à plein temps”, explique Henri Déan, formateur en automatismes et informatique industrielle à l’AFPA de Toulouse.

Le centre de formation aéronautique de l’AFPA, équipé de trois carlingues Airbus près de Toulouse, est “surbooké par les demandes d’Airbus et de sociétés d’intérim pour leurs candidats, nous ne prenons pratiquement plus aucun candidat individuel”, indique-t-il.

Le formateur en est presque désabusé: “Dans l’informatique industrielle aussi on a du boulot, mais on ne remplit pas nos stages, tout le monde veut aller vers l’aéronautique”.