L’Islande est sortie de la récession mais sa population en souffre encore

photo_1366873448527-1-1.jpg
à Reykjavik le 6 mars 2010 pour demander au gouvernement de faire plus pour la population (Photo : Halldor Kolbeins)

[25/04/2013 07:09:25] REYKJAVIK (AFP) L’économie de l’Islande, qui organise samedi des élections législatives, est sortie de la récession et du chômage avec des cicatrices qui ont marqué durablement sa population.

En apparence, avec un chômage enviable (moins de 5%) et une croissance correcte pour l’Europe (1,6% en 2012), l’île s’est bien relevée de la faillite de son secteur financier en 2008. Mais sa campagne électorale est marquée par un mécontentement qui coûtera vraisemblablement le pouvoir à la coalition de gauche (les sociaux-démocrates et le Mouvement gauche-verts).

Elly Ragnarsdottir, 51 ans, souffre encore des conséquences de la crise.

“Je travaillais dans un cabinet d’architectes et de design. Quelques semaines après l’effondrement des banques, tous les salariés ont été licenciés. Je suis restée au chômage un an”, raconte-t-elle.

“J’ai dû me battre avec ma banque pour rester dans la maison que j’avais achetée. J’ai négocié une solution, mais je me sens comme otage”, ajoute-t-elle.

Elle est employée depuis 2010 à la mairie de Reykjavik, “dans un domaine complètement différent” (la gestion de l’intranet) de celui où elle avait fait sa carrière. Son salaire reste inférieur à celui qu’elle avait en 2008.

Ses difficultés viennent aussi du prêt immobilier indexé à l’inflation qu’elle a dû contracter, à une époque où les banques n’offraient rien d’autre. Tout allait bien pour les emprunteurs jusqu’à ce que la crise financière fasse chuter la couronne islandaise, alimentant une inflation catastrophique pour les ménages, tandis que le chômage décollait.

De 2,5% en juin 2008, celui-ci allait dépasser 8% début 2009, culminer à 9% en mai 2010, avant de retomber sous les 5% en février 2013.

Cette chute du chômage est l’un des points forts du bilan du gouvernement sortant. Pourtant, elle laisse sceptiques les Islandais. Pour l’expliquer, ils citent pêle-mêle l’émigration des jeunes, l’exclusion des chômeurs de très longue durée des statistiques et l’augmentation du temps partiel non désiré et du nombre de bénéficiaires d’allocations handicap.

A en croire les sondages, la coalition gouvernementale sortante devrait être lourdement sanctionnée dans les urnes.

Hannes Holmsteinn Gissurarson, professeur de science politique qui fut l’une des inspirations du Parti de l’indépendance (droite), s’en réjouit. Il estime que le gouvernement “a fait l’opposé de ce qu’un gouvernement est censé faire lors d’une crise financière: il a augmenté les impôts, en particulier sur la création de richesse et d’emplois, et il a arrêté tout investissement”.

Ces recettes ont été approuvées sinon inspirées par le Fonds monétaire international, qui a prêté à Reykjavik 1,6 milliard d’euros entre 2008 et 2011. Pour l’organisation de Washington, le succès passait par une maîtrise du déficit budgétaire et une restructuration du secteur bancaire. C’est ce qu’a réussi l’Islande.

Si le FMI n’est plus là aujourd’hui, le pays se débat toujours avec les conséquences de la crise. La plus discutée dans cette campagne électorale est l’endettement des ménages.

D’après les statistiques gouvernementales, un ménage sur dix est en retard dans ses loyers ou ses remboursements de prêts immobiliers. Et plus d’un tiers des Islandais (36%) s’estiment incapables de faire face à une dépense imprévue de 1.000 euros.

Beaucoup ont l’impression que leur problème a été ignoré par ceux qui ont dirigé le pays depuis quatre ans.

“Quand j’ai perdu mon emploi, je n’ai pu trouver aucune solution à mon problème d’endettement. Les mesures du gouvernement ne me correspondaient pas”, raconte Elly Ragnarsdottir.

“La solution, elle est venue de mon banquier. Elle a pris deux ans et demi”, déplore-t-elle.