Nombre des grèves en augmentation, revendications salariales sans fin, surenchère entre syndicats, caisses sociales en grave déficit… Le climat social à la veille de ce 1er mai 2013 n’est pas rose du tout. Surtout que le pays connaît le plus haut taux de chômage de son histoire et enregistre une croissance économique plutôt proche du zéro…
Khalil Zaouia, ministre des Affaires sociales et ex-leader syndicaliste, a annoncé récemment, lors d’une conférence de presse, que le nombre des grèves a augmenté au premier trimestre 2013 d’environ 12% par rapport à l’année précédente. D’ailleurs, il ne se passe pas un jour sans qu’une annonce de grève soit enregistrée.
C’est vrai aussi, comme le soulignent certains responsables syndicaux, que le nombre de grève qui n’aboutissent pas parce que les négociations ont été couronnées de succès est important aussi !
Il faut également enregistrer que la majorité des grèves est dans le secteur public, et que la majorité des revendications est purement salariale -sauf certains qui, des fois, laissent rêveur dans leur irréalisme (considérer l’école de base comme un établissement public à caractère administratif doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, réclame le syndicat des enseignants du primaire)?! Si on ajoute la surenchère entre les centrales syndicales dans certains secteurs ou la manipulation à caractère politique de certaines revendications, on est en plein paysage social impossible à déchiffrer !
A cela il faut ajouter la complexité de la situation de l’UGTT, principal acteur social du pays qui est investi par son rôle historique et sa taille d’un autre rôle politique qui brouille un peu les choses. Cet entrisme politique fait qu’une frange de la population (proche des islamistes au pouvoir) reproche à l’UGTT un zèle politique inapproprié tandis que l’autre frange (celle opposée au pouvoir) se refugie à l’UGTT lors de chaque tempête politique, considérant la Place Mohamed Ali le dernier refuge des libertés publiques dans le pays !
Le marasme économique du pays depuis la révolution complique encore plus les choses, et le nombre de chômeurs qui atteint 800.000 personnes -dont une majorité de jeunes et beaucoup des diplômés du supérieur- est un autre facteur déstabilisant du climat social. Plusieurs Tunisiens stigmatisent les revendications syndicales en rappelant le calvaire des jeunes sans emploi face à des hausses des prix vertigineuses et un quasi paralysie des autres mécanismes sociaux.
D’ailleurs, le déficit des caisses sociales est une vraie plaie que personne aujourd’hui ne peut cacher. Si la CNRPS est déjà dans une situation déficitaire depuis des années, c’est maintenant la CNSS qui la rejoint et dont les comptes virent au rouge bien qu’elle soit financée par les privés, entreprises et salariés.
Khalil Zaouia a indiqué que la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) enregistre un déficit de 70 millions de dinars cette année, tandis que la CNAM (Caisse nationale d’assurance-maladie) a enregistré un déséquilibre financier de plus de 50 millions de dinars au cours de cette année…
Alors le 1er mai? On se met à rêver d’une fête du travail ou on fêtera à juste titre un climat social apaisé et un dialogue établi et une démocratie sociale à toute épreuve…Mais on n’est qu’à l’an II de la révolution et nous avons encore du chemin à faire !