éléguée chargée des Personnes âgées, Michèle Delaunay, le 24 avril 2013 à Paris (Photo : Francois Guillot) |
[25/04/2013 12:52:54] PARIS (AFP) Inéluctable et angoissant, le vieillissement démographique peut être vu comme une énorme opportunité de croissance pour l’industrie française, que le gouvernement entend saisir en lançant une filière dédiée, la “silver economy”.
“Il y a une économie des cheveux blancs”, a plaisanté mercredi le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, après avoir donné le coup d’envoi à Bercy de cette nouvelle filière au côté de la ministre déléguée chargée des Personnes âgées, Michèle Delaunay, et en présence de 650 acteurs impliqués dans son développement.
En France, les personnes âgées de 60 ans et plus, au nombre de 15 millions aujourd’hui, seront 20 millions en 2030. Et le nombre des 85 ans et plus sera multiplié par près de 4 en 40 ans, passant de 1,4 à 4,8 millions d’ici à 2050.
“Nous allons assister à une explosion des plus de 85 ans, qui ne seront pas dépendants, à une massification du nombre de personnes âgées très valides”, a souligné mercredi Luc Broussy, conseiller général du Val d’Oise, auteur d’un récent rapport sur l’adaptation de la société au vieillissement.
à Paris (Photo : Francois Guillot) |
Selon une étude de 2010 du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), les seniors, qui disposent d’un certain pouvoir d’achat et d’une épargne conséquente, constituent un marché potentiel pour tous les secteurs de l’économie liée à l’âge (bien-être, adaptation et sécurisation du domicile, transports, loisirs, santé…)
“Après s’être focalisé sur la ménagère de moins de 50 ans, il faut s’intéresser à celle de plus de 50 ans!”, a lancé Franck Lehuédé, chef de projet seniors au Credoc.
“On est tous des personnes âgées en devenir, il faut concevoir le vieillissement comme une lame de fond qui va toucher tous les secteurs”, a assuré pour sa part Jérôme Pigniez, délégué général du Syndicat national des technologies et services pour l’autonomie (Asipag), comparant le potentiel de la filière à celui du “green business” (l’économie verte).
Une future “silver valley”
“Pour peu que l’on soit apte à former les gens, il est clair que le nombre d’emplois qui pourraient être créés est très important”, a aussi souligné l’économiste Jean-Hervé Lorenzi.
La direction de l’animation de la recherche des études et des statistiques (Dares) estime que la “silver economy” peut entraîner 300.000 créations d’emplois nettes, en dehors des remplacements de départs à la retraite, d’ici à 2020.
Mais il existe aujourd’hui des freins à son développement: les entreprises impliquées n’ont pas toujours les moyens de se développer, la grande distribution ne s’intéresse pas encore à des produits jugés “stigmatisants”, le secteur manque d’un label…
D’où l’ambition du gouvernement de structurer la filière pour lever ces freins au plus vite.
De nombreuses entreprises sont déjà sur les rangs. “Notre rôle est d’aider les personnes âgées à bien vieillir”, a ainsi témoigné Nicolas de Lambert, directeur général d’Essilor France, relevant que “si elles sont mal équipées en lunettes, c’est souvent le début de la désocialisation, et le nombre de chutes est multiplié par deux”.
La société BlueLinea, connue pour ses “bracelets pour bébés”, a récemment lancé BlueHomeCare, un dispositif destiné au télé-suivi des personnes fragiles.
A Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), l’association Sol’iage, un cluster régional d’innovation, compte développer une “silver valley”, à l’image de la “silicon valley”, en créant une pépinière d’entreprises dédiée aux gérontechnologies.
La France ne veut pas prendre le risque de se faire tailler des croupières par d’autres pays, comme l’Allemagne, les Etats-Unis, le Japon ou la Corée du Sud, qui ont déjà pris conscience du potentiel du marché.
“Nous voulons faire de la France le phare, le leader de la +silver economy+”, a ainsi assuré mercredi Michèle Delaunay, qui va plaider pour que la grande cause nationale en 2014 soit “la prévention du vieillissement”.